L’illustration d’une mauvaise volonté politique de la part du gouvernement

Entretien avec Younes Belaïdi, Coordinateur national du Secteur estudiantin du PPS

A la suite de la tenue d’une réunion entre trois représentants du gouvernement (MM Miraoui, Aït Taleb et Baitas) avec les représentants des étudiants en grève depuis 6 mois, la montagne a accouché d’une souris… Et si les étudiants ont accepté, par un vote majoritaire lors des assemblées générales, le projet de protocole commun, les représentants du gouvernement ont soumis sa signature au passage des examens dans des délais très courts, allant du 26 juin (soit dans 2 jours) au 10 juillet…

Belle mais malheureuse illustration de la mauvaise foi des responsables gouvernementaux.

Entretien avec Younes Belaïdi, Coordinateur du Secteur estudiantin du Parti du progrès et du socialisme.

Q1 : Quel appréciation portez-vous sur les « résultats » de la réunion tenue vendredi par les ministères de tutelle avec la Commission nationale des étudiants en médecine et en pharmacie (CNEMEP) ?

Les résultats de la réunion entre les ministères de tutelle et la Commission nationale des étudiants en médecine et en pharmacie (CNEMEP) sont profondément décevants et illustrent une gestion inefficace de la part du gouvernement. Bien que certaines propositions aient été présentées aux étudiants, elles ont été accueillies de manière mitigée, avec seulement 49% des étudiants se déclarant favorables et une majorité demandant des clarifications supplémentaires. Cette situation montre que le gouvernement n’a pas réussi à communiquer de manière claire et satisfaisante. Une réunion efficace aurait produit des résultats clairs et acceptés par une majorité, ce qui n’est pas le cas ici.

Cette situation est inacceptable dans le cadre de l’État social voulu par Sa Majesté. L’État doit s’assurer que les voix des étudiants, qui représentent l’avenir du système de santé marocain, soient entendues et respectées. En ne fournissant pas des réponses claires et satisfaisantes, le gouvernement manque à ses obligations de transparence et d’inclusion, exacerbant la fracture sociale entre les décideurs politiques et les étudiants. Une gestion plus efficace et attentive de ce conflit aurait permis de renforcer la confiance des étudiants envers le système éducatif et de garantir une meilleure formation des futurs professionnels de santé, ce qui aurait bénéficié à l’ensemble de la société marocaine.

De plus, il est crucial de reconnaître les revendications légitimes des étudiants, notamment celles de revenir sur les décisions punitives qui ont été prises à leur encontre. Les notes de zéro attribuées aux examens manqués par ceux qui ont participé au boycott sont non seulement injustes, mais elles sapent également la motivation des étudiants à s’engager dans un dialogue constructif. De même, la décision de suspendre ou d’exclure certains représentants étudiants de leurs études constitue une atteinte grave à leurs droits académiques et civiques. La dissolution des conseils d’étudiants dans certaines facultés est une mesure répressive qui empêche les étudiants de s’organiser et de défendre collectivement leurs intérêts.

Ces décisions, perçues comme abusives et arbitraires, ont un impact extrêmement négatif sur la confiance des étudiants envers les institutions gouvernementales. Elles vont à l’encontre des principes de bonne gouvernance qui prônent la justice, la transparence et l’équité. En agissant de la sorte, le gouvernement compromet non seulement la stabilité du système éducatif, mais il nuit également au rapport de confiance entre les citoyens et l’État. Un climat de méfiance et de répression ne peut que renforcer les tensions et engendrer une crise plus profonde.

Après six mois de boycott, les étudiants sont profondément déçus. Les résultats obtenus ne justifient ni la perte de l’année universitaire ni les attentes élevées des étudiants. Le gouvernement doit comprendre que sans des réponses concrètes et des engagements fermes, la frustration et la méfiance ne feront que croître, menaçant la stabilité et la cohésion sociale.

Q2 : Que pensez-vous du fait que le gouvernement refuse de signer le protocole d’accord accepté par les étudiants avant le passage des examens de rattrapage ?

Le refus du gouvernement de signer le protocole d’accord accepté par les étudiants avant le passage des examens de rattrapage est incompréhensible et révèle une négligence grave. Cet engagement aurait sans doute mis fin à la crise actuelle. Cependant, en refusant de s’engager, le gouvernement démontre une gestion de crise inefficace qui pourrait prolonger inutilement le conflit. Cette inertie politique illustre une absence de prise au sérieux des revendications étudiantes.

La CNEMEP, en cherchant à formaliser ses négociations, avait espéré un accord solide et reconnu par toutes les parties. Le fait que le gouvernement refuse de signer ce protocole montre qu’il ne prend pas ce dossier au sérieux. Ignorer les accords convenus compromet la stabilité du système éducatif et la confiance des citoyens dans les institutions. Les étudiants en médecine et en pharmacie, qui sont les futurs piliers du système de santé, méritent des engagements clairs et fermes pour pouvoir poursuivre leur formation dans des conditions optimales. Cela garantirait un système de santé plus robuste, bénéfique pour tous les Marocains.

Cette attitude du gouvernement, qui refuse de s’engager fermement, aggrave la crise et nourrit un sentiment de trahison et de frustration chez les étudiants. Ces derniers voient leurs efforts et leurs attentes méprisés, ce qui pourrait avoir des conséquences graves sur leur motivation et leur engagement futur dans le domaine médical au Maroc.

Q3 : À votre avis, pourquoi le gouvernement tient-il absolument à organiser les examens, dans la hâte et à partir de cette semaine – soit à partir du 26 juin ?

L’empressement du gouvernement à organiser les examens dès le 26 juin s’explique par plusieurs facteurs. Il y a d’abord une contrainte de temps : les étudiants en médecine et en pharmacie doivent passer les examens de la première et de la deuxième session, ainsi que réaliser six mois de stages hospitaliers dans le temps restant de l’année. Cependant, cette gestion précipitée peut être perçue comme une tentative de pression sur les étudiants pour les faire céder plus rapidement.

Cette précipitation pourrait néanmoins mener à une année blanche, surtout si les étudiants décident de poursuivre leur boycott. Une telle situation serait désastreuse non seulement pour les étudiants concernés mais aussi pour le système de santé du pays, déjà sous pression. En forçant les examens dans un délai aussi court, le gouvernement risque d’aggraver les tensions et de compromettre la qualité de la formation des futurs médecins.

Le gouvernement doit comprendre que gérer une crise éducative de manière précipitée et autoritaire ne résout pas les problèmes, mais les aggrave. Une approche plus équilibrée, qui respecte les revendications des étudiants et leur donne le temps nécessaire pour se préparer correctement, aurait été plus bénéfique. Cela aurait non seulement assuré une meilleure formation des étudiants, mais aurait également renforcé la confiance des citoyens dans le système éducatif et de santé.

Le gouvernement doit prioriser une gestion collaborative et responsable des crises. L’organisation précipitée des examens, sans répondre aux revendications légitimes des étudiants, montre un manque de respect et de considération. Une gestion plus prudente et sensible garantirait une solution durable et bénéfique pour le système éducatif et de santé marocain, assurant ainsi le bien-être des Marocains.

Top