Indian Wells
Rafael Nadal est humain: l’Espagnol jusqu’alors invaincu en 20 matches en 2022, a fini par rompre, diminué par une douleur et un inconfort respiratoire, dimanche, battu par le talentueux Américain Taylor Fritz, qui s’offre à Indian Wells le plus beau titre de sa carrière.
« J’ai donné le meilleur de moi-même au cours des deux dernières semaines, mais cette fois, ce n’était pas possible, même si je me suis battu jusqu’au bout », a commenté à chaud le Majorquin, qui avait en effet été poussé plusieurs fois dans ses retranchements lors des tours précédents, mais s’en était sorti, porté par cette éternelle âme guerrière qui le caractérise.
Cette fois, ce n’est pas son pied gauche, opéré l’an passé, l’obligeant à plus de quatre mois d’absence, qui l’a fait souffrir. Mais une douleur, apparue samedi soir après sa demi-finale gagnée de haute lutte contre son compatriote Carlos Alcaraz (19e), que lui-même avait du mal à situer sur son flanc gauche.
« C’est difficile de respirer. Je ne sais pas, je me sens très… Quand j’essaie de respirer, c’est douloureux et c’est très inconfortable. Il est évident que je n’ai pas été capable de faire les choses normales aujourd’hui. J’ai essayé, mais j’ai perdu contre un grand joueur. Je pense que ce n’est pas le moment de parler de moi. C’est son jour », a-t-il dit en conférence de presse, entre désarroi inhabituel et fair-play de rigueur.
Nadal venait de rendre les armes, battu 6-3, 7-6 (7/5) après deux heures passées à lutter contre cette douleur – il a fait appel au kiné deux fois, allant même au vestiaire la première après la perte du premier set – que face à Fritz, bien déterminé, lui, à créer l’exploit, lui le natif de San Diego, qui ne comptait jusque-là pour seul titre que le tournoi sur gazon, bien moins prestigieux, d’Eastbourne en 2019.
Premier joueur cette saison à faire chuter l’ogre Nadal, le plus titré en Grands Chelems (21) depuis son triomphe à l’Open d’Australie fin janvier, qui visait un 4e sacre à Indian Wells (après 2007, 2009 et 2013), Fritz est aussi devenu, le premier Américain à triompher dans le désert californien depuis Andre Agassi en 2001.
De quoi un peu redorer le blason des Etats-Unis, dont le tennis masculin est resté en sommeil ces dernières années, mais semble devoir se régénérer avec la génération des Reilly Opelka, Sebastian Korda et autres Jenson Brooksby, tous âgé entre 21 et 24 ans.
Avant de s’effondrer de joie sur le court central, Fritz a bien cru pourtant ne pas pouvoir y pénétrer. Car lui aussi s’était fait mal, samedi, après avoir écarté le Russe Andrey Rublev (7e). Il avait confié s’être fait un peu mal à la cheville droite en fin de match et il a dû écourter rapidement son entraînement matinal.
« Ce matin, j’ai crié de douleur en m’appuyant dessus… et puis finalement je n’ai pas été gêné durant le match », a dit le vainqueur, strappé la jambe, qui n’a en effet montré aucun signe de diminution physique.
Le plus souffrant des deux n’était donc pas celui qu’on pensait et l’Américain, qui a reconnu avoir bien compris que « quelque chose se passait » en face, a joué sa chance à fond, en s’appuyant notamment sur son revers croisé, sa meilleure arme.
Dépassé dans la première manche, Nadal a résisté comme il a pu dans la seconde. Malgré un grand nombre de fautes directes, il ne s’est pas désuni, remportant quelques points superbes en allant au bout de lui-même. Il a même laissé croire à une énième « remontada », après avoir sauvé une première balle de match à 5-4 contre lui sur son service.
Mais il n’a su convertir les balles de break qui auraient peut-être tout relancé ensuite, et a fini par céder au jeu décisif, Fritz ne manquant cette fois pas sa chance.
« Gagner ici, c’est juste un rêve d’enfant que je ne pensais même pas pouvoir réaliser », a confié, très ému, celui qui est devenu le plus jeune vainqueur d’Indian Wells, depuis Novak Djokovic en 2011.
Pour Nadal, désormais, un repos s’impose, avant d’attaquer saison de terre battue, avec au bout l’objectif d’un 14e titre à Roland-Garros.
En attendant, l’Espagnol, qui devra attendre pour égaler le record de 37 titres en Masters 1000 détenu par Novak Djokovic, pourra se consoler avec l’assurance de grimper au 3e rang mondial dès lundi.