Le Maroc reste à la traîne en matière de représentation politique des femmes. C’est ce que vient de confirmer une étude réalisée par l’association Jossour Forum des femmes marocaines, en partenariat avec la Fondation Friedricht Ebert Stiftung. Ouafae Hajji, membre fondatrice de Jossour déplore «un malaise social lié à l’accroissement des inégalités et à la perte du référentiel du vivre ensemble».
En clair, la participation de la gent féminine aux sphères du pouvoir législatif, exécutif et même judiciaire demeure très faible. En témoignent les statistiques présentées par…, lors d’une conférence de presse tenue hier à Rabat. Ainsi, le taux de représentation politique des femmes demeure en deçà des attentes, bien qu’il ait progressé sur la période allant de 2007 à 2011 en passant de 10,4% à 20,5%. Pourtant, plusieurs mécanismes de discrimination positive, en l’occurrence les listes nationales, les quotas, et le principe d’alternance, ont été mis en œuvre pour faciliter l’entrée des femmes dans l’arène politique. En fait, certains chiffres laissent croire que les femmes s’autocensurent.
A titre d’exemple, le taux de féminisation de candidatures au titre des circonscriptions locales est à peine de 10,06%. Pis, seules 58 femmes se sont présentées comme mandataires de liste au titre des circonscriptions locales, soit à peine 4,5% de l’ensemble des listes de candidatures. Plusieurs facteurs expliquent cette situation. Certains sont d’ordre culturel et sociétal, généralement liés aux stéréotypes.
Globalement, le taux de représentativité féminine aux élections communales de 2015 n’a pas dépassé 4,3%. Dans le détail, seules 21 femmes ont accédé à la présidence de communes dont la majorité appartient au monde rural. Aux dernières législatives, ce taux a à peine atteint 21,1%. Mais aucune femme n’a été élue présidente de conseil régional.
De même, seules 10 femmes sur un total de 81 députées ont été élues normalement au titre des circonscriptions locales, contre314 hommes. C’est dire l’importante des listes nationales pour garantir l’accès des femmes au Parlement. Toutefois, «les listes réservées, les sièges annexes et les quotas se révèlent être plus des techniques électorales pour entrebâiller des brèches à la représentation politique des femmes», estiment les responsables de Jossour. Bien souvent, lorsque les femmes sont nommées, c’est plus pour leur identité de genre que pour leurs mérites ou leurs qualités. Autrement dit, «la présence des femmes n’est plus qu’une façon d’avoir un taux de participation».
D’où d’ailleurs «les difficultés rencontrées par les élues qui ne parviennent pas à exercer une réelle influence sur les décisions à tous les échelons territoriaux». Les témoignages recueillis par Jossour déplorent la non-participation des femmes aux négociations menées parles partis politiques sur la formation du gouvernement.
Parfois, les mécanismes mis en place pour améliorer la participation politique des femmes produisent l’effet inverse. Le scrutin proportionnel peut être un obstacle lorsqu’il s’agit de circonscriptions réduites. En effet, le maintien du seuil de 35 000 habitants exclut de facto les femmes des communes rurales dont la quasi-totalité n’atteint pas ce seuil. Il est plus favorable aux notables ruraux.
Pour l’ONG, les quotas présentent aussi des limites. Ils favorisent les femmes peu engagées dans la politique ou sans aucune formation. D’autant plus qu’«ils tendent à cloisonner les femmes dans un groupe vulnérable en quête d’assistance». Pour autant, les jeunes élus-tous sexes confondus rencontrés par Jossour pensent que les quotas et les listes réservées doivent demeurer puisque sans ces mécanismes ils n’auraient jamais été élus.
Hajar Benezha