«Rôle du patrimoine dans le développement spatial»

Pr Ismail Alaoui anime la leçon inaugurale de l’année universitaire 2023-2024 à l’INSAP

Le professeur Ismail Alaoui, membre de l’Académie du Royaume du Maroc a été l’invité, jeudi 14 décembre de l’Institut National des Sciences de l’Architecture et du Patrimoine (INSAP) pour animer la leçon inaugurale marquant le début de l’année universitaire 2023-2024 de l’Institut sous le thème du «rôle du patrimoine dans le développement spatial».

Dans une des salles des conférences de la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc, Pr Ismail Alaoui a en effet donné un cours magistral sous le thème choisi devant une assistance composée d’intellectuels, d’étudiants et de professeurs venus l’écouter et échanger autour du rôle des facteurs matériels et immatériels dans l’œuvre du développement du pays.

Après avoir rappelé que le thème initial proposé, celui de « rôle du patrimoine dans le développement des territoires» posait problèmes, il a fait savoir qu’il préfère, d’après ses recherches et son expérience sur le terrain parler du développement de LEBLAD ou TAMAZIRT, notions riches en significations culturelles et sociologiques, empruntées respectivement au dialecte de la DARIJA et à la langue TAMAZIRT.

Ceci soulève également d’autres questionnements relatifs au patrimoine culturel matériel et immatériel, dont la situation est intimement liée à l’état du relief, de la faune et de la flore dont lesquels il évolue. Toutes ces données naturelles exercent une influence certaine sur le comportement humain et impactent la mise en place et l’évolution du patrimoine culturel dont il a besoin.

Les patrimoines matériel et immatériel évolue en fonction de l’état du patrimoine naturel existant (rivières, eaux, montagnes, plateaux, etc…. et de l’interaction entre les éléments de ces patrimoines.

La nature ambiante avec ses montagnes, ses eaux, sa faune et sa flore favorise la naissance et le développement chez les habitants de la poésie, de la musique. Elle est souvent exploitée pour satisfaire les besoins des habitants et exprimer leurs sentiments, ce qui avait permis la naissance de l’art rupestre à savoir l’ensemble des œuvres d’art au sens large  réalisées par l’Homme sur des rochers, le plus souvent en plein air.

Ces œuvres rupestres réalisées par les Phéniciens «Cananéens» sont en fait à l’origine entres autres de l’écriture de la langue arabe, a-t-il dit, tout en citant la signification et l’origine de l’alphabet arabe et qui avait été copié par les écritures latine et anglo-saxonne.

Autrement, c’est grâce aux Phéniciens que l’écriture arabe avait vu le jour, a-t-il dit, rappelant que l’évolution de l’Homme dans son environnement naturel (patrimoine matériel et immatériel)  était amené à améliorer son habitat et à se créer des colonies nommées KORA (campagnes) ou MADINA (cité ou polis en grec ancien).

Et Pr Ismail Aloui de rappeler MEKKA (la Mecque) signifie la mère des Koras et se distingue par son organisation de la MADINA qui signifie Etat, comme l’utilise toujours Israel.

Le Coran traduit bien ces différentes significations. Tous les premiers versets sont MEKKISTES (organisation de l’habitat) et les autres MEDDINISTES et portent l’organisation de la vie.

Il a également indiqué que le relief, le climat, la faune et la flore sont des éléments déterminants de l’évolution de la vie et de l’organisation des habitants dans leur milieu.

Leur attachement et leur intégration dans leur milieu, territoire ou BLED sont accompagnés par la création des règles et des principes d’organisation et de gestion de l’exploitation des eaux et des autres biens communs.

Ces règles sont préservées et transmises de génération à génération dans la poésie, les danses, les hérésies, les pratiques religieuses, les prières et les croyances diverses.

Elles font appel évidemment à tous les éléments empruntés aux patrimoines matériel et immatériel comme l’illustre l’image de la mosquée où les prières se tiennent.

A côté des lieux de culte, il y a ceux de l’autorité et les exemples qui montrent l’interaction et la relation dialectiques entre le matériel et l’immatériel sont nombreux, a ajouté Pr Alaoui.

C’est ainsi qu’au fur et à mesure que le développement s’accélère, les idées et les projets se prolifèrent pour la construction davantage d’autoroutes, de gares, d’aérogares (matériel) et la promotion de la culture (immatériel), a noté le conférencier, qui a toutefois appelé à agir à temps pour la sauvegarde et la préservation du patrimoine artisanal marocain (matériel et immatériel) et son intégration pour ce faire dans l’œuvre de développement du pays.

Pour y parvenir, il a recommandé le recensement de tous les métiers mais également des monuments et sites historiques du pays (Ksours, Kasba), estimant qu’il est du devoir des générations montantes dont ceux des étudiants de l’INSAP de participer à l’entretien et à la préservation de ce patrimoine en faisant appel aux spécialités et à l’expertise nécessaire.

Il a rappelé à ce propos que Sa Majesté le Roi avait donné en 2020 ses hautes instructions pour la création d’un Institut national spécialisé dans l’entretien du patrimoine immatériel et que cette instruction n’a pas eu aucune suite jusqu’à présent. Et pourtant le pays en a besoin pour l’entretien et la restauration de ses monuments et sites historiques à l’instar de la mosquée de Tinmel construite au 12ème siècle dans le village de Tinmel dans les montagnes du Haut Atlas non loin de Marrakech et qui a été endommagée par le dernier séisme d’Al Haouz. Il en est du cas des Tombeaux Saadiens dont la dernière action de restauration et d’entretien n’a pas été honnêtement réalisée.

Et Pr Ismail Alaoui de souligner ensuite la nécessité pour toute œuvre de développement d’être globale et faire appel non seulement aux facteurs matériels mais également immatériels, tel que recommandé par l’économiste Aziz Bilal dans le but ultime de promouvoir le développement de ce territoire, qu’il a appelé Lebled.

Pour y parvenir, il importe en premier lieu de développer l’élément humain à travers la lutte contre l’analphabétisme des femmes et des hommes à part égale et faire appel à la participation des habitants dans les actions à entreprendre en s’appuyant notamment sur les dispositions de la Constitution avancée de 2011 relatives à la démocratie participative.

Selon lui, la démocratie participative est le moyen idéal d’utiliser de manière optimal les possibilités offertes aux citoyennes et aux citoyens pour gérer et améliorer leur cadre de vie et assurer leur avenir et celui des générations suivants.

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