Cancer du sein et du col de l’utérus

Propos recueillis par Ouardirhi Abdelaziz

Entretien avec madame le professeur Aghzadi Rajaa, chirurgienne spécialiste de la chirurgie du sein, résidente de l’association Marocaine de lutte contre le cancer du sein, et de l’association cœur de femme.

Al Bayane : Pouvez-nous définir ce qu’est le cancer du sein?

Professeur Rajaa Agyhazadi : Le terme cancer veut dire des cellules qui au lieu de se multiplier de manière homogène, vont se multiplier de manière anarchique.

C’est cette anarchie qui favorise le développement des petits amas qui sont à peine microscopiques et qui vont évoluer et devenir millimétriques. En se multipliant anarchiquement et en devenant de plus importantes, les cellules cancéreuses donnent naissance à des tumeurs de plus en plus grosses. A ce jour, la science ne sait toujours pas quelle femme va être concernée par cette anarchie cellulaire et quant tout ce processus va démarrer.

Par contre, ce que nous savons, c’est que ces amas cellulaires de 1 ou 2 cm ont demandé des années et des années pour se développer et atteindre une telle grosseur.

Existe- t- il un ou plusieurs types de cancers du sein ?

Ce que vos lecteurs et le grand public doivent ensemble savoir, c’est qu’il n y a pas un cancer, mais des cancers du sein. Effectivement, il existe différents types de cancers anatomo-pathologiques histologiques et c’est grâce à l’examen au microscope de la biopsie, que l’on peut définir le cancer et son statut. Ce qu’il faut savoir, c’est que ces différents types de cancers n’évoluent pas de la même manière. Certains sont agressifs et évoluent très rapidement. D’autres plus lentement. Dés lors qu’on est en possession de tous les éléments diagnostics, on doit démarrer le traitement le plus adapté à chaque type.

Vous savez, la prise en charge d’un cancer du sein n’est pas aussi simple comme peuvent le penser beaucoup de personnes. La prise en charge  d chaque patiente fait appel à une équipe pluridisciplinaire composée du chirurgien, radiothérapeute, oncologue, médecin traitant, qui en concertation déterminent le traitement le mieux adapté à chaque femme (chirurgie complétée, selon chaque cas, par la chimiothérapie, la radiothérapie, la thérapie ciblée, l’hormonothérapie).

Que pouvez-vous nous dire au sujet des signes qui doivent alerter ?

J’aime à dire que je ne veux pas voir les signes qui alertent sur le cancer du sein, c’est pourquoi en tant que spécialiste du cancer du sein, j’insiste toujours et avant tout chose sur la sensibilisation du plus grand nombre de femmes sur le cancer du sein.

Cette approche doit être celle de toutes celles et ceux qui luttent contre cette maladie. Il s’agit pour les professionnels de santé, et les autres intervenants (associations-sociétés savantes ….) de permettre aux femmes de s’approprier toutes les informations qui peuvent les éclairer, leur montrer tout ce qu’elles doivent savoir pour anticiper et agir très vite.

Aujourd’hui, grâce aux avancées scientifiques, médicales, aux nombreux moyens de communications, chaque femme Marocaine, doit être en mesure de connaître les symptômes et les signes avant-coureurs du cancer du sein. C’est essentiel pour surveiller la santé de sa poitrine et consulter sans attendre en cas de doute. En effet, bien que chaque cas soit différent, les cancers du sein diagnostiqués à un stade précoce de leur évolution peuvent habituellement bénéficier de thérapies plus efficaces et moins lourdes, et présentent un taux de survie très encourageant, bien supérieur aux cancers de stades avancés. Il faut donc surveiller toute grosseur nouvelle, ou boule au niveau du sein ou à l’aisselle, toute modification de la forme ou de la taille du sein, tout  écoulement du mamelon, et tout changement notoire de l’aspect de la peau du sein ou de l’aréole, crevasses, pigmentations.

Quand la femme constate un de ces signes, elle doit aussitôt les rapporter à son médecin traitant, car ces signes constituent les symptômes visuels les plus répandus du cancer du sein. Il est utile de rappeler que toute suspicion diagnostic de cancer justifie un avis spécialisé sans délai.

Qu’en est-il de la prévention du cancer du sein ?

Il y a beaucoup à faire en termes de prévention concernant le cancer du sein, c’est notamment le cas de la lutte contre certains facteurs de risque sur lesquels il est possible d’agir comme réduire la présence de produits chimiques dans les produits ménagers, réduire l’emploi de pesticides chimiques.

Il y a aussi les bonnes habitudes de vie (exercice physique, saine alimentation comprenant suffisamment de légumes et de fruits, l’arrêt du tabagisme et de la consommation d’alcool dont on parle peu …), et le maintien d’un poids santé qui contribuent à réduire le risque de plusieurs types de cancers, incluant le cancer du sein.

Encourager les femmes à privilégier l’allaitement maternel, cette bonne pratique joue un rôle dans la prévention du cancer du sein.

Permettez- moi avant de conclure, de saisir l’occasion que m’offre le journal Al Bayane pour saluer le rôle très important que joue le ministère de la Santé et de la protection sociale dans la lutte contre le cancer du sein et celui du col de l’utérus.

Tout est mis en place pour  permettre la détection précoce de ces cancers, des ressources humaines qualifiées, la construction et l’équipement de 55 centres de référence de la santé reproductive et l’acquisition de 24 unités mobiles de mammographie, destinées à assurer l’accès aux femmes des zones éloignées, précise la même source.

En outre, il y a lieu de souligner que les femmes qui sont diagnostiquées, sont immédiatement prises en charge au niveau de 12 centres d’oncologie et de 02 pôles d’excellence d’oncologie gynéco mammaire au niveau des centres hospitaliers universitaires de Rabat et Casablanca, en plus des cliniques privées spécialisées en oncologie qui renforcent l’offre de soins.

C’est très important de souligner tout cela, une démarche qui s’inscrit dans la vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI que Dieu le glorifie, qui accorde un intérêt constant à la santé de toutes et tous les Marocains.