Somalie : Branle-bas de combat au sommet de l’Etat

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

Alors que la Somalie connait ses premières élections depuis plus de 30 ans, le président Abdullahi Mohamed dit « Farmaajo » et son Premier ministre Mohamed Hussein Roble s’accusent mutuellement de vouloir les faire capoter.

C’est à ce titre que, dimanche dernier, le chef de l’exécutif avait accusé le président d’avoir délibérément saboté le processus électoral en prenant la décision « arbitraire » de lui retirer la charge d’organiser ces élections tant attendues qui furent à l’origine d’une grave crise institutionnelle.

Mais la situation a pris une tournure encore plus complexe lorsque, ce 26 décembre, le Premier ministre a procédé à un remaniement ministériel qui, bien que consistant en une simple permutation puisqu’il a nommé le ministre de la Défense, Hassan Hussein Haji, à la tête du ministère de la Justice et qu’il a confié le portefeuille de la Défense à l’ancien ministre de la Justice, Abdulkadir Mohamed Nur  n’a point été du goût du chef de l’Etat qui y a vu une flagrante tentative de dissimulation des faits de corruption qu’il impute à son chef de l’Exécutif.

Les choses auraient pu en rester là si un communiqué en date du lendemain, 27 décembre, émanant du bureau du Président, n’avait pas annoncé que « le président a décidé de suspendre le Premier ministre, Mohamed Hussein Roble, et de mettre fin à ses pouvoirs à partir du moment où il est lié à la corruption ».

Pour limoger son Premier ministre, le président somalien s’est appuyé sur un texte de loi interdisant, expressément, aux représentants du gouvernement d’utiliser des biens publics à des fins personnelles. Et, dans le cas d’espèce, le président « Farmaajo » a accusé son Premier ministre d’interférer dans une enquête portant sur une affaire d’appropriation de terres et, plus précisément, d’ «accaparement » d’un bien de l’Etat consistant, d’après l’hebdomadaire kényan « The East African », en un lot de terrain « appartenant à l’armée somalienne » situé près du « Lido », une plage populaire de Mogadiscio, la capitale.  

Qualifiant de « scandaleuse » la décision prise par le Chef de l’Etat, le cabinet du Premier ministre l’a immédiatement dénoncée en n’y voyant rien d’autre qu’une « tentative » destinée à permettre au président somalien de « s’emparer du pouvoir du Premier ministre par la force avec une mesure qui viole la Constitution et la loi du pays ». Aussi, le chef de l’exécutif a-t-il, immédiatement, fait part de sa détermination « à ne pas se laisser dissuader de remplir ses devoirs envers la Nation afin de coduire le pays à des élections qui préparent une passation des pouvoirs pacifique ».

Pour rappel, le mandat présidentiel du président « Farmaajo » était venu à expiration le 8 février dernier mais ce dernier n’était pas parvenu à s’entendre avec les dirigeants régionaux sur l’organisation des élections si bien que l’annonce, à la mi-avril, de sa prolongation de deux années avait donné lieu à de violents affrontements armés dans la capitale.

Mais si, dans un geste d’apaisement, le président « Farmaajo » avait chargé son Premier ministre de l’organisation des élections, la tension entre les deux hommes avait atteint son paroxysme lorsque, le 16 septembre dernier, le Président somalien avait suspendu les pouvoirs exécutifs du premier ministre.

Ce n’est qu’à la fin d’Octobre que les deux protagonistes acceptèrent d’enterrer la hache de guerre et lancèrent un appel commun pour accélérer le processus électoral.

Mais, si, à l’heure actuelle, les élections pour la chambre haute sont pratiquement terminées dans la quasi-totalité des Etats et que les votes concernant la chambre basse ont commencé début novembre, la désignation d’un président, dix mois après l’expiration du mandat de « Farmaajo », semble encore lointaine.

Autant de faits qui ont suscité les craintes des Etats-Unis qui ont déclaré, dimanche dernier, être « profondément inquiets des retards persistants et des irrégularités de procédures qui minent la crédibilité du processus électoral » et de nombreux observateurs qui estiment que la crise qui persiste au sommet de l’Etat somalien ainsi que l’impasse électorale font oublier qu’il y a d’autres problèmes très importants dans le pays comme l’insurrection des Chababs qui contrôlent de vastes  zones rurales et qui mènent encore des attaques sporadiques dans la capitale.

Quand tout cela va-t-il cesser ? Attendons pour voir…

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