Au moment même où, ce dimanche 26 mai 2019, se tenaient les élections européennes, une autre bataille se jouait à Barcelone pour la conquête de la mairie de la capitale catalane à laquelle a participé Manuel Valls, 56 ans, ancien Premier ministre de François Hollande qui, bien que n’ayant été crédité que de 12% des voix par les sondages, avait promis d’être «la grande surprise» de ces élections.
Mais, au vu des premières estimations, l’ancien dirigeant français et ancien maire d’Evry (Essonne, France), catalan de naissance, qui se présente comme étant un «social-démocrate» issu du «catalanisme modéré» n’a, non seulement, crée aucune surprise mais même complètement raté sa reconversion ibérique. Il a été, en effet, largement distancé par Ada Colau, la mairesse sortante, proche de Podemos qui s’est trouvée au coude-à-coude avec le représentant de la gauche républicaine catalane Ernest Magarall, 76 ans, lequel après avoir été crédité de 22% des voix pourrait ainsi devenir le premier maire indépendantiste de la deuxième ville espagnol depuis le rétablissement de la démocratie.
Et si, d’après les premières projections, les socialistes seraient arrivés 3èmes en glanant 16% des voix et que les indépendantistes de «Junts per Catalunya» auraient recueillis 12,5% des suffrages, il ne resterait donc plus grand-chose à l’ancien Premier ministre de l’Hexagone même s’il pourra quand même siéger au conseil municipal de la ville sous l’étiquette «Cuidadanos» (les citoyens) en étant assisté de quatre ou cinq colistiers; ce qui lui permettra, après avoir délibérément exclu tout retour à la vie politique française, de continuer son combat de l’autre côté des Pyrénées comme il l’avait souhaité à titre «intime et personnel» après sa «déconfiture présidentielle» parisienne.
Ainsi, bien qu’ayant quadrillé, ces derniers mois, sa ville natale pour montrer qu’il est un «vrai barcelonais » et bombé le torse, à la veille du scrutin, en déclarant dans «La Vanguardia» : «Je suis un leader. J’ai des défauts mais j’ai gagné toutes les élections directes auxquelles je me suis présenté», sa liste «Barcelona pel Canvi» (Barcelone pour le changement) arrive en quatrième position; ce qui, en ne lui conférant que 5 ou 6 sièges au sein d’un Conseil municipal qui en compte 41, obligera Manuel Valls à s’allier soit avec la gauche soit avec les indépendantistes tout en éloignant de lui toute éventualité de faire partie du gouvernement de la capitale catalane.
Ce résultat, il fallait s’y attendre clament certains observateurs puis-qu’après avoir choisi de participer à la vie politique de la capitale catalane, il s’était attelé à diviser la ville entre, d’un côté, les «populistes» (Podemos catalans) et les indépendantistes et, de l’autre, «les constitutionnalistes» qui défendent l’unité de l’Espagne sous-estimant, par-là, les réalités locales du paysage politique barcelonais (catalanistes modérés, autonomistes…) mais surestimant, en revanche, sa capacité de rassemblement ; ce qui a contribué, par ailleurs, à faire échouer son projet de liste «transversale» destinée à unir la droite conservatrice du Parti Populaire à la gauche socialiste lequel n’avait été appuyé que par «Cuidadanos», ce parti «né centriste mais de plus en plus porté à droite» qui, en véhiculant les idées d’ordre, de sécurité et de fermeté a «isolé» encore plus l’ancien Premier ministre français.
Et même s’il a toujours clamé son désir de continuer sa vie politique à Barcelone, sa ville natale, rien n’indique qu’en européen convaincu, Manuel Valls qui est né à Barcelone, a été élevé à Paris par un père catalan et une mère italo-suisse puis naturalisé français à l’âge de 20 ans ne risquerait pas, un jour prochain, de tourner son regard de l’autre côté des Alpes quand bien même, avant les municipales barcelonaises, il avait dit : «Quoiqu’il arrive, je reste ici» (à Barcelone). Mais, en considérant, enfin, que les voies de la politique sont, souvent, aussi impénétrables que celles du Seigneur, attendons pour voir…
Nabil Bousaadi