En empruntant la voie de la dénucléarisation donc de la paix dans la Péninsule Coréenne, Kim Jong-un et Moon Jae-in, les deux anciens frères-ennemis, ont fait perdre à Donald Trump, la précieuse monture sur laquelle il chevauchait, sans relâche, depuis son arrivée à la Maison Blanche.
Habitué à montrer les biscoteaux chaque fois que le «méchant» chef d’Etat nord-coréen procédait à un essai nucléaire et ne pouvant pas s’en passer pour exister, Trump n’a pas trouvé d’autre choix que celui de se tourner vers cet autre «ennemi de l’Amérique», cette République islamique d’Iran qui est devenue, désormais, sa seule et unique obsession.
C’est ce qu’il a fait cette semaine ; d’abord lundi, dans son discours face à l’Assemblée Générale des Nations-Unies, puis mercredi en présidant une réunion du Conseil de Sécurité portant sur la non-prolifération des armes de destruction massive avec l’espoir de pouvoir «rallier à sa cause» les autres signataires du «Joint Compréhensive Plan of Action» (JCPOA), cet accord sur le nucléaire iranien.
N’ayant pas cessé de critiquer l’accord signé à Vienne en 2015 avec l’Iran par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité et l’Allemagne, Donald Trump en était même venu à en faire sortir son pays en mai dernier pour rétablir, à compter de Novembre prochain et à l’encontre de Téhéran, les sanctions économiques dont cet arrangement avait permis la levée. Accusant l’Iran de déstabiliser le Moyen-Orient, le président américain a promis que le rétablissement desdites sanctions sera suivi de l’application de nouvelles mesures punitives «plus dures que jamais».
Mal lui en prit parce que sa rhétorique belliciste n’a pas eu l’effet escompté sur les membres du Conseil de Sécurité co-signataires dudit accord.
Ainsi, le Président Emmanuel Macron a réaffirmé la position de la France et de l’Union Européenne qui consiste à « bâtir ensemble une stratégie de long terme pour la gestion de cette crise qui ne peut se réduire à une politique de sanctions et de confinement».
Lui emboitant le pas, la Première ministre britannique Theresa May a rappelé que, pour le Royaume Uni, cet accord «demeure le meilleur moyen d’empêcher l’Iran de développer une arme nucléaire» et, qu’à ce titre, Londres s’engage «à le préserver aussi longtemps que l’Iran continuera à appliquer complètement ses engagements».
Ainsi, pour les européens, le «Joint Compréhensive Plan of Action» (JCPOA) doit être sauvegardé dès lors qu’il permet d’encadrer les activités balistiques de l’Iran. Or, le jusqu’au-boutisme de Donald Trump va, sans nul doute, pousser Paris, Londres et Berlin à faire bloc aux cotés des Russes et des Chinois pour contrecarrer l’unilatéralisme de Washington.
Présent cette semaine à New York pour la 73ème session de l’Assemblée Générale de l’ONU, le Président iranien Hassan Rohani, qui s’est réjoui du fait que tous les dirigeants soient favorables au maintien de l’accord nucléaire de 2015 nonobstant le retrait de Washington, a déclaré, dans une conférence de presse et à l’intention de son homologue américain, que l’Iran n’est pas isolé. «C’est l’Amérique qui est isolée. A l’Assemblée Générale, au Conseil de Sécurité, tout le monde a exprimé son soutien à l’accord nucléaire. Et, d’une façon ou d’une autre, tout le monde a dit que les Etats-Unis faisaient fausse route».
Assurant, par ailleurs, que Téhéran résistera au rétablissement des sanctions par Washington, Hassan Rohani a tenu à préciser que son pays continuera de respecter les termes de l’accord de Vienne avant d’ajouter, d’un air narquois, que «tôt ou tard les Etats-Unis reviendront dans l’accord (car) cela ne peut pas durer. Ce qu’ils ont fait ne profite ni au peuple iranien, ni au peuple américain, ni à l’Europe, ni aux autres pays».
Enfin, au vu de tout cela, la question qui se pose, désormais avec acuité, est celle de savoir jusqu’à quel point Donald Trump, le chef de la plus grande puissance mondiale, pourra continuer à faire cavalier seul et quel profit en tirera-t-il tant pour lui-même que pour son pays. Quoiqu’il en soit, attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi