Le mois de janvier connaît la célébration du nouvel an amazigh ; cette année il coïncide avec ce mercredi 13. C’est l’un des plus anciens calendriers adoptés. Il est porteur de riches valeurs et de références authentiques inscrites dans l’histoire de l’humanité, et des peuples de tamazgha en particulier.
Selon plusieurs chercheurs le choix de cette date pour démarrer l’année est le fruit de l’expérience humaine dans son rapport à la nature et ses cycles. Le jour de l’an amazigh dans ce sens n’exprime aucune connotation religieuse ou cultuelle. Il traduit plutôt la vénération de la terre (akal) et l’attachement à sa expression symbolique, la nation ; révélant ainsi l’ouverture de l’esprit et le large horizon social des amazighs. Une célébration qui est un hymne à tout un mode de vie et à une économie générale des relations sociales. Un héritage anthropologique et culturel qui pourrait être capitalisé dans le Maroc d’aujourd’hui, avec la célébration commune du jour de l’an amazigh à travers le royaume, pour affermir les valeurs sociales qu’il véhicule ; en faire un rendez-vous annuel pour mettre en avant les nobles sentiments d’appartenance à la nation et pour le rayonnement du sens de la marocanité chez les citoyennes et les citoyens.
Les grandes mutations socio-historiques vécues par notre peuple n’ont pas empêché des régions entières à perpétuer la célébration du jour de l’an amazigh à travers un cérémonial qui s’exprime dans des manifestations festives multiples, culinaires (la délicieuse «tagoula»), vestimentaires et à travers les échanges de vœux. Depuis maintenant des décennies, cette fête populaire séculaire, a été enrichie par des célébrations «civiles» émanant d’associations variées, relevant du mouvement culturel amazigh. Assgass amazigh est fêté alors par l’organisation de manifestations, de festivals mais aussi par la tenue de rencontres intellectuelles et de colloques qui prolongent par le biais d’un rite ancestral, la permanence d’un cahier de doléances amazighes. Des activités qui expriment cette dynamique sociétale, politique, constitutionnelle qui dessine les différentes variantes de l’œuvre collective de réconciliation nationale et de la réhabilitation de notre mémoire collective.
Des signes avaient été donnés dans ce sens avec le discours historique de S.M le Roi à Ajdir ; la création de l’IRCAM ; la constitutionnalisation de la langue amazighe et tout le cheminement en cours pour la mise en application réglementaire de cet acquis ; la création du Conseil supérieur des langues et de la culture…
Autant d’indices qui signifient que nous sommes en face d’un nouvel élan politique et institutionnel qui va renforcer la dynamique engagée et la rendre irréversible.
Cela suppose en outre d’afficher une claire volonté politique notamment par rapport aux deux projets de loi en cours d’élaboration. Avec le souci de mener cette opération dans un esprit de concorde nationale afin de permettre leur mise au jour dans les plus brefs délais avec l’ensemble du dispositif institutionnel et pratique inhérent à leur adoption. Cela suppose également tout un ensemble d’initiatives concrètes afférentes notamment à l’enseignement de la langue amazighe ; à sa présence dans les différentes administrations, tribunaux, medias et dans l’ensemble de l’espace public. Avec un intérêt et un soutien accru aux arts, à la culture et à la recherche scientifique.
Parallèlement à ce programme, nous pensons qu’il est temps d’envoyer des messages à forte charge symbolique, en prenant des mesures qui sont immédiatement opérationnelles sans coûts supplémentaires et sans difficultés –en principe- politiques : il s’agit en priorité de l’inscription de la célébration du jour de l’an amazigh dans le calendrier des fêtes nationales et officielles. Un geste pour mettre l’Etat et l’administration en symbiose avec les célébrations populaires et associatives organisées à travers le pays. Un geste politique fort qui sera apprécié à sa juste mesure et un moment pour confirmer si besoin on est, la richesse, l’authenticité de la culture et de la civilisation amazighes. Une nouvelle opportunité aussi pour célébrer la diversité et la profondeur des composantes de l’identité marocaine. Et c’est aussi fondamentalement, un arrêt sur image pour dire notre amour à une terre et à une nation dans leur unité et leur intégrité…qui nourrissent notre fierté.
Officialiser le jour de l’an amazigh est également un geste à l’égard des instances internationales concernées pour leur envoyer un message, leur indiquer la voie à suivre…pour rejoindre et exprimer à travers différentes initiatives les fêtes et les joies des peuples de tamazgha de la mer rouge à l’océan atlantique et dans toute la diaspora.
Que 2966 apporte à ces peuples paix, dignité, et prospérité; et à nos lecteurs et à l’ensemble du peuple marocain nos vœux les meilleurs.
Mahtat Rakas