L’auteur féministe jusqu’au bout des ongles

Allaoui Bensad Bayya 

Propos recueillis par Karim Ben Amar

Né à Reims d’un père marocain originaire de Sidi Kacem ,  Allaoui Bensad Bayya est titulaire d’un deug en musique, d’une formation au CNFDI en journalisme, et suit actuellement une licence d’histoire. Comédien danseur dans la compagnie des orientales en couleurs, il a quitté ce domaine artistique pour se consacrer à sa grande passion, l’écriture et le chant. Son dernier ouvrage, est un recueil intitulé « Poèmes élégiaques » paru chez Orion. Poète féministe, la rédaction Al Bayane s’est  entretenue avec ce dernier à l’occasion de la journée de la femme. Entretien.

Al Bayane : On dit que dans vos écrits, vous mettez toujours la femme à l’honneur. Quelles en  sont les raisons ?

Allaoui Bensad Bayya : Je mets la femme à l’honneur dans mon travail d’auteur compositeur, interprète et d’écrivain, et ce depuis mes quinze ans.

En perpétuelle quête spirituelle, et en construction sociale et identitaire, de nombreuses femmes ont non seulement façonné ma manière de vivre, de penser mais m’ont surtout aidées à m’améliorer. Que ce soit l’éducatrice, ma mère ou l’animatrice en foyer, les femmes ont toujours été pour moi d’un grand secours. Durant la période de l’adolescence, mon  rapport à l’autorité s’est exacerbé. Fragilisé par mon vécu et par l’absence de mes vrais parents, j’ai tenu tête à ma mère adoptive, écrit des textes agressifs, et  ne me suis pas résigné à la résilience pendant plus de quinze ans, jusqu’à ma faillite personnelle. Ma mère adoptive ne m’a  pas jugée, bien au contraire, puisqu’elle m’a hébergé de nouveau. Après cette douloureuse épreuve, j’ai dû repenser mon art avec la vision d’un fils envers sa mère, un croyant envers sa foi et un citoyen dans ses devoirs. J’ai alors choisi de dévoiler leur courage dans des chants comme le « lacrime della madre » ou comment aimer ma mère; puis à travers mes livres, dont  le prochain jarima abordera la pensée et la vie qui se consume d’un artiste qui refuse d’écouter la sage parole  de  sa mère, de nourrir la foi dans sa religion.

On peut donc prétendre que vous êtes féministe jusqu’au bout des ongles ?

Absolument. Je le suis pour les raisons que j’ai citées.  En ce jour spécial, il faut rappeler que les intellectuels ont longtemps dénigré les femmes. Une historienne explique dans son ouvrage sur le sourire de la femme que ce dernier a longtemps été vu comme une hystérie.

Quant à Laure Adler , elle évoque la liberté des femmes dévoilées de leurs vêtements dans  les tableaux. Elles sont selon elles,  libres et consentantes, et non pas soumises à l’homme.

Ce sont les femmes qui m’ont initié au féminisme. Nous pouvons féliciter Simone Veil , ou Gisèle Halimi, d’être les porteuses d’espoir. Les femmes comme Dafroza Gauthier qui a relevé la tête dignement après les horreurs infligées aux tutsi m’inspire.  Le Monde musulman n’est pas en reste puisque les femmes ont toujours été très écouté. Certaines épouses du prophète étaient aussi ses conseillères, il s’agit de Khadija et de Aisha .

Vous êtes originaire de Sidi Kacem, ne rendez-vous pas aussi hommage à la femme marocaine ?

J’ai beaucoup d’admiration pour la femme marocaine est son courage.  Je dévoile aussi à travers mon recueil, mon admiration pour ma famille composée de femmes de tous les âges et de divers choix, religieuses ou pas. Ces femmes libres m’ont réconcilié avec la mémoire de mon père décédé,  qui ne m’a pas élevé mais voulait que je porte son nom. Ma cousine Ikram, qui est ma fierté, me parle souvent de son amour pour le théâtre. Elle correspond à la femme marocaine que j’aime , souriante , cultivée , libre  et pleins d’espoir. Nous avons des talents  qui nous rendent fiers d’être marocains. Nous avons besoin de leurs regards plein de sagesse, de leurs pensées pour nous guider vers la raison.

En d’autres terme, les femmes ont influencé votre parcours ?

Plus que ça, j’aime les femmes qui me corrigent . L’art au féminin est un art plein de délicatesse pour dissoudre la rudesse de ma pensée masculine. je le remarque d’ailleurs en cours de piano. Avec une femme, c’est différent. Il y a une finesse essentielle pour jouer de manière moins rude. Nos professeures ont cette bienveillance pour nous accompagner là où on veut aller. Je repense à cette dame au foyer qui m’a fait céder , et fait aimer assister à ses ateliers et  suivre des chemins différents que ceux que je voulais emprunter. Il me fallait donc aller aux musées, ouvrir les livres d’art, de littératures, de sciences humaines. De ce fait j’ai été inspiré à reprendre mes études à trente ans .

Par ailleurs, ma prof de danse m’offrait l’opportunité par son art et le bénévolat d’évoluer techniquement, d’aimer mon corps.  

Quid des projets d’avenir ?

Honnêtement, je ne me prends pas trop la tête. Mon objectif et de ma  faire connaître au Maroc. Ce sera vraiment une consécration pour moi. J’aimerais aussi continuer des cours de chants que je dispense chez alegro music. A 40 ans, je suis toujours étudiant, et de ce fait j’aspire à l’obtention de ma licence en musique ainsi qu’en histoire. Et en termes d’écriture, mon prochain livre s’intitulera « Jarima » et il traite aussi de la femme.

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