Quel est la relation entre le facteur temps et l’écriture ? Voici un vieux thème longiligne qui n’arrête pas de nourrir le débat entre intellectuels et écrivains. Le journaliste, écrivain et essayiste Abdelali Barakats’y emploie à travers un recueil de chroniques. Il revient sur le sujet à travers un essai réunissant des billets, publiés entre 2014-15, sur les colonnes de Bayane Al Yaoume, où il dirige les pages littéraires.
Cette œuvre, qui a reçu le soutien du ministère de la Culture et éditée par « Slaiki Akhawayne », est un voyage initiatique qui scrute la corrélation entre le facteur temps et l’acte d’écrire comme acte libérateur, expressif et révélateur de la condition humaine, culturelle et socio-psychologique de l’écrivain.
Délibérément ou par paresse, l’auteur n’a pas voulu introduire ou préfacer ce recueil. Il a aussi omis de dater ses chroniques. Ce choix peut être interprété par sa volonté d’initier le lecteur aux différentes facettes de la problématique. S’agit-il de la définition du temps de l’écriture, de la gestion du quotidien de l’écrivain, de la trace que laisse l’écriture dans le temps, du temps nécessaire pour se ressourcer et fertiliser son imagination où de l’écriture et son évolution dans le temps.
Barakat ne répond pas directement à cette question et préfère nous entraîner au gré de notre curiosité dans sa dialectique et au fil de ses chroniques concises et pertinentes. Il laisse au lecteur le soin de détecter les contours de la question sans imposer son choix. D’un billet à l’autre, la vision s’éclaircie et notre rapport au temps devient plus clair et plus dégagé. Barakat s’interroge tantôt sur la place de la valeur temps dans la vie de tous les jours tantôt sur la perception de la mesure de cette valeur. Il nous mène après vers des interrogations plus profondes sur le rapport tendu entre l’écriture et le temps. Il y détaille la corrélation entre le temps de l’écrivain, le temps de l’inspiration et celui de la maturation de l’œuvre.
Parfois on regrette le caractère épistolaire où l’auteur s’adresse à ses confrères, souvent sur la base d’un autre débat où échange et il nous manque les éléments du contexte pour mieux saisir le message.
Barakat est avare en explications et parfois même en arguments. Cela lui ressemble dans la vie réelle. Abdelali n’aime pas trop se répéter et évite d’insister. Il se contente d’un regard furtif pour transmettre en un seul jet une idée dense et un tas d’informations à la fois utiles et compliquées. «Le temps et l’écriture» est le quatrième ouvrage de Abdelali Brakat, lauréat du Prix de l’Union des écrivains du Maroc en 1994, pour «Petites choses».
Najib Amrani