Soukayna Jamali: «Ma vie ressemble à une belle mélodie musicale»

«La créativité musicale est un acte esthétique par excellence. C’est l’incarnation majestueuse de l’existence humaine», dit-t-elle.

Ses cheveux châtains, sa petite taille et son caractère joyeux annonçaient son âme et lui confèrent l’air d’une femme dotée d’une conscience aiguisée. Sa manière d’analyse et son sens de l’argumentation illustrent parfaitement sa personnalité et ne laissent pas indifférent son interlocuteur.

Il faut dire qu’elle fait preuve d’une grande maturité alors qu’elle vient juste de fêter ses 22 printemps.  Son credo : «la réussite dans la vie est tributaire de l’individu, lui-même».  En termes plus clairs, l’être humain ne doit jamais courber l’échine. «Il faut qu’il se soit doté d’une vision du monde, se libérer des préjugés et être maitre de son destin en allant droit au but», souligne-t-elle avec insistance.

Native de la capitale de l’Oriental, Soukayna Jamali, artiste musicienne, se voit déjà sur le podium des stars. Son single, lancé il y a quelques jours sur la plate-forme «Mazone», a fait un tabac. «Mon œuvre artistique se veut un véritable hommage au feu Taher Soulami, mon premier professeur qui m’a initié au chant gharnati», déclare-t-elle non sans une certaine émotion.

Pourtant, cette œuvre qui fut une interprétation de la chanson de Kamal Massaoudi, avec un nouvel arrangement musical, n’aurait pas avoir le jour sans le soutien de ses amis, reconnait-t-elle.

La fille du quartier Lazaret qui poursuit actuellement des études supérieures en management des organisations, révèle qu’elle a trouvé sa passion pour l’univers de la musique grâce à la volonté déterminée de ses parents.

«J’ai grandi dans une famille ouverte sur son monde extérieur. Mes parents tâchaient à m’inculquer une éducation citoyenne fondée sur les valeurs de l’amour et le respect de l’autrui», indique-t-elle.

Soukayna raconte que la vie dans la maison familiale ressemblait à une mélodie musicale. «Chaque matin, ma mère, Hafida, veille à nous faire écouter les chansons de la diva libanaise Fairuz. Idem pour mon papa, Jaouad, qui avait un goût spécial pour les chants poétiques inspirés de la Qasida populaire. Ce fut un rituel sacré chez nous. Cela dit, notre vécu quotidien fut pareil à une belle mélodie musicale», note-t-elle en substance.

Abondant dans le même ordre d’idées, notre interlocutrice se rappelle encore du jour où son oncle maternel, Abdelghani, lui a offert une guitare , à l’occasion de son anniversaire et ce lors d’un voyage d’été à la ville à Assilah en 2006. «J’étais encore enfante. J’éprouvais une immense joie. Ce fut le summum du bonheur», confie-t-elle au journal Al Bayane.

Il faut dire que la fille du quartier Lazaret fut grandement influencée par le milieu de sa socialisation. Depuis sa petite enfance, elle vouait une grande une admiration pour les chansons d’Etta James, légende américaine du Jaz ou celles du fameux pianiste Ray Charles.

D’ailleurs, son grand-père, Mohamed Jamali, manifestait un amour incommensurable pour cet art noble, alors que l’oncle paternel du papa, Ali Jamali, un excellent harmoniciste, très célèbre dans la ville d’Oujda, fut l’un des amis intimes de Younes Migri.

Pour l’histoire, un jour sa mère recevait chez elle la charmante chanteuse, Fatima Zohra Qortobi. Sur le conseil de cette dernière, sa famille décide de l’inscrire à l’Association Al-Ismailia du chant gharnati, située dans le musée Lalla Meriem.

«Mes parents étaient profondément acquis à la ferme conviction que l’apport de la musique au développement de la personnalité est d’une importance cruciale, surtout que j’étais connu dans mon entourage par mon caractère plus ou moins effacé», avoue-t-elle.

La culture, une arme pour l’émancipation

Pour notre interlocutrice, le mérite d’avoir poursuivre des études en musique a eu un impact positif sur sa personnalité. «Avant, j’étais très timide et même craintive. Alors ce ne plus le cas aujourd’hui», affirme-t-elle.

Au conservatoire, Soukayna va s’atteler à développer davantage son talent musical. «Ce fut un apprentissage par la pratique. Nous étions appelés à interpréter les différentes noubètes du chant gharnati et ce dans une ambiance collective», indique-t-elle.

D’ailleurs, elle garde toujours de beaux souvenirs de son premier maitre. «Feu Taher Soulami fut plus qu’un professeur. Il remplissait le rôle de nos parents.  Il fut à la fois, éducateur et ami, qui nous entourait de son amour et de son affection. Bref, ce fut un véritable défenseur de l’éthique des vertus», se rappelle encore non sans une certaine nostalgie.

Outre la musique, Soukayna avait également un faible pour la poésie. En week-end, elle tenait à assister à toutes les rencontres culturelles organisées par la Rabbita des jeunes poètes de l’Oriental au café littéraire.

Soukayna Jamali fait également savoir qu’elle a un penchant particulier pour les livres des grands auteurs de la philosophie allemande tels  Nietzsche, Freud ou encore Heidegger…

Dans une société plus ou moins conformiste, «la culture demeure la seule arme que la femme devrait s’approprier pour prouver son existence», juge-t-elle.

Après avoir pris part à plusieurs manifestations artistiques, la fille de Lazaret va se produire avec le banjo dans le plus ancien festival du chant gharnati, organisé par le ministère de la Culture à la capitale de l’Oriental et ce en interprétant en compagnie de sa troupe «la Nouba Hsin», l’une des compositions musicales les plus difficiles. «Ce fut en 2011. Cela nous a valu les louanges du public et de notre maitre feu Taher Soulami, qui était fier de notre prestation».

Selon elle, «la beauté de la musique gharnati réside de son tempo musical et ses mélodies scandées selon un rythme offrant une grande marge de liberté à l’artiste».

Pour l’heure, la fille de l’Oriental pense déjà à ses projets futurs. Son ambition consiste à interpréter les anciennes chansons populaires avec un nouvel arrangement musical, tout en essayant d’y apporter à une touche novatrice, conclut-elle.

Khalid Darfaf

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