UMT: Miloudi Mourakhik se succède à lui-même pour un 3e mandat

Sans grande surprise, Miloud Moukharik, s’est succédé à lui-même à la tête de l’Union marocaine du travail (UMT) pour un troisième mandat de quatre ans. Le Secrétaire général sortant  a été le seul et unique candidat en lice pour la présidence de la plus ancienne centrale syndicale du Royaume. Le Secrétaire général sortant été élu par la majorité de quelque 1500 congressistes à une heure tardive de la soirée du 16 mars. Dans la même journée, les congressistes ont procédé au renouvellement de la commission administrative, le bureau national ainsi que le secrétariat exécutif.

«Le dialogue social demeure un élément clé pour l’édification d’une économie moderne et compétitive», a souligné Miloudi Moukharik, Secrétaire général de l’Union marocaine du travail (UMT), lors de la cérémonie inaugurale du  12 e Congrès national de sa Centrale syndicale, tenue les 15,16 et 17 mars à Casablanca.

Le numéro un de la plus ancienne organisation syndicale, s’est penché par la même occasion sur  le choix du slogan du Congrès placé sous le thème «Pour un nouveau projet de société qui rompt avec le mal-développement et consacre la justice sociale»,  un choix, qui va parfaitement de pair avec les valeurs portées par son instance, notamment le partage équitable des richesses, le respect des libertés syndicales, la défense  de l’égalité des chances et le renforcement du rôle de l’Etat en matière des services publics…

Evoquant un contexte international de plus en plus menaçant, marqué par une hégémonie accrue des forces impérialistes avec la complicité du capitalisme sauvage, Moukharik a indiqué que la réalité du pays est profondément inquiétante à plus d’un titre au regard des choix impopulaires adoptés par les gouvernements qui se sont succédé et qui vont à l’encontre des aspirations de la classe travailleuse.

Il s’agit, selon lui, des choix incarnant encore la continuité du programme d’ajustement structurel (PAS)   tout en ayant contribué à creuser davantage  le fossé des inégalités sociales et spatiales et contribuant à  la recrudescence des différenciations sociales, économiques et même culturelles. Pourtant, «le Maroc n’est pas pays pauvre, loin de là, il dispose d’énormes richesses économiques et humaines», a-t-il ajouté, tout en affirmant  que les gouvernements ont procédé de telle sorte à hypothéquer l’avenir du royaume et ce  en pariant uniquement sur les investissements étrangers.

Autrement dit,  «l’absence de planification et d’une vision claire chez le gouvernement, le fléchissement du chômage et la dégradation du pouvoir d’achat, sont autant de facteurs qui mènent le pays vers l’inconnu», a-t-il déclaré en substance. En témoigne, a-t-il insisté,  la réduction des dépenses sociales,  l’annulation de la caisse de la compensation, le gel des salaires et le refus catégorique de s’inviter à la table du dialogue social. Abondant dans le même ordre d’idées, Miloudi Moukharik a fait part du soutien de son syndicat à tous les mouvements de contestation populaire tout en appelant le gouvernement à la libération des  détenus notamment ceux du Hirak du Rif et de Jerrada.

Responsabilité du gouvernement

Certainement,  selon le responsable syndical, le gouvernement est pleinement responsable de la dégradation de la situation sociale en tenant une politique favorable aux intérêts de certains partons d’entreprises et ce  au détriment des droits des travailleurs. Et les exemples ne manquent pas, a-t-il déclaré avec insistance, à commencer par le licenciement des salariés en raison de leur activité syndicale, passant par l’encouragement des sociétés de sous-traitance et des contrats à durée déterminée…

Dialogue social, une priorité

Argument à l’appui, le responsable syndical a fait savoir que 8 sur 10 salariés sont privés de la couverture sociale, 77% des salariés actifs  ne disposent point de couverture médicale et 79% ne sont pas inscrits dans un aucun régime de retraite.

S’agissant du marché du travail, le taux de chômage a connu une  hausse significative, en passant de 8,9 % en 2011 à 10,% en 2018.  Encore plus, 3 sur 10 des Marocains sont classés dans la catégorie de non-emploi et environ un million de jeune de moins de 25 ans dont 60 % des femmes sont condamnés au chômage. A cela s’ajoute que 27% parmi les diplômés de l’enseignement supérieur sont inactif, a-t-il noté.  Cela étant, le gouvernement est tenu à retrousser les manches pour faire face à la crise en œuvrant à la création d’environ 280.000  postes d’emplois annuellement.

Il faut dire que le système de l’emploi actuel, au nom de la flexibilité et de la compétitivité des entreprises, n’a fait que renforcer la précarité en exerçant une forte pression à la baisse sur les salaires, a martelé l’intervenant.

En termes plus clairs, l’Etat marocain s’est défait de toutes  ses responsabilités, en adoptant des législations contraignantes tout mettant en panne le dialogue social en le vidant de tout sens, a-t-il poursuivi en soulignant que cela «ne fait que confirmer son mépris pour la classe des travailleurs».

«Le dialogue social constitue une entrée principale pour instaurer la paix sociale et le seul moyen pour créer une atmosphère favorable à la stabilité et la  réussite de l’entreprise», a affirmé le Secrétaire général tout en appelant à son institutionnalisation «en tant que cadre propice, d’abord pour surpasser les divisions et créer, par conséquent, des conditions optimales pour les négociations et la gestion des litiges  des relations du travail. Le but escompté est celui de garantir les intérêts de toutes les parties», a-t-il noté. D’ailleurs, il s’agit d’une conviction ferme pour l’UMT, malheureusement, la situation actuelle ne présage pas de lendemain meilleur, à cause d’un gouvernement intransigeant ne cessant d’afficher son hostilité à la classe des travailleurs, a-t-il asséné.

Sur un autre registre, Moukharik a évoqué le cas des violations flagrantes des libertés syndicales et les tracasseries que subissent les responsables syndicaux et les mesures abusives auxquelles ils  doivent faire face. A l’en croire, 27 mille salariés ont  été mis à la porte dont 394 responsables syndicaux et 123 autres ont fait l’objet de poursuite judicaire alors que 90 syndicalistes sont menacés de sanctions pénales prévues par le fameux article 288 datant de l’ère du coloniale.

Qui plus est, il y a des entreprises qui refusent de se conformer à la loi, en versant des salaires au-dessous du Smig. Certains recourent même à des pratiques frauduleuses en s’abstenant à déclarer les jours effectifs du travail afin d’augmenter leur gain. D’ailleurs, le nombre de travailleurs déclarés auprès de la CNSS  ne dépasse à peine les 2,7 millions sur 5, 5 millions de l’ensemble des salariés. Les statistiques démontrent aussi que seulement un million de salariés sont déclarés sur la base de l’emploi effectif de travail. Ce signifie, a-t-il expliqué, qu’environ 1,7 millions de salariés sont lésés dans leurs droits légitimes et 45% des salaires déclarés sont inférieur au Smig.

Tout en dénonçant ces pratiques, Moukharik a fait de la défense des libertés syndicales et le respect des lois en vigueur une raison d’existence de son syndicat.

Notons au final que la cérémonie d’ouverture a été marquée par la présence de plusieurs formations politiques nationales dont le PPS et des délégations étrangères représentant la Tunisie, la Mauritanie, le Koweït, le Sultanat d’Oman, entres autres.

Khalid Darfaf

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