Après plus de sept années d’existence, le bitcoin suscite un intérêt croissant dans le monde. Une attention grandissante à la veille de procès d’un personnage énigmatique, le français Mark Karpeles, dont le nom se lie au plus grand scandale impliquant cette monnaie.
Le bitcoin est là depuis bientôt sept ans, mais il cache autant de mystère qu’à l’heure de sa parution. Agencement des termes anglais «coin», pièce de monnaie, et «bit», unité de mesure informatique binaire, le bitcoin désigne une monnaie virtuelle issue d’un logiciel conçu en 2009 par un ou plusieurs informaticiens, se cachant derrière le pseudonyme Satoshi Nakamoto. Contrairement aux devises physiques telles que l’euro ou le dollar, le bitcoin est immatériel et n’est régi par aucune banque centrale ni aucun gouvernement, mais par une vaste communauté d’internautes. Toutefois, au Japon, une loi datant de 2016 encadre les sociétés gérant des plateformes d’échange. Ce texte sur «les monnaies virtuelles» a été décidé après le scandale qui a conduit à la faillite de la plateforme d’échange MtGox en 2014.
Une valeur fort lucrative
La monnaie bitcoin, à l’instar d’autres crypto-monnaies, sert à payer des services, des marchandises ou même acheter d’autres devises. Elle est cependant la plus connue et est désormais acceptée par des milliers de sites web et boutiques ayant pignon sur rue. Il existe des plateformes d’échange permettant d’acheter des bitcoins avec d’autres devises. Vendredi, un bitcoin valait à Tokyo quelque 284.110 yens ou 2.499 dollars et 2.189 euros, après avoir connu au fil des ans de très importantes fluctuations.Certains le considèrent comme l’investissement du siècle. Il ne valait que quelques centimes à son lancement, puis est monté à plus de 1.000 dollars à l’automne 2013 avant de retomber autour de 200 dollars en 2015 et de se relever ensuite. Il va sans dire que les premiers acquéreurs du bitcoin ont réalisé une affaire fort lucrative, et certains sont aujourd’hui millionnaires grâce à cette monnaie.
Une réputation entachée par les trafics illégaux
La création de bitcoins est entièrement informatique, mais elle est plutôt réservée à des spécialistes dotés de serveurs de très grande puissance de calcul.Un logiciel gratuit à télécharger permet la fabrication de cette monnaie, une opération appelée le «minage». Il faut pour cela résoudre des équations successives avant d’obtenir un bitcoin.L’algorithme génère les bitcoins en nombre décroissant jusqu’à ce que le total en circulation (actuellement plus de 16,4 millions d’unités, représentant une capitalisation totale d’environ 43 milliards de dollars), atteigne le plafond de 21 millions. C’est ce caractère «série limitée» qui est en partie responsable de la quête de cette monnaie.Le système de cryptage employé garantit en théorie la sécurité et la traçabilité des transactions.Mais, instrument, selon ses détracteurs, de tous les trafics illégaux du fait de l’anonymat des paiements, le bitcoin est, dans sa forme actuelle, vulnérable au vol ou toute autre opération frauduleuse.
Le procès du baron des bitcoins commence aujourd’hui
Le procès du baron autoproclamé des bitcoins, le français Mark Karpeles, débutera aujourd’hui mardi à Tokyo. Malgré le scandale lié à la faillite de la plateforme d’échanges MtGox, le bitcoin est une monnaie virtuelle toujours plus tentante. «Il attend son procès avec calme et va plaider non coupable», a déclaré cette semaine son avocat, Kiichi Iino, aux agences internationales.
En liberté depuis un an, après avoir passé autant de temps en prison, Mark Karpeles est accusé d’enrichissement personnel par la création artificielle d’un million de dollars. Ce, au détriment des véritables détenteurs de bitcoins dont sa société, implantée au Japon, gérait les actifs. Cette dernière a déposé le bilan début 2014.Aujourd’hui âgé de 32 ans, il avait déjà été condamné en France en 2010 à un an de prison pour «accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données» de l’entreprise où il travaillait au moment des faits.
Dans le cas de MtGox, il a toujours affirmé que la plateforme avait été victime d’une attaque informatique extérieure, mais mi-septembre 2015, il a été mis en examen et emprisonné, après déjà 6 semaines de garde-à-vue, pour falsification d’informations et détournement d’une somme de 321 millions de yens (2,4 millions d’euros). Depuis cette affaire qui remonte à plus de trois ans, le bitcoin a fait grand débat au Japon et sa réputation a souffert, mais cette époque est désormais presque révolue. Une loi de mai 2015 lui a donné, ainsi qu’à d’autres moyens de paiement de ce type, un statut encadré de «monnaie virtuelle», ce qu’elle n’était pas auparavant.Les plateformes d’échange comme BitPoint ou bitFlyer doivent, pour pouvoir officier, recevoir un agrément des autorités.Celles qui sont entrées dans cette activité se démènent pour promouvoir la monnaie dont le cours était ce vendredi au Japon égal à 284.110 yens (2.189 euros), un niveau qui paraissait inimaginable à l’époque MTGox.
Des magasins aussi réputés que la chaîne nippone de grandes surfaces d’électronique Bic Camera ou la compagnie aérienne Peach Aviation acceptent les paiements en bitcoins, ou sont sur le point de le faire.Des jeunes, qui n’osent pas investir en Bourse, voient dans le bitcoin un moyen de thésauriser, étant rassurés, à tort ou à raison, par les messages vantant la sûreté offerte désormais par des sociétés moins obscures que ne l’était MTGox et dans un environnement légal clarifié.Reste que, malgré ces précautions, les autorités et la presse mettent en garde régulièrement contre de petits malins qui vendent à des naïfs de faux bitcoins ne valant absolument rien.
Iliasse El Mesnaoui (avec agences)