Dr Ilham Azghari*
Le Gluten, cette fameuse protéine conférant aux pâtes leur aspect moelleux est aujourd’hui sous les projecteurs et mise en cause pour plusieurs troubles digestifs. Qu’est-il vraiment ?
Tout d’abord, le gluten, qu’est-ce que c’est ?
Le gluten est présent dans les protéines des farines, à savoir le blé, l’orge et le seigle. C’est la substance qui donne un effet de colle lors de la confection d’une pâte après le mélange avec l’eau et qui la rend donc moelleuse. Le mot Gluten vient justement du latin ‘gluten’ qui veut dire colle.
Où se trouve le gluten ?
Dans le blé, l’orge et le seigle. L’avoine ne contient normalement pas de gluten dans sa composition, mais le fait qu’il est recueilli, moulu et transporté avec les autres blés faits qu’il en contient au final par contamination.
Le maïs, le riz, le mil, ne contiennent pas de gluten.
Qu’est-ce que l’intolérance au gluten ?
Appelée aussi maladie cœliaque, l’intolérance au gluten est une maladie auto-immune, c’est-à-dire que suite au contact avec le gluten, le corps va fabriquer des anticorps qui vont détruire la paroi de son propre intestin et donc être responsable d’un défaut d’absorption des aliments. La grande diversité des aliments qui ne seront pas absorbés fait que le spectre des symptômes de la maladie cœliaque est très large et peut aller d’une simple anémie ou fatigue à des troubles neurologiques ou hémorragiques en fonction des carences.
Cette maladie se manifeste chez des sujets génétiquement prédisposés, le contact avec le gluten n’entraîne cette toxicité que chez ces sujets-là. Elle peut être découverte à n’importe quel âge, de l’âge de la diversification jusqu’à l’âge adulte. Il est important de souligner que cette toxicité apparaît après l’exposition à n’importe quelle quantité aussi infime soit-elle de gluten, par exemple, le seul fait d’utiliser un couvert avec des traces de farine dessus pour manger son repas déclenche les symptômes de la maladie. C’est pour cela que le seul traitement jusqu’à présent de la maladie cœliaque est le régime sans gluten strict. Tout rentre dans l’ordre en général quand le régime est respecté.
Le diagnostic de la maladie cœliaque ne se confirme qu’après la réalisation de plusieurs bilans notamment la fibroscopie et la biopsie de la paroi intestinale, ainsi que la recherche de ces anticorps circulants dans le sang.
La consommation de gluten chez un sujet sain (sans gêne prédisposant à la maladie cœliaque) n’a donc aucun effet toxique quelle que soit la quantité ingérée.
Allergie ou intolérance ou sensibilité ?
L’allergie au gluten est un mécanisme différent, le mécanisme est direct, à l’image d’allergie cutanées ou autres allergies alimentaires, les symptômes apparaissent immédiatement après l’ingestion du gluten. La différence réside aussi dans le fait que la réaction est proportionnelle à la quantité, ce qui n’est pas le cas de la maladie cœliaque vu que même une quantité microscopique est responsable du déclenchement de toute la pathologie.
La sensibilité au gluten par contre, n’est ni une allergie ni une intolérance, il s’agit juste d’un inconfort digestif lié au gluten. Certaines personnes peuvent le remarquer après la consommation de blés ou de pâtes. Une fois la maladie cœliaque écartée, on peut parler d’une sensibilité au gluten chez ces personnes-là, une alimentation moins riche en gluten apportera une amélioration sans pour autant que le régime soit strict.
Comment manger sans gluten ?
Le régime sans gluten consiste en l’élimination totale des blés, orge et seigle et avoine. Les farines qui sont autorisées sont celles à base de maïs ou de riz. Les modes de moulure, les plats et les couverts ne doivent pas non plus être contaminés.
Vu que le gluten est cet ingrédient précieux qui confère aux recettes toutes leur élasticité, cuisiner sans gluten s’avère plus compliqué que d’habitude. Cela nécessite un apprentissage et un peu de créativité.
Manger sans gluten est-il bénéfique pour tout le monde ?
En dehors des cas pathologiques sus cités, le gluten n’a aucun effet toxique et le radier de l’alimentation n’a donc aucun bénéfice selon les études menées à ce jour. Le ‘gluten free’ pour tout le monde n’est pas justifié.
En conclusion, le gluten est un composant non toxique de certains aliments, sauf chez certains sujets porteurs de pathologies. Des symptômes comme un inconfort digestif récurrent, des diarrhées, un amaigrissement, un retard de croissance chez l’enfant, une anémie, doivent pousser à consulter chez un gastroentérologue qui recherchera de façon systématique la maladie cœliaque. Il n’est utile de suivre un régime sans gluten strict que sur ses recommandations. Manger sans gluten au Maroc reste cher vu la non banalisation des produits. Dans ce sens, le travail associatif visant à produire un apprentissage en communauté et une meilleure adhésion au régime est à encourager.
* Hépato-gastroentérologue