La valeur des biens de l’Etat saisis au cours des trois dernières années s’élève à environ dix milliards de dirhams. C’est le ministre de l’économie, des finances et de la réforme administrative, Mohamed Benchaâboun, qui l’a affirmé au sein de l’Hémicycle dans le cadre de sa plaidoirie en faveur de l’article 9 de la loi de finances 2020.
Le ministre n’a pas précisé la nature des jugements exécutés contre l’Etat. Mais des voix au sein du gouvernement et de l’institution législative lui ont répliqué que le gros morceau vient de l’exécution des jugements relatifs aux contentieux portant sur l’expropriation. Sur ce registre, l’Etat procède à une expropriation pour utilité publique, en indemnisant le propriétaire sur la base d’une estimation de la valeur du bien exproprié effectuée par une commission. Généralement, l’indemnisation se fait en deçà des tarifs en vigueur. Ce qui pousse le propriétaire à saisir la justice. Après un parcours de combattant, le verdict tombe, mais son exécution reste en suspens. A qui incombe la responsabilité dans cet état de fait ? La bonne gouvernance doit servir de toile de fond pour mettre en application le principe de corrélation entre responsabilité et reddition des comptes.
Expropriation et responsabilité de l’Etat
La Constitution le souligne et SM le Roi Mohammed VI l’a clairement évoqué au perchoir du parlement à l’occasion de l’ouverture de la première session de la première année législative de la dixième législature. «Le citoyen a le droit de recevoir des réponses à ses requêtes et des solutions aux problèmes qu’il lui expose. L’Administration est tenue d’expliquer les choses aux gens et de motiver ses décisions, qui doivent être prises sur la base de la loi. Ainsi, par exemple, de nombreux citoyens se plaignent des affaires d’expropriation, soit parce que l’Etat ne les a pas indemnisés pour leurs biens, soit parce que l’opération d’indemnisation traine pendant de longues années au préjudice de leurs intérêts, ou encore parce que le montant de l’indemnisation est en deçà des prix de vente en vigueur, et bien d’autres raisons encore. L’expropriation doit être effectuée en cas d’extrême nécessité d’intérêt général et l’indemnisation doit se faire conformément aux tarifs en vigueur à la date d’exécution de ladite opération, avec une simplification des procédures d’obtention de ladite indemnisation. Le statut du terrain exproprié ne devrait pas être modifié par son affectation à des usages commerciaux ou sa cession à des fins de spéculation immobilière. Le citoyen se plaint beaucoup de la lenteur et de la complexité des procédures judiciaires et de la non-exécution des jugements, notamment face à l’Administration. Il est incompréhensible que l’Administration dépossède le citoyen de ses droits alors qu’elle a l’obligation de les préserver et de les défendre. Et comment un responsable peut-il empêcher que celui-là accède à ses droits alors qu’un jugement définitif a été rendu à cet effet ?», avait souligné le souverain.
Dettes contractées auprès des entreprises et non remboursées
SM le Roi était on ne peut plus clair sur cette question. C’est dire que les cas qui poseraient problème aujourd’hui dans ce registre de l’expropriation seraient provoqués par l’Administration et ses circuits. Ce qui renvoie directement au principe de corrélation entre responsabilité et reddition des comptes. Il faut dire que le discours du Roi prononcé au début de cette législature est une véritable feuille de route pour garantir la pertinence et l’efficience de l’Administration. Au sujet des dettes qui pourraient faire également l’objet de jugements définitifs contre l’administration, le souverain s’est interrogé sur ce fait. «Il est tout aussi inconcevable que l’Administration ne rembourse même pas les dettes qu’elle a contractées auprès des petites et moyennes entreprises, alors qu’elle est censée les soutenir et les encourager eu égard à leur rôle important dans le développement et l’emploi», a dit SM le Roi.
B.A