Entretien avec Mohammed Mansouri Idrissi
L’exposition Nationale des Arts Plastiques ayant pour thème ‘’ Mains de Lumière’’, a lieu, du 23 janvier au 29 février 2020 à la Villa des Arts, sous le Patronage de SM le Roi Mohammed VI et avec le soutien du Ministère de la Culture. Celle-ci a connu un grand engouement de la part de tous les amateurs des arts plastiques, les critiques d’art, les journalistes nationaux et d’autres personnalités du monde de la culture en présence de plusieurs artistes peintres, notamment lors du vernissage organisé à cet effet le 23 janvier dernier. Il est à rappeler que lors cette manifestation, le Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels a rendu un grand hommage à la grande artiste peintre Malika Agueznay. A cette occasion, cette dernière a déclaré comme à l’accoutumée que : «Pour moi, l’art est la nourriture de l’esprit, de l’âme. Chaque individu le perçoit selon sa sensibilité et l’émotion qu’il créé en lui, soit bien être ou autres réactions». Interview avec M. Mansouri Idrissi.
Cette exposition a été une réussite pour la promotion des arts plastiques au Maroc, quelle est votre première impression au sujet de cette exposition, et pourquoi avoir choisi comme thème ‘’ Mains de Lumière’’ ?
“Rabat Ville Lumière, Capitale Marocaine de la Culture” est un programme intégré de développement de la ville de Rabat articulé autour de 7 axes principaux et en premier «la valorisation patrimoine culturel et civilisation de la ville».
Ce programme quinquennal (2014-2018) impulsé suite aux Hautes Instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI prévoit la réalisation de nombreux équipements culturels. Il vise à positionner Rabat comme une référence et un modèle à suivre, au niveau national, pour promouvoir et renforcer le rôle de la culture dans la société. Il cherche également à consacrer Rabat en tant que ville verte avec ses espaces verts, ses parcs et ses espaces de distractions et de loisirs.
L’Etat érige ainsi la culture comme base pour toute stratégie de développement viable. Ce programme prévoit des projets (en cours d’achèvement) et qui vont transformer Rabat et la vallée de Bouregreg en pôle culturel d’excellence :
- Le Grand Théâtre de Rabat
- Le Musée National d’Archéologie et des Sciences de la Terre
- La Maison des Arts et de la Culture
- La Bibliothèque des Archives nationales du Royaume du Maroc
- Cinq maisons de la culture à vocation pluridisciplinaire
- Une grande Place Culturelle
Le Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels considère la philosophie de ce programme – qui place la culture et les Arts au cœur de la stratégie de développement – comme un message et un signal très importants. C’est à la fois un honneur pour les acteurs culturels et aussi un appel pour leur mobilisation et responsabilisation. Ils doivent ainsi être à la hauteur de la philosophie de ce projet et accomplir leur rôle.
Le SMAPP souhaite prendre part au rayonnement et à la médiatisation de ce programme, en l’expliquant et en le faisant encore plus connaitre au sein de la communauté des créateurs culturels et auprès des jeunes.
-Pourriez-vous nous dire sur quels critères ou sur quelles références vous vous êtes basé pour le choix des artistes peintres pouvant figurer dans cette exposition nationale 2020 ?
Les arts plastiques qui font aujourd’hui preuve d’une très grande vitalité représentent donc un support de communication très puissant.
A ce titre, il a été proposé d’organiser au cours du premier trimestre 2019 une grande exposition de peinture et d’art contemporain (installation, vidéos, performances,…) sur plusieurs espaces, dont le thème sera « Rabat en Lumière ».
86 artistes plasticiens membres du SMAPP (peintres, sculpteurs, photographes, installationnistes,…) issus de toutes les régions du Royaume, Ont réalisé chacun deux œuvres originale, jamais exposées, sur le thème de la «Lumière».
Les galeries du Ministère de la Culture (Bab Rouah, Bab El Kébir, et Nobl’ys gallery) ont été utilisés.
Après son inauguration à Rabat en avril dernier cette exposition a été présentée successivement à Fès, Tanger et Tétouan. Actuellement a la Villa des Arts de Casablanca ; Elle se déplacera à Marrakech et Laayoune.
Il est à signaler que les artistes présentés détiennent tous la carte professionnelle délivrée par le Ministère de la Culture, après études de leurs dossiers par la commission désignée à cet effet, ce qui garantit leur qualification et leur présence active sur la scène culturelle marocaine et même internationale. , ,… pour faire prendre conscience au public de l’importance du rôle de la culture et des arts dans la nouvelle vision du développement.
Que pouvez nous dire sur l’hommage rendu à l’artiste peintre Malika Agueznay ?
je ne peux pas faire mieux que de reprendre les belles paroles de mon confrère Lahbib M’seffer lors de l’Hommage rendu à l’artiste Malika Agueznay.
«Il m’échoit l’honneur de rendre hommage à l’artiste Malika Agueznay, au nom du Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels. Il est difficile de prendre la parole en public et plus difficile encore de rendre un hommage à un artiste de renom.
Je me suis posé la question de savoir ce qu’est cette expression.
Elle est connue depuis Aristote comme marque d’estime mais elle n’est entrée dans les habitudes et le langage courant que depuis le XIXème siècle pour dire le respect et la reconnaissance à une personne. C’est donc le témoignage de l’admiration, de l’estime et de la reconnaissance pour une personne pour ce qu’elle a réalisé dans son domaine d’activité et pour la place qu’elle tient dans la société.
C’est avec beaucoup d’humilité que je m’adresse à Madame Malika Agueznay. La pression est grande car il y a tant de choses à dire sur cette artiste, lauréate en1970, de l’Ecole des Beaux-Arts de Casablanca.
En 1978 elle participe au Moussem d’Asilah qui se mettait en place, et découvre avec beaucoup d’intérêt la gravure. Depuis elle s’est consacrée à la peinture et à la gravure avec autant de passion et de rigueur.
Au Maroc, elle peut être considérée, comme une des premières femmes peintres de l’abstraction, et l’une des premières à pratiquer la gravure.
Son imaginaire pictural tourne autour du motif des algues qu’elle décline dans la peinture comme dans la gravure et même dans la sculpture, et ce, dans une recherche effrénée et fructueuse. Cette algue mystérieuse se déploie dans toutes sortes de formes et de motifs utilisant même la lettre comme dans la série «Coran».
La gravure est devenue pour Malika Agueznay un laboratoire où l’inspiration et la créativité s’épanouissent au plaisir de l’artiste dans sa rêverie, son émotion et son élévation spirituelle.
Nous sommes en présence d’une femme qui rayonne par son art, par sa personnalité attachante, souriante, discrète et par son insatiable curiosité. Bravo lalla Malika pour ce long parcours laborieux, enrichissant et productif.
Nous vous exprimons notre estime et notre profond respect pour votre dévouement pour l’art en général et pour ce que vous incarnez. L’estime et la reconnaissance publiques, c’est comme un soleil qui brille dans le ciel de la personne pour laquelle on les prononce. Nous vous souhaitons beaucoup de créativité, den santé et longue vie.
Au nom du Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels et des artistes présents, veuillez Mme Malika Agueznay accepter de la main du président du syndicat Mr Mohamed Mansouri Idrissi, en guise de reconnaissance, d’estime et de respect, cette sculpture créée avec cœur et admiration, spécialement pour vous, par notre ami artiste si Mohamed Hafidi. » Janvier 2020
Pouvez nous parler en quelques lignes sur le rôle du Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels …
Le champ des arts plastiques connaît aujourd’hui une dynamique très importante tant au niveau de la créativité que de la multiplication des événements liés au domaine. Nous sommes, aussi, convaincus que les arts plastiques jouent un rôle important dans la dynamique socio culturelle nationale . Mais, malgré des réalisations importantes, notamment au niveau des infrastructures, les conditions favorables ne sont pas encore réunies pour que ce champ puisse contribuer efficacement au rayonnement culturel et artistique au niveau national et international
L’objectif du Syndicat Marocain des Artistes Plasticiens Professionnels est d’engager une réflexion et un débat profond – pas seulement académique mais aussi avec des retombées pratiques – afin d’aboutir à des avancées notables en faveur de ce domaine. Nous tenons à ce que la réflexion associe-en plus des artistes, des universitaires, des experts, des critiques d’art et des journalistes culturels – tous les intervenants publics et privés du secteur, y compris les galeristes et les professionnels de l’art.
Il s’agit de définir une restructuration de l’environnement des arts plastiques sur les plans de la formation et du cadre juridique englobant les droits sociaux, les droits d’auteur et les droits de suite. Nous travaillons également sur la question de l’identité et des particularités culturelles dans la création plastique. La question du marché et de la commercialisation est également discutée.
Quel est, en effet, votre cri de cœur, notamment en ce qui concerne la promotion des arts plastiques au Maroc ?
Notre militantisme se déroule donc dans un contexte culturel et socio-économique mondialisé et s’organise dans le cadre des violentes congestions qui secouent la réalité d’un monde arabe croupissant. Un monde au mouvement socio-politique instable, aux interdépendances et engrenages sans limite. Une situation en somme qui accroit chez l’artiste son sens de la responsabilité vis-à-vis du corps de sa patrie et de sa société en tant qu’organe agissant. Une responsabilité historique faisant de lui un des membres d’une intelligentsia appelée à prendre le pouls de sa société dans son aspiration à la liberté et la réalisation de la justice et de la dignité. Cette responsabilité lui recommande de veiller à s’écarter de toute violence et de tout extrémisme et à s’interdire toute sorte de dogmatisme extrémiste et destructeur. Aussi préservera-t-elle la stabilité et la paix sociales entre l’individu, les communautés et leurs institutions. Avec toutes nos espérances qu’ambitionne notre syndicat s’inspirera de ce sens de la citoyenneté responsable vis-à-vis de soi et de l’autre.
Entretien réalisé par Abdeslam Khatib