Carlos Ghosn: Prolongement de la garde à vue

Inculpé récemment pour dissimulation de revenus durant une période de cinq ans, la garde à vue de Carlons Ghosn a été prolongée récemment sur de nouvelles accusations. Un mois après son arrestation, le patron le mieux payé du CAC 40 séjourne toujours dans une prison à Tokyo, avec la perspective de rester en prison jusqu’à fin décembre voire bien au-delà!

Représentant une étape importante dans un parcours judiciaire qui s’annonce long: le bureau des procureurs lui a notifié sa mise en examen pour avoir omis de déclarer aux autorités boursières environ 5 milliards de yens (38 millions d’euros) de revenus sur cinq années, de 2010 à 2015. Son bras droit Greg Kelly, arrêté en même temps que lui, a aussi été inculpé. La garde à vue des deux hommes a en outre été prolongée sur de nouveaux soupçons de minoration de ses émoluments, cette fois entre 2015 et 2018, pour un montant de 4 milliards de yens (31,1 millions d’euros). Elle peut durer 22 jours à partir de lundi.

La marque nipponne est également poursuivi en tant qu’entité morale, le parquet jugeant que la responsabilité de l’entreprise était aussi engagée car c’est elle qui a remis les rapports incriminés aux autorités boursières. Nissan a fait part de « ses regrets les plus sincères » dans un communiqué, reconnaissant que l’affaire « nuisait fortement à l’intégrité de sa communication auprès des marchés ». « Nissan va continuer ses efforts pour renforcer sa gouvernance », ajoute le groupe, par ailleurs fragilisé par un scandale lié à l’inspection de ses véhicules.

Le patron d’origine libanaise, prestement limogé de la présidence de Nissan et de Mitsubishi Motors, n’est lui pas au bout de ses peines: le parquet pourrait ultérieurement se pencher sur de possibles abus de biens sociaux, tels que l’usage de résidences de luxe aux frais du groupe. Dans cette affaire, les rumeurs, spéculations, scénarios sont nombreux, et la parole officielle rare, si ce n’est, au tout début, celle du patron exécutif de Nissan, Hiroto Saikawa, qui a d’emblée lâché son ancien mentor.

Etat d’esprit vaillant et combatif!

Le tribunal de Tokyo a pour l’instant communiqué a minima et la défense de Carlos Ghosn, menée par Motonari Ohtsuru, un ex-procureur spécialiste des grandes affaires financières, ne s’est pas publiquement exprimée. Tout juste sait-on que « le suspect Ghosn », comme l’a rebaptisé la presse nippone, nie toute malversation. « Il est dans un état d’esprit vaillant et combatif », souffle-t-on au siège de Renault, à Boulogne-Billancourt près de Paris.

Ghosn affirme qu’il est bien traité. Il a reçu la visite des ambassadeurs de France, du Liban et du consul du Brésil, et s’occupe à lire livres et magazines quand il n’est pas interrogé par les enquêteurs. Contactés par l’AFP, le constructeur, tout comme son premier actionnaire l’Etat français, se sont abstenus de tout commentaire après l’annonce de la mise en examen. Selon une source proche de l’entreprise, un conseil d’administration est prévu jeudi, une réunion ordinaire planifiée avant le début de l’affaire Ghosn, lors de laquelle aucune décision particulière n’est attendue.
Au cours des auditions, M. Ghosn aurait reconnu avoir signé des documents mentionnant des paiements qu’il était censé percevoir au moment de quitter le groupe mais il assure, selon la presse, que ces montants n’étaient pas définitivement établis et n’avaient donc pas à être inclus dans les rapports publics de Nissan. D’après une source proche des investigations, ce système a démarré après l’entrée en vigueur d’une loi imposant aux administrateurs les mieux payés de divulguer leurs rémunérations. Le but de M. Ghosn aurait été d’éviter les critiques des actionnaires et employés.

Le constructeur nippon a par ailleurs annoncé avoir fait appel d’une décision de la justice brésilienne autorisant la famille de Carlos Ghosn à accéder à un appartement de fonction à Rio de Janeiro, « afin d’empêcher la destruction de preuves éventuelles ». L’affaire laissera des traces dans l’alliance Renault-Nissan née en 1999 et devenue, avec l’apport de Mitsubishi Motors en 2016, le premier ensemble automobile mondial.

Badr Atabi

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