Activités parallèles du FIFFS
Présentation et signature du livre de Mohamed Lotfi M’rini
Mohamed Nait Youssef
Parler de la Culture est un exercice indispensable, notamment en ces temps de reprise des activités. En effet, c’est dans le cadre des activités parallèles du Festival International du Film de Femmes de Salé (FIFFS) que la présentation et signature du livre «Culture et développement, Repères pour une politique culturelle» de Mohamed Lotfi M’rini, acteur culturel, universitaire, président de la Fondation de Salé pour la Culture et les Arts, ex-SG du ministère de la Culture, a eu lieu mercredi 10 novembre 2021, en présence des personnalités des mondes du cinéma, de la culture et des arts. Ce livre est dormais une référence incontournable et un éclairage sur un secteur culturel important vivant depuis des années contre vents et marées.
Lotfi M’rini: un éclairage sur les questions profondes de la politique culturelle
«Dans ce livre, j’ai essayé de traiter toutes les questions de la politique culturelle dont personne ne s’occupe ni le ministère de la Culture ni le gouvernement, et qui sont au fond de la stratégie culturelle qui n’existe pas. », affirme l’auteur de l’ouvrage «Culture et développement, Repères pour une politique culturelle».
D’après ses dires, il y a des ministres qui venaient au ministère, mais ils n’avaient aucune idée de ce qu’est la culture, encore moins des politiques culturelles. «Il y avait ce vide énorme en rapport avec ces questions qui sont fondamentales : celle des financements, la question du territoire, du rôle du privé, de la diplomatie culturelle, de l’importance de la culture dans le PIB et la question de la culture en tant que valeur… ces questions ne sont pas finalement traitées alors que la Constitution est très en avance. », a-t-il souligné.
Pour Lotfi M’rini, ces lacunes et problèmes profonds sont des anomalies et des contradictions qui interpellent une personne normale qui produit du sens. «Je voulais donner un éclairage sur à quoi on devrait s’intéresser et qui devrait être au cœur du ministère ou de la Culture. », a-t-il fait savoir.
Mekki Zouaoui : «un livre incontournable, nuancé et analytique »
«J’ai eu un plaisir en lisant cet ouvrage avec un style agréable, simple et fluide. C’est un livre extrêmement instructif parce qu’il y a un enrichissement conceptuel et factuel. On en sort un peu plus intelligent à la fin de la lecture. », a précisé Mekki Zouaoui, économiste et militant engagé dans le développement culturel, lors de son intervention.
Pour lui, ce livre est captivant dans le sens où quand on commence à le lire, on ne s’arrête pas parce qu’il y a un récit qui est bien construit et on a envie d’aller jusqu’au bout. Les chapitres du livre sont quasi-autonomes et les axes sont variés pour rapprocher la culture. «C’est un ouvrage que j’ai trouvé plus qu’intéressant parce qu’il est nuancé et analytique.», a-t-il expliqué.
Dans cette publication, explique l’économiste, il y a beaucoup plus d’analyses universitaires que celles du militant engagé bien qu’il n’y a aucune concession par rapport aux idées et aux convictions de l’auteur.
«C’est un ouvrage que j’ai trouvé convaincant dans ses constats, dans ses jugements et ses propositions au point qu’il est très difficile de ne pas y adhérer. Il est aussi intéressant parce qu’il est réflexif, il questionne, il examine la pertinence des concepts et des approches avec des pistes et des adaptations adaptées au Maroc.», a-t-il fait savoir.
Dans l’ouvrage toujours, poursuit-il, il y a aussi un va et vient constant entre le conceptuel et le factuel et va et vient entre les théories, la pensée et les données chiffrées avec une large place accordée aux travaux empiriques et aux données factuelles. Sans oublier la comparaison constante internationale, car à chaque fois on trouve des statistiques pertinentes où le Maroc figure dans le classement international. « C’est un livre incontournable, synthétisé, dont les chapitres sont assez parlants.», a-t-il indiqué.
Mohamed Chouika : «il y a un fossé entre l’intellectuel et le politique»
Mohamed Chouika, professeur de philosophie et critique de cinéma, a évoqué quant à lui la question de la Culture au Maroc. Ce livre, dit-il, est un fruit à la fois d’une expertise et d’une méthodologie. Par ailleurs, Chouika a classé ce livre de 281 pages dans le cadre de la sociologie culturelle. «L’auteur a choisi en effet des définitions de la Culture, sans oublier la société marocaine qui a une particularité et des cultures diverses.», a-t-il précisé.
L’intervenant a mis en outre l’accent sur la nécessité de sortir d’une société non lectrice et qui ne croit pas à la dynamique de la culture à une société qui accepte et investit la culture. Or, il a mis l’accent sur ce fossé existant sur l’intelligentsia culturelle et l’élite politique.
«J’espère que ce livre aura un rayonnement dans le paysage culturel national. Car la culture est timidement présente dans les programmes des partis politiques et des gouvernements.», a-t-il rappelé. Toutefois, le livre a traité également les questions de la culture et de l’identité, de la place de celle-ci dans le développement culturel et la liberté d’expression.
Selon Mohamed Chouika, Corona a fragilisé ce secteur parce que la stratégie du financement n’est pas assez claire. «Il faut revoir la question du soutien à la culture parce qu’il y a un recul au niveau de la créativité, du traitement des questions et du sens qui sont devenus parfois superficiels.»
En revanche, il a mis le doigt sur l’importance de la culture dans les milieux ruraux non seulement mais aussi dans les grandes villes. «Nous espérons passer de Brouillon de Culture à une feuille de route concrète et un plan d’urgence de la culture afin de la lier au développement. », conclut-il.
Fatima Ait Mhand : «L a culture est modestement pris en compte dans les politiques culturelles »
Fatima Ait Mhand, spécialiste en patrimoine et modératrice de la rencontre, estime que le secteur culturel est mal présenté dans les politiques publiques.
«En lisant ce livre, j’ai constaté que la culture se construit, se dit et se réinvente dans une pluralité de pratiques sociales qui font partie de la culture.», a-t-elle souligné. L’auteur, a-t-elle expliqué, a eu la chance de confronter les deux cultures ; marocaine et canadienne qui lui ont permis d’avoir une vision plus large. «Le secteur culturel est mal défini et modestement pris en compte dans les politiques culturelles marocaines. », a-t-elle rappelé. Et d’ajouter: «à chaque changement de gouvernement, on passe à une autre modalité de gestion. La preuve ? Certains projets sont tombés dans les oubliettes ou restés aux salles de brouillon comme la culture. Ces chantiers qui avaient pour objectif d’asseoir les bases de l’articulation et de l’évaluation de toute politique de la culture, entre autres, la mise en place d’un système national des statistiques culturelles, les projets structurants des industries culturelles et créatives, la gestion déléguée du patrimoine avec un cahier des charges.»