Ouf ! Oui, enfin on peut souffler avec l’ultime épisode du sinistre feuilleton qui nous a été imposé cet été, celui de l’achat de Neymar par le Qatar et son arrivée au club parisien du PSG. Un feuilleton à l’image de ce monde en perdition, avec un personnage central qui porte le maillot d’anti-héros de la mondialisation financière et marchande achevant par son parcours une certaine idée du football.
Depuis que je suis devenu un lecteur fidèle du Cheikh Moulana Ibnou Arabi, la vie est pour moi un champ de signes qui nous parlent. Des indices, «icharat», qui nous aident à comprendre le cheminement de la vie vers son ultime destin. Je comprends ainsi que le départ de Dolmy, l‘incarnation d’un football populaire et sobre est le signe du triomphe d’un autre football, cupide et inhumain. C’est la mort dans l’âme que je me rends à cette évidence : le football n’est plus qu’un opium populaire, un exutoire des pulsions les plus pathologiques, un moteur du capitalisme sauvage. Je suis un fan du Barça du depuis ma plus tendre enfance ; aujourd’hui j’ai envie de dire «nous sommes tous catalans» et de rejoindre ceux qui lancent à la figure de l’ex-prodige brésilien : «encaisse ton fric et va-t’en à jamais…Hastanunca !».
Oui, Neymar est parti pour de l’argent, seulement pour de l’argent. Dans ce sens, il est le pur produit des temps modernes. Il ne s’agit pas d’un transfert sportif mais d’une grosse transaction mercantile doublée d’une opération de marketing politique. Une transaction issue de la convergence diabolique entre les intérêts financiers d’un clan mené par le père de Neymar et de l’argent du Qatar. Neymar n’a pas été recruté par un club, comme le rappelle un journal espagnol, mais par un Etat, une dictature pointée du doigt par sesvoisins et par des organismes internationaux comme l’un des bailleurs de fonds des groupes fanatiques et qui ne sait plus quoi faire de son argent, achetant tout et transformant les personnes en marchandises.
Dolmy-Neymar : quel édifiant champ-contre-champ ! Il faut pleurer deux fois plutôt qu’une la mort de Dolmy car c’est la mort du football. Ce football des origines qui a vu le jour dans des villes minières et qui a été porté par des banlieues populaires. Le football de masse incarné entre autres par le mythique Socrates du Brésil d’avant qui avait incarné avec le club Democratia Crinthiana de Sao Paulo la lutte contre la dictature militaire. Désormais c’est un autre football incarné par Neymar et les autres stars du business qui s’installe aux antipodes des valeurs qui l’ont vu naître et devenir planétaire. Il est devenu vecteur des pratiques et des imaginaires les plus rétrogrades. Son économie a été absorbée par un capitalisme débridée, spéculatif et financiarisé. Il n’est plus étonnant que le sport-roi soit devenu le théâtre de dérives mafieuses qui trouvent leur écho au sein même des instances dirigeantes de la FIFA, l’organisation qui peine encore à purger l’héritage de l’ère Blatter.