Hommage à un voyageur créateur

geste extrême», s’inscrit dans le cadre d’une deuxième exposition organisée par Bank Al-Maghrib mettant à l’honneur cette étoile de la peinture marocaine moderne.

Un hommage, indiquent les initiateurs, commémorant le dixième anniversaire de sa disparition. En effet, cet ouvrage  qui ressemble l’ensemble des travaux de l’artiste a été réalisé par des spécialistes et experts en la matière. Kacimi, cet autodidacte et grand voyageur a côtoyé des artistes et des poètes qui ont enrichi son parcours d’artiste peintre.  Son voyage vers l’autre  et sa quête de soin, sa soif de liberté et de la découverte des nouveaux horizons de création a donné une richesse remarquable à ses travaux. Par ailleurs, sa rencontre avec l’écrivain de la mémoire tatouée et sociologue Abdelkébir Khatibi a donné un souffle à l’altérité et une ouverture sur le corps et l’Autre dans sa différence culturelle et civilisationelle. L’œuvre de Kacimi est universelle, car  elle embrasse les autres cultures. La richesse de son œuvre est un fruit d’une recherche partisante dans l’authenticité et l’originalité de l’être et le monde. Ipso facto, elle est ouverte et invite son contemplant à poser des questions et reconstruire son être. L’artiste puise ses signes et sens dans son errance, nomadisme et quête de soi dans les dédales du monde. En outre, il a su comment tracer son cheminement d’artiste et laisser une trace originelle aux générations qui viennent. Kacimi a donné le sang de verve à la couleur. Il a créé un univers artistique qui s’invite, nous invite à le relire, le méditer, à l’interroger pour dénicher d’autres lectures et déguster sa peinture. Son expérience picturale est une invitation à la rencontre de son âme, ses émotions, sa vie, son imagination créatrice  ainsi que sa vision du monde. Réalisé par Bank Al-Maghrib sous la direction d’une pléiade d’experts, cet ouvrage présente des travaux inédits de cette figure de proue de l’art moderne marocain.

***

Brahim Alaoui, Historien de l’art et  directeur d’Artmus

Mohammed Kacimi ou la soif de liberté

Al Bayane : Dans votre intervention vous avez cité la notion  du voyage, l’errance ainsi que les rencontres qui ont marqué les travaux de Mohamed Kacimi et son parcours d’artiste. Quelle lecture faites-vous de cette figure emblématique de la peinture marocaine ?

Brahim Alaoui : L’œuvre de Kacimi est multiple et varie selon différentes périodes qui donnent chacune un panorama sur ce qu’il a vécu. Je trouve que la préoccupation principale chez l’artiste, c’est l’être humain dans sa diversité et, à travers cette énergie, cette soif de liberté, cette volonté de s’épanouir et de sortir du cadre d’ailleurs. L’être humain, à la fin de sa vie, a dominé la toile, était  au centre et allait au-delà  du conteur du tableau. Donc cette préoccupation principale c’est l’énergie, l’être humain  et la soif de liberté de l’être humain.

Quelle est la particularité des œuvres de Kacimi ?

A vrai dire, c’est cette soif de liberté. On voit dans toutes  ses ouvres cette volonté de sortir du cadre,  de déplacer les choses et de les reconsidérer, se re-poser tout le temps et en permanence la question que rien n’est fini, que l’œuvre n’est jamais achevée. Donc un recommencement qui pose en permanence des interrogations, voilà en résumé ce qu’on peut retenir de l’œuvre de Mohamed Kacimi.

Qu’en est-il de l’enseignement de son œuvre et son expérience picturale dans les universités et les écoles des Beaux arts au Maroc ?

Tant qu’on n’a pas des lieux de présentation  des œuvres d’art tout enseignement en ce domaine reste incomplet. Ces lieux sont une occasion unique pour revaloriser Kacimi, parce que son œuvre a subi une sorte de mise à l’écart pendant une décennie et aujourd’hui on a l’occasion de résoudre ce problème d’héritage  et renouer à l’œuvre de Kacimi. Son œuvre  a été faite pour être vue, pour être exposée et n’est pas faite pour être enfermée. C’est pour cela qu’elle mérite un lieu. Je pense que la peinture doit revenir au peuple et aux citoyens qui peuvent la relire et renouer avec le message de Kacimi.

Quel regard portez-vous sur l’art contemporain marocain aujourd’hui ?

L’art contemporain marocain est aussi divers, varié et riche. Il se remet en question, il se renouvelle. Il y a une nouvelle génération. Donc je dirais que ce qui manque aux artistes marocains c’est l’encadrement, c’est l’enseignement, c’est le lieu de l’exposition des œuvres d’art, c’est le lieu de rencontre du public avec  les artistes. Or le Maroc est un pays riche  aussi bien par ses créateurs, mais pauvre par les infrastructures qui leur permettent de dialoguer avec la population, avec la société.

Top