Entretien avec Remy Sietchiping, Responsable du programme de politique publique, législation et gouvernance au siège d’ONU Habitat, à Nairobi (Kenya)
Propos recueillis par NES à Benguerir, Karim Ben Amar
C’est dans le cadre de la 4ème édition de la « Semaine de la Science » organisée par l’UM6P au sein de son campus de Benguerir, que l’équipe d’Al Bayane a rencontré Remy Sietchiping, responsable du programme de politique publique, de la législation et de la gouvernance au siège d’ONU-Habitat à Nairobi, Kenya. La participant au panel « Transitions urbaines » a répondu à nos questions portant sur le lien entre le développement durable et l’urbanisme, mais aussi sur la transition urbaine au Royaume.
Al Bayane : Quelle est votre contribution dans le cadre de la 4ème édition de la « Semaine de la Science » en général, et dans ce panel (sols et transitions) en particulier ?
Remy Sietchiping : En ce qui concerne ma contribution à la Semaine de la Science, sur une question qui est d’actualité en termes de transitions qui sont en train de se passer, et dans le contexte de L’Urbanisation ou de la transition dans l’espace urbain, il y a certainement beaucoup de défis ou d’opportunités. Ces opportunités an Afrique sont utilisées jusqu’à un certain degré, que ce soit la capacité de la jeunesse africaine de prendre les initiatives et d’oser et croire en elle. Deuxièmement, je pense à la nature qui reste assez généreuse pour l’Afrique. Comment est-ce que nos ressources du sous-sol, du sol, du ciel, que ce soit le soleil, la pluie, peuvent être utilisées, optimisées pour une meilleure gestion, meilleure planification urbaine, meilleure transition des changements dans l’espace urbain pour mieux servir l’Afrique.
Donc il n’y a pas mal d’opportunités, et je continue à le dire, quand on aura plus confiance en soi d’utiliser, de réaliser autant, on va certainement prendre un bond en avant pour la transition dans l’espace en s’appuyant aussi sur les nouvelles technologies de l’information qu’on a sous la main.
Quid du développement durable et l’urbanisme ? Sont-ils liés ?
Dans les objectifs de développement durable, l’objectif 11, par exemple, traite essentiellement de l’urbanisme. Ça veut dire que cette question urbaine et aussi rurale qui est traitée dans le même objectif, fait partie des objectifs de développement durable (ODD). Un des objectifs parle effectivement des questions urbaines, c’est-à-dire des questions de bidonvilles, des questions de logements, d’accès à l’eau, d’infrastructures et des services de base au niveau de l’espace urbain, de la connexion entre ville et son territoire. On peut donc dire que l’urbanisation, l’espace urbain est un élément fondamental pour accompagner la mise en œuvre des ODD dans beaucoup de pays. Et nous pensons, c’est pour ça que le nouveau programme pour les villes qui a été adopté en 2016, juste après les ODD, a été aussi conçu et adopté par les États membres comme un instrument de mise en œuvre des ODD. Donc on sait qu’avec l’urbanisation qui fait partie de cette transition. Si on regarde la démographie, elle est beaucoup plus urbaine maintenant que rurale. Donc cette problématique est assez importante. Et beaucoup de transformations, de changements se passent dans l’espace urbain. Et ça devient un territoire assez intéressant pour accompagner ou, mettre en œuvre ou bien exécuter les ODD.
Il y a des analyses qui ont été faites qui montrent que les ODD ne peuvent pas être réussies si les considérations urbaines ne sont pas mises en priorité. Donc elles sont intimement liées et on ne peut pas parler vraiment des ODD sans traiter sérieusement les questions urbaines et les questions de développement durable.
En tant qu’expert onusien, comment voyez-vous la transition urbaine au Maroc ?
Sans prétendre être spécialiste ou connaître toutes les transitions qui se passent au Maroc, pour le peu que j’ai vu, je peux, peut-être mentionner deux ou trois transitions qui ont attiré mon attention. Le premier facteur qui est assez marquant dans l’esprit de beaucoup de pays africains, de nouveaux habitats, c’est comment le Maroc a pu faire une transition réussie en termes de résorption des bidonvilles, des quartiers précaires et ainsi de suite. Ça, c’est un cas réussi au monde et qui, en Afrique, est le seul pays qui a pu le faire. Donc, en termes de transition urbaine, le Maroc figure là en tête de proue. Un exemple que les autres peuvent essayer de s’inspirer, d’émuler. Le deuxième aspect, c’est comment est-ce que la transition urbaine au Maroc est intrinsèquement liée à d’autres transitions ? Par exemple, les investissements ou bien le support en termes d’activités culturelles, sportives ainsi de suite. Pouvoir accueillir les jeux de différentes natures de sport avec des visiteurs qui viennent et aident à la transition urbaine. Cela permet de construire, de reconstruire les espaces urbains, de mettre des infrastructures de connexion entre les villes, de créer des services ou bien des infrastructures à usage et dominance urbaine. Le troisième aspect, toujours dans l’espace urbain qui est notable, c’est comment est-ce que les efforts sont marqués pour approprier la culture architecturale dans le développement des espaces urbains ? On voit des efforts comme dans ce campus où la signature culturel, identitaire du Maroc est là pour marquer comment est-ce qu’on se projette pour ceux qui le visitent, les enseignants, les étudiants. Comment est-ce qu’on peut faire en pensant, en croyant en soi-même ? Donc, en termes de transition démographique, de transition urbaine, il y a des éléments qui encouragent, qui posent des jalons et qui sont encourageants à avoir dans le cas du Maroc.
C’est un exemple peut-être aussi à suivre pour le reste de notre cher continent ?
Oui, bien sûr que cela inspire. Pendant la conférence, j’ai rencontré d’autres participants qui venaient d’autres pays. Ils n’avaient jamais imaginé voir ce genre de transformation. Quand je venais à Benguérir il y a quelques années, la ville ne ressemblait pas à ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Elle a subi une réelle transformation ou plutôt une transition urbaine. C’est un laboratoire que l’OCP , et l’Institution a dit que c’est possible, qu’on peut faire une transition comme celle de Benguerir, que ça peut être une ville verte et on relève désormais que c’est possible. C’est une ville qui peut être autosuffisante en termes d’énergie, d’utilisation de l’eau et ainsi de suite. C’est un exemple parlant. Et de plus en plus, je vois dans les enseignements qu’il y a un accent assez fort qui est mis dans la pratique, que les étudiants ne se focalisent pas seulement sur la théorie, mais qui mettent ensemble en pratique ces enseignements-là et dans un territoire comme celui-ci. Donc, il y a toutes les raisons d’être satisfait, heureux et de voir qu’il y a une pensée, qu’il y a une philosophie derrière qui essaie d’ancrer cette transformation, cette transition urbanistique dans un territoire comme celui-ci.