Le Soudan serait-il au bord de la guerre civile?

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

Alors que, comme l’affirme l’émissaire américain pour le Soudan, Tom Perriello, la guerre qui oppose, depuis un peu plus d’une année, l’armée régulière soudanaise du général Abdelfattah Al-Burhane, le leader de la junte militaire au pouvoir depuis le coup d’Etat du 25 Octobre 2021, aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), du général Mohamed Hamdane Daglo, a déjà fait quelques 150.000 morts, les violents combats qui ont éclaté le 15 Avril dernier font craindre un enfoncement du pays dans la guerre civile.

Pour rappel, après avoir fait front commun lors du coup d’Etat qui, en Octobre 2021, avait évincé les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute du général Omar el-Béchir, deux années auparavant, les deux généraux sus nommés et leurs « soldats » ont vite fait de s’opposer, par les armes, sur la conduite des affaires du pays si bien que les deux camps ont fini par être accusés de crimes de guerre après avoir bombardé, sans discernement, des zones résidentielles, bloqué l’acheminement de l’aide alimentaire et s’être livrés à des pillages.

C’est à ce titre qu’après avoir été accusés, par les militants pro-démocratie, d’avoir mené, ce mercredi, une sanglante attaque contre le village de « Wad al-Noura », dans l’Etat d’Al-Jazirah, au centre du Soudan, qui s’était soldée par la mort d’une centaine de personnes dont, au moins 35 enfants, les paramilitaires du général Daglo, accusés de pillages et de violences sexuelles et ethniques, ont été condamnés, ce vendredi, par Washington, d’après un communiqué du département d’Etat, pour avoir perpétré un « horrible » massacre « contre des civils sans armes » et doivent, en conséquence, « rendre des comptes ».

En se rendant, la veille, au chevet des blessés, le chef de l’armée régulière soudanaise, le général Abdelfattah Al-Bourhane a publié un communiqué dans lequel il promet de « répliquer durement [aux] crimes » des paramilitaires du général Daglo et, en lui emboitant le pas, Catherine Russel, la directrice exécutive de l’UNICEF a déclaré que « les attaques sur les civils et sur les infrastructures civiles sont inacceptables » car, d’après les agences de l’ONU, sur les 48 millions d’habitants qu’abritait le pays avant la guerre, près de 18 millions souffrent, aujourd’hui, de la faim alors que 3,6 millions d’enfants sont, désormais, victimes d’une malnutrition aigüe.

« Les images qui nous parviennent de Wad al-Noura  nous brisent le cœur » a déclaré, jeudi, sur « X » (ex-Twitter), Clémentine Nkweta-Salami, la coordinatrice humanitaire de l’ONU au Soudan, à propos de celles qui ont été publiés sur les réseaux sociaux et qui montrent une rangée de linceuls blancs disposés sur un terrain, avant d’ajouter que « la tragédie humaine est devenue une caractéristique de la vie au Soudan, (que) les combats et l’usage d’armes explosives dans des zones densément peuplées doivent être évités à tout prix (et que) les civils ne doivent jamais être des cibles ».

Le même jour, Stéphane Dujarric, le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, a déclaré, dans un communiqué, qu’Antonio Guterres « condamne fermement l’attaque qui aurait été menée par les Forces de soutien rapide (FSR) contre le village de Wad al-Noura et qui aurait fait plus de 100 morts » et appelé les parties au conflit à s’abstenir de toute attaque contre les civils.

S’il est vrai que tous les « ingrédients » qui permettraient d’enfoncer le Soudan dans les affres d’une nouvelle guerre civile sont déjà là, attendons pour voir…

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