Les limites du partenariat public-privé

La volonté de généraliser les partenariats public-privé (PPP) à tous les domaines gérés jusque-là par le secteur public ne fait pas que des heureux.

Pour certains, le recours massif au PPP signifierait un désengagement de l’Etat. D’autres y voient le risque de la mainmise du secteur privé sur l’action publique. Cette crainte est accentuée par les risques que présente ce partenariat, particulièrement en matière de gouvernance. Le rapport sur «les questions d’économie marocaine 2015-2016», présenté récemment à Rabat, revient sur les inconvénients du PPP. Ce document comporte des contributions de plusieurs économistes dont Abdelaziz Senhaji, auteur du focus sur les PPP.

L’auteur estime que l’évaluation préalable, qui est le point de départ du partenariat, est souvent biaisée. Il explique que cet exercice porte souvent sur les aspects avantageux du partenariat et les points faibles des autres modes de la commande publique. D’ailleurs, l’entité chargée au département des finances de l’appréciation des projets de PPP présentés par les administrations et les organismes publics est elle-même chargée de promouvoir le recours à cette formule, ce qui atténue son objectivité.

Pour Abdelaziz Senhaji, l’évaluation doit être mené avec objectivité par des agents compétents et à l’aide d’outils scientifiques, particulièrement le calcul économique. Surtout que l’évaluation préalable est une démarche essentielle pour  apprécier l’opportunité d’un tel partenariat. Elle permet de  vérifier si le projet ne peut être réalisé que si l’Etat fait appel au privé.

Car, comme le souligne Senhaji, l’adoption du PPP ne devrait s’effectuer qu’en cas d’insuffisance des autres modes de commande publique. C’est pourquoi le contrat PPP est précédé d’une évaluation préalable démontrant son avantage par rapport aux modes alternatifs de la commande publique.

L’économiste revient également sur les risques liés au montage financier. Le prestataire soumissionnaire est souvent incité à élaborer des montages financiers très risqués pour emprunter l’adjudication. Or, «ces montages à très fort effet de levier contribuent à réduire la marge de sécurité entre les flux de revenus et le service de la dette et donc à accroitre le risque de défaillance en cas de réalisation d’un aéla d’exploitation».

De plus, explique Abdelaziz Senhaji, le coût des projets réalisés en partenariat serait plus élevé que s’ils étaient réalisés en régie. En effet, la prime de risque demandée à une entreprise par les bailleurs de fonds (banque ou marché de capitaux) est plus élevée que celle appliquée à un emprunt public émis par un Etat solvable.

La longétivité du contrat pose d’autres défis. Selon Senhaji, ces contrats à long terme sont inévitablement exposés à des évènements non prévus par les parties. Il convient toutefois de rappeler que la loi 86-12 fait mention de conditions de modification du contrat. Mais pour cet économiste, il aurait mieux valu parler de conditions de révision de clauses de contrat. Autrement dit, la modification uniquement des dispositions posant problème et non du contrat en entier.

Hajar Benezha

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