L’investissement nécassaire au service de l’émergence

Enrayer le chômage, favoriser l’inclusion sociale, encourager la participation politique et produire des talents qui puissent porter haut le drapeau national dans les manifestations sportives et culturelles…Autant de défis qui s’imposent à notre société dans son périple vers l’émergence+ et qui ne peuvent trouver une réponse efficace que par l’investissement massif dans l’amélioration de l’éducation et de la formation. Preuve en est que Sa Majesté le Roi Mohammed VI, dans son discours adressé aux participants au 29e sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba le 3 juillet dernier, a mis l’accent sur le rôle indispensable des jeunes pour construire l’Afrique de demain, en désignant le triptyque «éducation, enseignement supérieur et formation professionnelle» comme l’investissement nécessaire à opérer pour enrayer le chômage et participer à l’émergence efficace du continent.

Une vision 2015-2030 pour un système éducatif plus performant

Etant au cœur de tout projet de société voué à porter ses fruits, l’école marocaine est appelée à se renforcer. Certes, le système éducatif a réalisé des acquis qu’il y a lieu de capitaliser et de faire évoluer. D’ailleurs, les récentes statistiques du Haut-Commissariat au Plan, présentées le 12 août 2017, démontrent que les jeunes sont moins exposés à l’analphabétisme, avec toutefois des disparités selon le sexe et le milieu de résidence. Par exemple, le taux d’analphabétisme des jeunes a atteint 11,0% en 2014, contre 32,2% en pour l’ensemble de la population. La même année, 10,1% des jeunes de 15-24 ans n’avaient aucun niveau d’instruction, contre 28,8% en 2004, ce qui représente une évolution indéniable dans la marche vers l’éradication de l’analphabétisme, chose qui ne peut se concrétiser du jour au lendemain.

Parmi les avancées réalisées depuis une décennie, on peut mentionner l’actualisation du cadre juridique et institutionnel, les progrès réalisés au niveau de la généralisation de la scolarisation et la mise en place des structures institutionnelles d’une gouvernance décentralisée, ce qui a abouti à une autonomie relative des universités et au développement des académies régionales. On peut retenir également la révision des curricula et des programmes scolaires, la restructuration pédagogique de l’enseignement supérieur, l’intégration de l’enseignement de la langue et de la culture amazighe, la réorganisation des filières et l’élargissement progressif des capacités d’accueil de la formation professionnelle, ainsi que l’amorce de la réhabilitation de l’enseignement traditionnel.

Il n’en demeure pas moins qu’en dépit de l’importance manifeste de tels acquis, l’École marocaine souffre encore de dysfonctionnements chroniques relevés dans le rapport établi par l’Instance Nationale d’Evaluation à propos de «la mise en œuvre de la Charte Nationale d’éducation, de formation et de recherche scientifique 2000 – 2013 : les acquis, les déficits et les défis». Ainsi, les limites du rendement interne de l’école se manifestent essentiellement par la faible maîtrise des langues, des connaissances, des compétences et des valeurs.

Egalement, on note l’efficacité restreinte des performances des acteurs pédagogiques, les lacunes de la formation initiale et continue, la persistance des déperditions qui affectent aussi bien les systèmes scolaire et universitaire que la formation professionnelle, l’accès limité à l’apprentissage par le biais des technologies éducatives, le faible rendement de la recherche scientifique, les hésitations dans le traitement des problématiques transversales, notamment la question de l’apprentissage des langues et des langues d’enseignement. De plus, la faiblesse du rendement externe qui apparaît notamment dans les difficultés d’insertion économique, sociale et culturelle des lauréats, la faible interaction de l’école avec son environnement local, national et mondial, aggravée par sa faible capacité à accompagner ou à intégrer rapidement et pertinemment les évolutions de cet environnement. Il résulte de ces limites un coût exorbitant que le pays supporte dans la mise en place de son système éducatif et un avenir incertain pour les apprenants.

C’est ainsi que le système éducatif national s’est engagé dans le sentier de la réforme. «Pour une école de l’équité, de la qualité et de la promotion», c’est le slogan de la vision stratégique de cette réforme qui couvre la période 2015 – 2030, orchestrée par le Conseil Supérieur de l’Education, de la Formation et de la Recherche Scientifique et approuvée par le ministère de l’Education.

Selon les expériences nationales et internationales, la durée considérée est conforme au temps généralement requis pour une réforme éducative stratégique, dénote le rapport du Conseil. Elle définit le court terme en une période de trois ans, le moyen terme en six ans et le long terme au-delà de six ans, à l’horizon 2030. Cette période intègre les cohortes présentes et celles à venir. Elle concerne le parcours d’une cohorte depuis la première année du primaire jusqu’à la fin du secondaire qualifiant. En outre, elle couvre quatre promotions des universités et des grandes écoles. Pour toutes ces raisons, le Conseil considère qu’une période de quinze ans est suffisante pour mettre en œuvre la vision stratégique, l’évaluer, mesurer la réalisation des objectifs et apporter des corrections le cas échéant et donc suffisante pour construire une École nouvelle qui répondra aux attentes de la société.

Grâce au changement projeté, l’école marocaine pourra jouer un rôle déterminant dans le passage d’une pédagogie fondée sur la transmission des connaissances à sens unique, sur le remplissage et sur la mémorisation, à une pédagogie qui cible plus l’intelligence en faisant participer l’apprenant à la construction de son apprentissage. Concrètement, cette stratégie aspire à développer l’interaction créative entre l’enseignant et l’apprenant, à favoriser le développement de compétences liées au savoir-faire et au savoir-être telles que l’observation, l’expression, la critique, la recherche et la synthèse ; à encourager l’initiative de l’apprenant et développer son autonomie et sa perspicacité à l’ère du numérique et de la profusion des connaissances. Cette stratégie audacieuse et dotée de leviers à profusion ambitionne de contribuer dans l’évolution de la société marocaine, d’une société de consommation des connaissances vers une société productive de savoir grâce au progrès de la recherche scientifique et technique et de l’innovation, dans les domaines des sciences fondamentales et appliquées, des technologies modernes, des sciences humaines et sociales, des lettres et des arts. Le tout dans l’ultime but de contribuer à affirmer et consolider le positionnement du Maroc dans la société de la connaissance parmi les pays émergents.

La Formation professionnelle dotée d’un plan quinquennal

En matière de formation professionnelle, l’OFFPT dispose d’une notoriété certaine qui lui a permis de jouir de la confiance des entreprises établies au Maroc, grandes ou petites. L’Office, qui a pu multiplier son offre initiale par 8 pour la période 2001-2015, est devenu l’acteur numéro un de la formation au Maroc de par la diversité et la qualité de la formation dispensée dans ses établissements, menant les industriels et autres acteurs de l’économie à devenir friands de ses diplômés. Poursuivant sur cette lancée, le Conseil d’administration de l’OFPPT avait adopté, le 5 octobre 2016, son nouveau contrat-programme pour 2021. Celui-ci vient concrétiser la « Stratégie nationale de la Formation professionnelle 2021 » présentée au printemps de l’année passée. Son principal objectif : former 10 millions de personnes d’ici 5 ans. L’OFPPT aura la responsabilité de 2 millions d’entre eux.

Ce Contrat–programme a pour portées de donner les moyens de développement du dispositif de formation de l’OFPPT, à travers la création de 120 nouveaux établissements (24 par an en moyenne), dont 58 dédiés aux secteurs prioritaires avec des objectifs bien tracés et en phase avec les besoins actuels et futurs émanant des stratégies sectorielles telles que le Plan d’Accélération Industrielle, le Contrat RH Hôtellerie/Tourisme, la Stratégie Logistique, etc.  Le Contrat-programme inclut la réalisation de 58 autres établissements de proximité, dont 39 dans le cadre de partenariats avec les Fondations Mohammed V pour la Solidarité, la Fondation Mohammed VI pour la Réinsertion des Détenus, les Régions et l’INDH.

Ces efforts permettront à l’OFPPT d’atteindre une capacité d’accueil de 668.500 places pédagogiques, répartie sur tous les niveaux de formation, avec une attention particulière au développement des cursus professionnalisant (Bac pro et Parcours collégial et professionnel) et le renforcement des Formations Qualifiantes du niveau Bac +3 et +4, destinées au middle management, et celles susceptibles d’améliorer l’employabilité des diplômés chômeurs.

Autre visée de taille du contrat-programme, contribuer à la lutte contre l’abandon scolaire, par le déploiement de près de 1.008.000 places destinées aux déscolarisés.

Ainsi, l’OFPPT projette la formation de plus de 2 millions de jeunes à l’horizon 2021 (2.091.500 formés précisément), soit la formation en 6 ans d’un effectif plus important que celui réalisé durant les quatorze dernières années. Le dispositif de l’OFPPT atteindra annuellement, à terme, une capacité de formation de 365 500 jeunes (contre 27 334 formés en 2001).

Les liens entre la formation et le marché du travail étant étroits, l’OFPPT accorde la même importance au renforcement de la compétitivité des PME/PMI et au développement des qualifications de leurs salariés, à travers la formation continue de 1.920.000 bénéficiaires, et la réservation de 20 000 places à la formation en cours du soir. Des actions de formation et d’appui à la création d’entreprises seront menées annuellement au profit de 3000 porteurs de projets avec l’objectif de favoriser la création de 6000 TPE à l’horizon 2021.

Iliasse El Mesnaoui

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