Madagascar : Abstention record à l’élection présidentielle

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

Si, en 2018, 54% des électeurs malgaches avaient participé à l’élection présidentielle qui avait porté, pour la deuxième fois au pouvoir, Andry Rajoelina, après qu’il ait accédé, en 2009, à la présidence de la république à la faveur d’une mutinerie contre l’ancien chef de l’Etat Marc Ravalomanana, force est de reconnaître que les révélations, faites en Juin dernier, par la presse malgache et relatives à l’acquisition, par le président sortant, de la nationalité française en 2014, ont exacerbé les tensions entre le pouvoir et la population.

Or, même si l’opposition qui a estimé qu’en agissant ainsi Andry Rajoelina a perdu sa nationalité malgache et, qu’à ce titre, il n’est plus habilité à gouverner Madagascar, a tenu à saborder l’élection du 16 Novembre 2023, la justice, qui a été d’un autre avis, a refusé, quant à elle, d’invalider la candidature du président sortant et donné, ainsi, l’occasion au gouvernement d’accuser l’opposition de « menacer la stabilité du pays ».

Et si, par ailleurs, pour disperser les multiples manifestations qui ont émaillé la campagne électorale, à l’appel de l’opposition, les forces de l’ordre ont dû faire usage de grenades lacrymogènes, la situation a empiré le 14 novembre, dans la soirée, lorsque des actes de sabotages avaient touché plusieurs bureaux de vote et que l’un d’entre eux fut même incendié.

Il n’en fallait pas plus pour que le scrutin initialement prévu pour le 9 Novembre soit reporté d’une semaine.  Aussi, en voulant frapper un grand coup et remporter, dès le premier tour, le scrutin de ce 16 novembre 2023 – faute d’opposition – Andry Rajoelina avait sillonné le pays en hélicoptère et en avion privé, durant sa campagne électorale et organisé des meetings géants aux quatre coins de Madagascar pour appeler ses compatriotes à voter en force en leur rappelant que les élections restent « la seule voie démocratique » qui permette de dénoncer « les gens qui essaient de semer des troubles ».

Peine perdue que celle-là, si l’on en croit une première estimation officielle de la Commission électorale (CENI) qui a rapporté que le taux de participation aurait accusé une baisse notable dès lors que ce sont moins de 39% des 11 millions d’électeurs inscrits qui ont pris le chemin des urnes pour départager les 13 candidats officiels dont 10 – parmi lesquels les anciens présidents Hery Rajaonarimampianina et Marc Ravalomanana – n’ont pas fait campagne.

Mais en mettant en doute l’impartialité de la Commission électorale, plusieurs sources ont affirmé que la participation n’a pas dépassé 20% – le taux le plus bas de l’histoire électorale du pays – et l’opposition a dénoncé, de son côté, les irrégularités qui ont affecté le déroulement du scrutin à telle enseigne que certains bureaux de vote ont été fermés faute d’électeurs, comme ce fut le cas à Androy, une localité du sud de Madagascar.

Or, bien que cette faible participation au scrutin présidentiel constitue, pour l’opposition, une adhésion massive à son mot d’ordre de boycott et qu’elle devrait, à ce titre, invalider le processus électoral, le président sortant ne s’est pas empêché d’avoir sa propre grille d’analyse de la situation en considérant qu’il a été réélu dès le premier tour même s’il est incontestable que  sa légitimité va être remise en cause et qu’il va lui falloir utiliser la force pour se maintenir au pouvoir.

Sachant, enfin, que l’opposition réclame l’annulation des résultats de ce scrutin, de quoi demain sera-t-il fait à Madagascar ? Attendons pour voir…

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