Mustapha Azzaoui, un vétéran de la première heure, tire sa révérence

Mustapha Azzaoui, militant de la première heure du Maroc indépendant, nous a quittés, dimanche dernier à Rabat. Il avait épousé, très jeune dans les années 60, les idées du progrès et du socialisme. Enseignant, syndicaliste et militant politique conséquent, il a gravi les échelons sans le vouloir, n’étant pas en quête d’investiture…

Il était membre du Parti communiste marocain, du Parti de la libération et du socialisme et du PPS. Il avait occupé le poste de Premier secrétaire de la Région de Meknès-Tafilalet du PPS, dans les années de plomb.

A Meknès comme dans la région et ailleurs, le défunt avait joui d’un capital de sympathie militante et professionnelle immense auprès de ses camarades, ses collègues, ses étudiants, et auprès des démunis et de la classe ouvrière dont il était l’un des porte-voix attitré.

Partout il laissa, comme durant sa vie militante, le souvenir de l’être affable, de l’homme de conviction et du militant conséquent et complètement désintéressé. Il n’a jamais revendiqué ou réclamé autre chose que son patriotisme et son parti pris révolutionnaire. Oui il était de cette trempe de militants, aujourd’hui en déperdition, qui s’est sacrifiée pour des idéaux humanistes et émancipateurs.

Les camarades d’Azrou, notamment ceux qui avaient subi l’arrestation arbitraire, gardent de Si Mustapha, l’image du camarade omniprésent, généreux et bienveillant.

Il avait aussi siégé au sein du Comité central du PPS, sans pour autant opter pour un quelconque carriérisme politique, jusqu’à son départ en France, à la retraite qui n’en fut pas une.

De l’Hexagone, Si Mustapha a continué à se préoccuper de la situation politique et sociale du Maroc natal. Il a contribué, par de nombreux articles, à des éclairages pertinents. A Al Bayane, nous avons pris l’habitude de publier ses analyses fondées sur les scrutins législatifs et communaux. Il était doté d’une formidable capacité d’analyse rigoureuse.

Avec le deuil qu’il laisse, l’on serait tenté de dire que l’un des tout derniers vétérans du communisme marocain vient de nous quitter. Une race rare. Il faisait partie de cette génération qui avait porté haut et fort l’étendard du Parti, à des moments cruciaux de l’histoire de notre pays, quand il n’était pas de tout repos d’épouser les idéaux du «socialisme scientifique», appellation destinée à dire, sans risque, l’idéal communiste dans une société où communisme était caricaturé au rang d’athéisme. A un moment où le combat pour l’indépendance politique et économique, le changement et le progrès, était synonyme d’aventure.

Son anticonformisme, il le paiera doublement. Il fera l’objet de nombreuses arrestations arbitraires pour ses idées. Et malgré les tortures et les privations, il leur restera fidèle jusqu’au bout, en dépit de ses régulières critiques politiques, en tant que militant exigeant et conséquent.

Si Mustapha était, à ce titre, un opposant farouche à tous les opportunismes, de gauche comme de droite, qu’il a combattu éperdument, y compris en période d‘alternance consensuelle ou de gestion gouvernementale.

Il laissera, auprès de ses nombreux étudiants et collègues, le souvenir d’un enseignant de grande qualité, un pédagogue hors pair. Il investira ses capacités didactiques dans l’analyse politique et les rapports de forces, notamment électoraux,  qu’il publia, y compris étant installé au sud de la France.

C’est cette Patrie à qui il est resté fidèle et dévoué qui l’appellera comme par coïncidence ou destin. Il est arrivé vendredi à Rabat et devait se rendre à Meknès dimanche, quand la mort nous l’arracha subitement.

A son épouse Suzanne, sa fille Leïla et son fils Yassine, à ses proches et amis, toute notre compassion et soutien.

Qu’il repose en paix !

Mohamed Khalil

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