Plus d’un mois après les élections, le Pérou est toujours sans président

Attendons pour voir…

Normalement, le 28 Juillet 2021 aurait dû être un jour de fête au Pérou car il aurait coïncidé avec la célébration des 200 ans de l’indépendance du pays de la couronne espagnole donc de l’avènement de la République péruvienne mais aussi celui de l’investiture du nouveau président issu du 2ème tour de l’élection du 6 Juin dernier.

Mais il n’en sera rien car le pays n’a que très peu de raisons de se réjouir puisqu’après avoir été pris dans l’engrenage d’une crise sanitaire et économique, il est, désormais, aux prises avec une crise politique dès lors qu’un mois après le 2ème tour de ce scrutin présidentiel, il n’a toujours pas de président officiellement élu.

En cause, l’entêtement de la candidate de la droite populiste, Keiko Fujimori,  qui, en criant à la fraude sans apporter la moindre preuve, refuse de reconnaître la victoire de Pedro Castillo, son rival de la gauche radicale bien que ce dernier ait, officiellement, recueilli près de 44.000 voix de plus qu’elle et qu’après avoir loué le travail des organismes électoraux, la mission d’observation de l’Organisation des Etats Américains (OEA), de l’Union Européenne (UE) et des Etats-Unis ait déclaré que ce scrutin a été « libre et transparent ».

Mais l’opiniâtreté de la fille de l’ancien président Alberto Fujimori (1990-2000) n’est pas née du hasard. Impliquée dans le fameux scandale Odebreicht après avoir été accusée d’avoir bénéficié d’un financement occulte de ses deux précédentes campagnes électorales (2011 & 2016) de la part de la société de BTP brésilienne, l’intéressée avait été placée en détention provisoire pendant plus d’une année.

Libérée de prison en mai 2020 du fait de la pandémie du Covid-19, Keiko Fujimori a pu se présenter à l’élection présidentielle du 6 juin 2021 mais il lui a été interdit formellement de voyager hors du Pérou ou de contacter des coaccusés ou des personnes appelées à témoigner dans l’affaire pour laquelle elle est poursuivie.

Risquant un procès et voire même l’emprisonnement pour blanchiment d’argent, Keiko Fujimori a donc mobilisé tous ses réseaux dans l’espoir de faire capoter ces élections et adressé au Comité national des élections (JNE) une multitude de demandes d’annulation des résultats concernant certains bureaux de vote au motif que des « falsifications de signatures » présumées concerneraient des dizaines de milliers de bulletins.

Pour Arthur Morenas, chercheur en sciences politiques à l’Université de Strasbourg, il ne s’agit-là, de la part de Keiko Fujimori, que d’un stratagème par lequel cette dernière chercherait à « retarder le plus possible la proclamation du vainqueur et d’arriver le 28 Juillet, sans président, pour que soient convoquées de nouvelles élections ». Cette tactique étant tombée à l’eau du moment qu’à l’heure qu’il est, le JNE n’a fait état d’aucune fraude avérée, le discours de la candidate de la droite populiste péruvienne « est davantage une stratégie pour l’avenir » car, comme le dit Arthur Morenas, « le jour où la justice frappera à sa porte, Keiko Fujimori se mettra dans une position de victimisation » et jurera qu’elle a été flouée par l’élection.

Mais si la fille de l’ancien président appelle ses partisans à ne pas abandonner et « à continuer la lutte avec encore plus de fermeté », jusqu’à quand ce « combat » va-t-il durer alors que le Comité national des élections et que la mission d’observation de l’Organisation des Etats Américains (OEA), de l’Union Européenne (UE) et des Etats-Unis ont loué le travail des différents organismes électoraux et reconnu, d’une même voix, que ce scrutin a été « libre et transparent » ? Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

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