L’après-cessez-le feu dans la bande de Gaza

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

Si le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas entré en vigueur dans la nuit de vendredi à samedi grâce notamment à une médiation égyptienne a été salué par le monde entier, il n’a ni fixé les conditions à l’arrêt des combats à respecter par chacune des parties ni établi de plan pour la reconstruction d’un territoire enclavé ravagé par plus de dix journées d’intenses bombardements.

Aussi, dès l’arrêt des hostilités, une délégation égyptienne est venue en discuter avec le Hamas, au pouvoir dans la Bande de Gaza, pendant qu’une mission dépêchée par les Nations-Unies à l’effet de chiffrer les dommages auxquels a donné lieu cette quatrième guerre entre le « Mouvement de résistance islamique » et Israël, a non seulement appelé à une « reconstruction » à long terme de la bande de Gaza mais, également, souligné la nécessité de régler les « causes profondes » du conflit israélo-palestinien en obligeant Israël à lever le blocus qu’elle impose à ce territoire depuis 2007 pour pouvoir éviter une « normalité artificielle » et redonner « espoir » aux gazaouis.

Ainsi, outre le millier d’appartements détruits, les innombrables routes crevassées et les nombreux dommages ayant affecté les infrastructures de traitement de l’eau, il va falloir se pencher, avec toute la bienveillance requise, sur les traumatismes psychiques dus aux bombardements mais aussi sur l’avenir de la bande de Gaza et, surtout, sur celui de ses deux millions d’habitants, en majorité, des jeunes sans ressources.

C’est à ce titre, d’ailleurs, que Philippe Lazzarini, le commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations-Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a déclaré à l’AFP « Nous ne devons pas seulement nous placer dans une approche de reconstruction (…) car cela revient à Sisyphe : vous construisez, vous détruisez, vous reconstruisez, vous détruisez. Nous devons avoir une approche plus large centrée sur le développement humain ».

Raison pour laquelle bien qu’ayant reconnu que, cette fois-ci, il y a eu « moins de maisons détruites que pendant la guerre de 2014 » Lynn Hastings, la coordinatrice de l’aide humanitaire pour les territoires palestiniens, a tenu à préciser « que la population de Gaza est plus traumatisée que jamais » et que cela « doit vraiment être pris en considération ».

Or, l’enjeu de cette « reconstruction » n’est pas seulement humanitaire mais également diplomatique dans la mesure où l’armée israélienne avait accusé le Hamas d’avoir détourné de l’aide internationale à des activités militaires lorsqu’il avait utilisé le métal des canalisations pour la fabrication de roquettes.

Ainsi, dès vendredi, des dizaines de camions d’aide internationale ont commencé à affluer vers la bande de Gaza via les terminaux de Kerem Shalom à la frontière avec Israël et de Rafah, à la frontière égyptienne et dimanche les fonctionnaires de la bande de Gaza ont même pu reprendre le chemin de leurs bureaux.

Mais si le cessez-le feu est bien là, ce qui laisse songeur c’est que les deux protagonistes ont levé bien haut leurs bras en criant « victoire » au même moment. Est-ce à dire que cette quatrième guerre Hamas-Israël s’est soldée par un « match nul » ? Difficile à admettre quand on sait que, du côté palestinien, il y a eu plus de 250 morts contre 12 du côté israélien compte non tenu de la destruction d’un millier de maisons palestiniennes et de la presque-totalité des infrastructures de base de la bande de Gaza.

Mais où résiderait alors cette victoire revendiquée à la fois par les uns et par les autres ?

Benjamin Netanyahou qui, le 10 mai dernier n’était qu’un Premier ministre en sursis dans l’incapacité de former un nouveau gouvernement et sous le coup d’une triple mise en examen pour fraude, corruption et abus de confiance a été sauvé  « in extremis », dirions-nous, par les salves de roquettes qui avaient été tirées ce jour-là par le Hamas puisqu’elles lui ont permis de retrouver son rôle de défenseur intransigeant de la sécurité d’Israël face aux « terroristes » du mouvement de résistance islamique.

De l’autre côté, en se posant en « défenseur » de la mosquée « Al Aqsa », troisième lieu saint de l’Islam, face à l’intervention israélienne jugée d’autant plus choquante qu’elle a eu lieu en plein mois sacré du Ramadan, le Hamas est parvenu à marginaliser Mahmoud Abbas et l’Autorité palestinienne qui avaient cru pouvoir contrôler une partie de la Cisjordanie et à repousser sine die les élections législatives qui devaient se tenir le 22 mai.

Voilà les raisons pour lesquelles, cette fois-ci, Benjamin Netanyahou et Ismaïl Haniyeh ont crié « victoire » à l’unisson.

Il est vrai, enfin, que le cessez-le feu est bien là, que la reconstruction de la bande de Gaza a bel et bien commencée et que la vie y a repris une certaine « normalité » mais qu’en est-il de sa pérennité ? Attendons pour voir…

Related posts

Top