Le dialogue social en stand-by en 2021

En matière de dialogue social, l’année 2021 est une «année blanche comme neige», tant au niveau central que sectoriel. Le gouvernement El Otmani II, en fin de mandat, avait peu de marge de manœuvre, et la situation liée à la crise de la pandémie de Covid a chamboulé l’ordre des priorités pour les pouvoirs publics.

Les communiqués des différentes centrales syndicales rendus publics à l’occasion de la célébration du 1er Mai 2021 reflètent un même constat : l’immobilisme. Des organisations centrales comme la Confédération démocratique du travail (CDT) ont même accusé le gouvernement de profiter de la situation liée à la Covid pour «attenter aux droits, aux libertés et aux acquis sociaux». Quant à l’Union marocaine du travail (UMT), elle a vivement dénoncé l’attitude du gouvernement qui reste spectateur face aux agissements du patronat et qui se range totalement derrière les positions et les politiques de ce dernier. Il faut dire que cet immobilisme a caractérisé les deux mandats des gouvernements El Otmani I et II et même le mandat du gouvernement Benkirane. En témoignent la loi organique relative à la grève toujours à la traîne ou la réforme du Code du travail qui peine à voir le jour. En témoigne également le nombre impressionnant de grèves, de marches et de sit-in organisés dans différents secteurs (enseignement, santé…).

Lors de son passage à la Chambre des conseillers le 25 mai 2021 dans le cadre de la séance plénière mensuelle consacrée aux réponses du Chef du gouvernement et axée sur la thématique «Le dialogue social et les mesures visant à atténuer les répercussions socio-économiques de la crise de Covid-19», Saâd Dine El Otmani a été fustigé à la fois par les représentants du patronat et des syndicats à cause du gel des concertations et l’absence de dialogues sectoriels. La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) avait tiré à boulets rouges sur El Otmani pour le non-respect des engagements découlant de l’accord tripartite du 25 avril 2019, notamment l’adoption de lois et de décrets réglementant le droit de grève. Force est de constater donc que rien ne s’est passé cette année au niveau du dialogue social en général, mais d’un autre côté il y a eu des élections à la Chambre des conseillers (y compris les élections syndicales) et à la Chambre des représentants. Au terme de ces élections, une troïka syndicale composée de l’UMT, de l’UGTM (Union générale des travailleurs du Maroc) et de la CDT (les trois ayant réussi à obtenir chacun plus de 6%, seuil requis pour participer aux rounds du dialogue social) s’est dégagée face à une majorité gouvernementale dirigée par le RNI, dont le programme électoral est centré sur «l’État social». Si des réunions avec les syndicats sont déjà engagées dans le secteur de l’enseignement (bien que ternies par les décisions unilatérales du ministère relatives aux conditions d’accès au concours des enseignants), le dialogue social au niveau central et dans les autres secteurs n’a pas encore été amorcé.

Le nouveau Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, lors de la présentation du programme gouvernemental, début octobre dernier, s’est engagé à ouvrir le dialogue social avec les centrales syndicales dès la première année de son mandat. Engagement confirmé par des sources proches de M. Akhannouch qui ont affirmé qu’il s’apprêtait à convoquer les partenaires sociaux (les centrales syndicales les plus représentatives et le patronat) à une première réunion de dialogue social. Quant aux syndicats, ils appellent le gouvernement à relancer le dialogue avec eux, à l’instar de la CDT, qui a adressé une lettre au Chef du gouvernement l’invitant à accélérer la programmation du dialogue social. Pour l’heure, tout porte à croire que le dialogue social entre le gouvernement, les syndicats et le patronat va emprunter une nouvelle voie. Et la page blanche qui a marqué le précédent mandat gouvernemental devrait en principe être tournée.

Top