Finance climatique au Maghreb
Le Maroc a réussi encore une fois à se placer à la tête des pays maghrébins en matière de préparation des systèmes financiers afin de soutenir l’action climatique, selon le rapport «Climate Finance Readiness Index» couvrant la région Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et de la Turquie (MENAT).
Publié récemment par le cabinet de consulting Green For South basé à Toronto et Casablanca, le rapport souligne que le Royaume, dans sa sous-région qui comprend également l’Algérie et la Tunisie, est le premier à avoir adopté des « réglementations et des lignes directrices appropriées (principalement volontaires à ce stade), un volume intéressant de l’activité de financement climatique (traitant avec des fonds internationaux et émettant des obligations vertes) et des dispositifs de sensibilisation efficaces».
Le rapport est revenu également sur les efforts du Maroc pour améliorer sa résilience climatique notamment en matière d’atténuation qui requiert d’importants investissements, rappelant à cet égard le coût total des actions d’atténuation et d’adaptation au climat inscrites dans la CDN (Contribution Déterminée au Niveau National) tel que publié en juin 2022 et estimé à 78 milliards USD (38 pour les mesures d’atténuation et 40 milliards d’USD pour les mesures d’avertissement mesures).
La Tunisie dispose également d’une réglementation appropriée (sur une base volontaire), d’un volume intéressant d’activité de financement climatique, ajoute le rapport, précisant qu’il n’y a pas eu d’émission d’obligations vertes ou de «Sukuk» et les dispositions de sensibilisation sont encore limitées.
Par contre, l’Algérie «ne dispose d’aucune réglementation dans le secteur financier pour soutenir l’action climatique et l’activité de financement climatique est encore limitée», a fait savoir Green For South, estimant que dans l’ensemble, la région d’Afrique du Nord est à un stade précoce de mise en œuvre de ces actions.
Pour ce cabinet spécialisé dans la finance durable, verte et climatique, le Maroc et la Tunisie sont appelés à renforcer davantage leur réglementation (et la rendre obligatoire) et encourager les émissions vertes et lancer davantage d’initiatives de sensibilisation et de formation.
Concernant la région MENA, l’Égypte ouvre la voie en rendant toutes les réglementations relatives aux risques ESG et climatiques obligatoires dans les différents secteurs financiers (banques, assurances et marchés des capitaux) à la différence des pays comme la Jordanie, le Maroc, la Tunisie et la Turquie qui ont généralement des exigences de déclaration volontaires.
Le rapport, dans son évaluation, prend en compte les différences entre les sous-régions telles que l’Afrique du Nord, le Moyen-Orient, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et la Turquie, afin de refléter une vision juste de chaque pays en fonction de ses défis et contraintes locaux.
En effet, 14 systèmes financiers sont évalués sur la base d’une variété de critères afin de déterminer les progrès réalisés par chaque pays pour mettre en œuvre mécanismes et instruments de financement du climat. Il s’agit du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie, de l’Égypte, de la Jordanie, du Liban, de l’Irak, du Koweït, du Qatar, du Bahreïn, de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, d’Oman et de la Turquie.
Ainsi, Climate Finance Readiness Index attribue à la sous-région Afrique du Nord un score de 31,33%, contre 40,23% pour la sous-région Moyen-Orient (Égypte, Irak, Jordanie, Liban), 17,53% pour la sous-région Conseil de coopération du Golfe (CCG) et 46,84% pour la Turquie.
S’agissant de la sous-région du CCG (hors Oman), les auteurs du rapport ont relevé que ces pays compteraient sur leurs propres ressources pour soutenir l’action climatique, notant que la plupart d’entre eux ont l’exigence de reporting ESG pour les entreprises publiques et des lignes directrices sur les obligations vertes/Sukuk.
Pour sa part, la Turquie dispose d’un ensemble complet de réglementations couvrant les exigences en matière de risques climatiques et ESG. En outre, les directives sur les obligations vertes sont rendues obligatoires.
Par ailleurs, Ankara a déjà émis des obligations vertes et mobilisé plus d’un milliard milliard USD de fonds verts mondiaux.
Pour l’activité financière verte, le Maroc figure aux côtés de l’Egypte, du Liban et de la Turquie dans le premier sous-groupe des pays mobilisant des ressources à la fois des fonds verts mondiaux et des émissions d’obligations vertes/«Sukuk».
Abordant le volet de la sensibilisation, le texte note que le Maroc se positionne avec la Turquie et la Jordanie dans le premier sous-groupe qui se distingue par des programmes de formation spéciaux dans le domaine de la finance verte et climatique avec un volume de publications académiques outre des articles de presse.
In fine, Green For South a émis dans son rapport une série de recommandations à l’endroit des parties prenantes y compris les régulateurs et les institutions financières pour mettre en œuvre ou renforcer les initiatives nécessaires pour contribuer à l’atténuation des risques climatiques et les efforts d’adaptation.
Il s’agit notamment d’établir un cadre réglementaire pour les institutions financières afin de gérer les risques climatiques, de renforcer les incitations du marché pour stimuler à la fois l’offre et la demande de financement climatique par le biais d’investissements dans des initiatives vertes, et d’accroître les connaissances et la sensibilisation dans ce domaine.