Le Nicaragua rompt ses relations diplomatiques avec Taïwan

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

«Le gouvernement de la République du Nicaragua déclare qu’il reconnaît qu’il n’y a qu’une seule Chine dans le monde. La République populaire de Chine est le seul gouvernement légitime représentant toute la Chine et Taïwan est une partie inaliénable du territoire chinois. Le gouvernement de la République du Nicaragua rompt ses relations diplomatiques avec Taïwan à compter de ce jour. »

Tels furent les termes du communiqué par lequel le chef de la diplomatie du Nicaragua, Denis Moncada, a annoncé, de manière officielle, ce jeudi 9 décembre 2021, la rupture des relations diplomatiques qu’entretenait son pays avec Taïwan qui a déclaré, immédiatement,  « regretter profondément la décision du gouvernement de Daniel Ortega d’ignorer la longue et étroite amitié entre le peuple du Nicaragua et le peuple taïwanais ».

Ayant pour objectif un rapprochement avec Pékin, cette rupture qui est une conséquence directe du récent durcissement des sanctions américaines contre le Président nicaraguayen auquel Washington reproche d’avoir fait emprisonner tous ses rivaux avant d’être réélu, en Novembre dernier, pour un quatrième mandat, intervient, d’une part, au moment où le fils du Président Daniel Ortega est en déplacement en Chine pour la signature d’accords commerciaux entre Pékin et Managua et, d’autre part, pour contrecarrer le lancement, par les militants taïwanais à l’occasion de la Journée mondiale des droits de l’Homme, d’une campagne de boycott des Jeux olympiques d’hiver de Pékin.

Dénonçant cette rupture qui, pour les Etats-Unis, « prive le peuple nicaraguayen d’un partenaire loyal pour sa croissance démocratique et économique », Washington a, sans tarder, appelé tous les pays démocratiques  à « accroître leurs liens avec Taïwan » et ce, d’autant plus que, désormais, seuls 14 pays – dont le Vatican – reconnaissent diplomatiquement Taïwan et que la République Populaire de Chine exerce une pression de plus en plus forte sur les alliés de « l’île rebelle » depuis l’élection, en 2016, de la Présidente taïwanaise Tsai Ing-wen.

En effet, depuis l’élection de cette dernière à la présidence de Taïwan, la Chine est parvenue à faire retirer, à Taipeh, la reconnaissance diplomatique qui lui avait été initialement accordée par huit pays. « Ce ne sont pas de bonnes nouvelles mais notre reconnaissance internationale ne se mesure pas au nombre de nos ambassades dans le monde. Notre image de pays démocratique ne cesse de s’améliorer ces dernières années » a affirmé un diplomate taïwanais basé en Europe.

Antoine Bondaz, le directeur du programme « Taïwan » à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) abondera dans le même sens en rappelant que « ce qui compte ce n’est pas le nombre de relations diplomatiques mais l’intensité et la diversité des relations avec les pays du monde entier ».

Aussi, le fait d’avoir été invité  par le président américain Joe Biden à participer au sommet de la démocratie qui s’est tenu, en visio-conférence, les 9 et 10 décembre, légitime-t-il l’existence, au niveau mondial, d’une démocratie à Taïwan, d’une façon beaucoup plus forte qu’une multiplication d’ambassades officielles.

En outre, si l’on en croit Timothy S. Rich, expert de Taïwan à la Western Kentucky University, la perte du Nicaragua comme allié formel n’aura que très peu d’effets concrets pour Taipeh dans la mesure où « Taïwan a flouté efficacement la distinction entre relations officielles et officieuses avec de nombreux pays, y compris la plupart des démocraties et en obtient dans la pratique, la plupart des bénéfices que l’on tire de relations diplomatiques ».

D’ailleurs, ces derniers mois et au grand dam de Pékin, ce sont plusieurs personnalités de très haut niveau – à savoir, des ministres américains, des parlementaires européens ou encore des sénateurs français – qui se sont rendus à Taipeh pour y rencontrer la présidente Tsai Ing-wen qui, de con côté, n’a pas manqué de se féliciter du soutien accordé à Taïwan par les plus grandes démocraties mondiales.

Que va pouvoir faire le géant chinois pour isoler encore plus l’île « rebelle » sur la scène internationale alors qu’outre le bureau de représentation que cette dernière a ouvert, en novembre dernier, en Lituanie, elle possède de nombreuses autres ambassades officieuses de ce type à travers le monde ? Attendons pour voir…

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