Younes Diouri, gérant et fondateur de YDA

Karim Ben Amar

Depuis l’annonce de la rénovation de la Plaça Toro, la joie des tangérois était palpable. Les habitants de la ville portuaire se sont en effet réjouis à l’idée de pouvoir réinvestir ce lieu mythique de Tanger. Le choix pour la réhabilitation de l’emblématique place s’est porté sur le groupement composé de Jaouad Khattabi, Hicham Khattabi et Younes Diouri. Pour avoir plus d’informations sur ce sujet tellement d’actualité, l’équipe Al Bayane en déplacement à Tanger a rencontré le gérant et fondateur de YDA, Younes Diouri.  Natif de Tanger, et diplômé de l’école supérieure d’architecture de Versailles (France), l’architecte-urbaniste est enregistré en France et au Maroc. Engagé dans le renouveau de l’architecture contemporaine des pays de la méditerranée, il est le fondateur et directeur de publication de la revue et communauté d’architecture aMush. En grand passionné, il a su éveiller un intérêt nouveau pour la qualité architecturale et l’innovation spatiale au Maroc, ainsi qu’au Moyen-Orient. Entretien.

Al Bayane :Depuis l’annonce du projet de rénovation de la Plaza Toro, il y a un engouement chez tous les habitants de la ville.En tant que tangérois, comment vivez-vous votre contribution à ce projet?

Younes Diouri : C’est un immense honneur pour moi d’avoir été sélectionné pour travailler sur ce projet ambitieux.Je suis extrêmement heureux que ce haut lieu de la perle du Détroit accueille de nouveau le public.  Il faut savoir que la Plaça Toro est dans l’imaginaire collectif des tangérois. La preuve : la rénovation a suscité une vague de soulagement dans toute la ville. Ce monument mythique a souffert durant ces 30 dernières années. Après la fermeture de la dernière corrida encore présente au Maroc, elle a été transformée en lieu de transit des voyageurs clandestins, alorsqu’audébut des années 90, la Plaça Toro faisait office de salle de concert où les jeunes s’épanouissaient. Grâce à ce projet de rénovation, les habitants de la ville ainsi que les touristes pourront visiter ce monument, assister à des spectacles musicaux etc. À travers la rénovation de la Plaza Toro, c’est Tanger qui retrouve sa dignité. Par ce lieu, la villeaura un atout supplémentaire pour briller à l’international. Cet endroitchargé d’histoires attirera de nombreux touristes nationaux et internationaux.

La sélection pour ce projet s’est faite à travers un concours organisé par l’Agence pour la promotion et le développement du Nord (APDN). Que pensez-vous de cette méthode ?

C’est vraisemblablement la meilleure méthode pour stimuler la qualité en architecture. Le fait de mettre en concurrence une quarantaine d’architectes de la ville est sans doute la meilleure façon de challenger les différentes propositions. D’autant plus qu’il s’agit d’un bâtiment revêtant une grande importance dans la région. Nous sommes ravis que la Wilaya, sur suggestion du Conseil de l’ordre des architectes de Tanger, qui a déjà engagé une convention de partenariat avec l’APDN, ait décidé d’organiser un concours pour ce cas de figure.

Quels sont les grands défis techniques auxquels doit faire face votre cabinet d’architecte ?

Il faut tout d’abord procéder à la remise aux normes des gradins. Pour information, la Plaça Toro pourra accueillir jusqu’à 7000 spectateurs. Pour cette raison, nous allons intégrer 11 dégagements au lieu de 8 actuellement. Cependant, l’expression architecturale initiale ne sera en aucun cas modifié. La façade sera identique à celle conçue en 1950. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il faut renouer avec la brique rouge typique de l’architecture espagnole de l’époque qui a été volontairement occultée. Aujourd’hui, on se rend compte du patrimoine tangérois et il faut le préserver. Les espagnoles ont bien conservé la ligne de l’architecture mauresque dont ils tirent beaucoup de profits (tourismes…).

Toute rénovation apporte son lot de bonnes surprises. Quelle est la nouveauté apportée à la Plaza Toro ?

Beaucoup de nouveautés sont à l’ordre du jour, à commencer par l’aménagement extérieur autour du bâtiment. Il y aura une intégration de l’espace public directement accessible, notamment avec une esplanade d’exposition artistique.Une agora avec une capacité de 120 personnes est prévue pour accueillir les évènements spontanés, en plus des gradins de 500 places pour les spectateurs extérieurs (gratuits). Aussi, une fontaine sèche et des terrasses de restaurants seront accessibles aux passants et visiteurs. Pour compléter l’offre «retail» du site, les kiosques auront pignon sur rue. Grâce aux revenus générés, les espaces verts pourront être quotidiennement entretenus. Mais la grande nouveauté, c’est la toiture en structure légère (voile rouge). Cette toiture a pour fonction de protéger les spectateurs en cas d’intempéries ou du soleil. Cette protection supplémentaire offre plus de confort aux visiteurs. Cette touche contemporaine est un rappel à la tauromachie, mais aussi au Colysée de Rome. Cette réinterprétation contemporaine couronnera ce projet ambitieux tant attendu.