Au moins 14 soldats turcs ont été tués et des dizaines de personnes blessées dans un attentat-suicide attribué au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui a visé samedi un bus transportant des militaires à Kayseri, dans le centre de la Turquie.
« Tous les éléments désignent pour le moment le PKK », a affirmé le vice-Premier ministre Numan Kurtulmus sur la chaîne de télévision NTV. Il a déclaré que les composants utilisés pour l’attentat étaient similaires à ceux utilisés pour l’attaque contre un bus de policiers qui a fait 44 morts à Istanbul il y a une semaine, revendiqué par les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), un groupe radical kurde lié au PKK.
Le ministre de l’Intérieur, Suleyman Soylu, a fait état de 56 blessés, dont 6 graves. Le bilan des tués, qui était de 13 mort, est passé à 14 morts dans la soirée après le décès d’un soldat à l’hôpital, selon l’agence officielle Anadolu. Les soldats et sous-officiers se rendaient au marché, a expliqué l’armée dans un communiqué. Parmi les victimes, beaucoup avaient à peine plus de 20 ans.
Quinze personnes ont été arrêtées samedi dans le cadre de l’enquête, a déclaré le procureur de Kayseri, Mustafa Arslanturk, cité par Anadolu.
« Les attentats terroristes visent, en plus de nos policiers et de nos militaires, nos 79 millions de concitoyens », a souligné le président Recep Tayyip Erdogan, dans une déclaration écrite envoyée aux médias.
« Nous combattrons sans relâche ces organisations terroristes, dans un esprit de mobilisation nationale », a ajouté M. Erdogan.
L’explosion s’est produite à 8H45 (5H45 GMT). La bombe, placée dans une voiture, a été déclenchée par un kamikaze lors du passage du bus, a affirmé le Premier ministre, Binali Yildirim. Des images télévisées ont montré le bus réduit en épave fumante par l’impact de l’explosion.
A la suite de cet attentat, les locaux du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde) à Kayseri ont été saccagés par des dizaines de manifestants nationalistes qui ont déployé au sommet de l’immeuble le drapeau rouge aux trois croissants des nationalistes turcs du MHP.
D’autres attaques du même type ont eu lieu contre des locaux du HDP à Ankara, à Istanbul et dans la ville proche de Darica, ainsi qu’à Erzincan (est) ou encore à Canakkale (ouest).
Le HDP a dénoncé, dans un communiqué, l’inaction des autorités estimant que « ceux qui ne prennent pas de mesures pour empêcher ce type d’attaques laisse libre cours aux provocations ».
La Turquie a subi depuis l’été 2015, avec la reprise du conflit kurde et les combats en Syrie voisine où Ankara mène ses opérations contre le groupe Etat islamique (EI) et des groupes kurdes, une vague d’attentats attribués à l’EI ou au PKK et ses émanations.
En juin, 47 personnes ont été tuées dans un triple attentat-suicide à l’aéroport international Atatürk d’Istanbul, attribué à l’EI. Dans le sud-est de la Turquie, à Gaziantep, 57 personnes ont été tuées en août lors d’un attentat-suicide au cours d’un mariage kurde, attribué à l’EI.
Le 10 octobre 2015, 103 personnes avaient été tuées dans un double attentat-suicide à Ankara lors d’un rassemblement prokurde, attribué à l’EI.
Après l’attentat du 11 décembre, la police a arrêté dans la foulée plus de 560 personnes soupçonnées de liens avec le PKK ou de diffuser sa propagande. Parmi elles, de nombreux membres du HDP. Le PKK est classé « organisation terroriste » par la Turquie, les Etats-Unis et l’Union européenne. Le conflit avec les séparatistes kurdes a fait plus de 40.000 morts depuis le début de la rébellion kurde, en 1984. Le pays continue également de subir les conséquences du coup d’Etat manqué du 15 juillet, imputé au prédicateur islamique Fethullah Gulen, installé aux Etats-Unis et qui dément ces accusations.
Les autorités turques ont déclenché dans la foulée de vastes purges qui, allant au-delà de la chasse aux putschistes présumés, ont visé les milieux prokurdes et les médias.
La chef de la diplomatie de l’Union européenne, Federica Mogherini, a répété, lors d’un appel téléphonique au ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu, le soutien de l’UE à la Turquie dans la lutte contre le terrorisme, mais a souligné la nécessité du « plein respect de l’Etat de droit », selon ses services.
(MAP)