Cinq questions à Amina Eltmali, fondatrice de la plateforme
Propos recueillis par Imane Boussaid- (MAP)
L’artisanat, un secteur largement impacté par la crise sanitaire, se voit aujourd’hui dans l’impératif de se digitaliser. Dans ce sens, plusieurs initiatives sont nées au Maroc et en Afrique pour préserver ce patrimoine culturel, à l’exemple de la plateforme « Africa e-shoping ». Dans une interview accordée à la MAP, Amina Eltmali, fondatrice de la plateforme, revient sur l’histoire derrière le lancement de ce site dédié à la valorisation de l’artisanat africain et sa contribution dans l’enrichissement du savoir-faire artisanal continental.
Quelle est l’histoire derrière « Africa e-shopping »?
La plateforme « Africa-eshopping.com » a vu le jour pour donner à la marocaine qui est en moi la chance de s’exprimer.
J’ai passé huit ans en Afrique de l’ouest, notamment en Guinée Conakry et au Sénégal et en guise de reconnaissance à ce Continent, j’ai créé ce site pour essayer, à ma manière, de donner à l’Artisanat africain la place qu’il se doit.
Spécialiste en marketing digital et en e-commerce, je me suis penchée sur le projet d’une plateforme digitale qui pourrait valoriser les produits de l’Artisanat africain. Les prémices de ce projet se sont manifestées en plein confinement. Elles ont été motivées par la rude situation économique en Afrique, plus particulièrement au Maroc, en l’absence de touristes. – Pourquoi l’Afrique et pourquoi l’artisanat ?
Je suis une passionnée de l’artisanat marocain et de la création africaine d’une manière globale. Depuis toute petite, j’étais entourée d’objets artisanaux qui font partie du quotidien de tout un Marocain, (babouches, sacs en cuir, objets décoratifs issus de la dinanderie marocaine, poufs, fauteuils marocains, caftans, huile d’argan, etc.).
La situation sanitaire et ses conséquences sur l’économie mondiale et particulièrement sur le tourisme en Afrique et au Maroc m’ont fortement touchée. De ce fait, j’ai décidé de réorienter mon projet de base qui consistait à proposer des produits africains, vers l’artisanat « made in Africa ». C’est ainsi que je suis venue à Marrakech en septembre 2020, en ce sens que la Cité ocre demeure l’une des destinations les plus réputées en matière d’artisanat.
Comment cette plateforme peut-elle enrichir aussi bien la scène artisanale marocaine qu’africaine ?
Cette plateforme est inédite car, à la différence des plateformes déjà existantes, elle positionne le Maroc et plus globalement les pays nord-africains, comme étant le cœur battant de l’artisanat africain.
Depuis 1957, date de création de la Maison de l’artisan par Feu SM le Roi Mohammed V, le Maroc a beaucoup apporté à ses frères africains en matière d’innovation et de conservation de leur artisanat.
En même temps, les pays de l’Afrique subsaharienne ont aussi beaucoup de potentialités à mettre en relief en la matière, en l’occurrence l’art du travail des bijoux touaregs et les techniques de tissage. Je fais référence aux tissus africains ancestraux tels que le ndop, le kente ou encore le manjak.
Ainsi, nous avons tant à apprendre les uns des autres. Et c’est dans ce sens que cette plateforme vient donner la chance aux différents créateurs africains pour créer des ponts entre eux, au service de l’artisanat made in Africa.
Est-ce que vous vous intéressez à l’artisanat dans le sens le plus large du terme ou seulement à des métiers spécifiques ?
Personnellement, je m’intéresse à l’artisanat dans toutes ses formes. Il y a tant de belles choses dans ce domaine, sur lesquelles je peux passer des heures et des heures à faire tout un tas de recherches… J’ai un compte Twitter que j’ai dédié à la valorisation de l’artisanat made in Africa, et j’y poste tous les jours des infos, ou des portraits de créateurs.
D’ailleurs, chaque semaine, je fais un focus sur l’artisanat d’un pays africain… Je viens de finir une semaine complète dédiée au Burkina Faso.
J’ai aussi créé, fin 2019, une association en France avec une amie ivoirienne pour justement mettre en place des actions en faveur de la valorisation du savoir-faire africain.
Quelles sont vos aspirations pour l’avenir ?
Je veux voir un jour cette plateforme impacter réellement la situation de l’artisanat en Afrique, à tel point que des millions d’emplois seront sauvegardés, et que les métiers en voie de disparition soient sauvés et reconnus à leur juste valeur.
Ma démarche va au-delà de l’aspect financier que l’on retrouve dans bon nombre de plateformes.
Je tiens à cœur d’œuvrer pour une réelle valorisation de l’artisanat africain du nord au sud, de l’est à l’ouest.