Présidentielle française
Le principal parti conservateur français, Les Républicains (LR), devrait partir uni pour l’élection présidentielle du mois d’avril, un soulagement après le ralliement récent d’un de ses anciens ténors, qui ne garantit toutefois pas sa présence au second tour tant son électorat est morcelé.
« Je veux rassembler l’ensemble des Français, alors il faut que je commence par ma famille politique », affirmait lundi Xavier Bertrand, ancien ministre (Santé, Travail) sous Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy.
« Je participerai au Congrès » du 4 décembre de LR, durant duquel le parti désignera son candidat, a poursuivi cet actuel président de la région Hauts-de-France, dans le Nord du pays.
L’annonce a sonné comme une délivrance pour LR, dont Xavier Bertrand, qui avait quitté le parti en 2017, représente pour l’instant le meilleur espoir pour la présidentielle, avec 16% des intentions de vote selon un sondage paru lundi.
Un score qui lui permettrait d’accéder au second tour de l’élection d’avril, ce qui semblait inenvisageable il y a quelques mois encore, alors qu’en 2017 Emmanuel Macron a siphonné par le centre les formations historiques de gauche et de droite.
« Si LR investit Bertrand puis le soutient unanimement, avec la force de frappe du parti, l’argent notamment, sachant qu’une campagne coûte très cher, ça peut changer la donne », estime Etienne Criqui, professeur de droit et science politique à Nancy. « A condition que Bertrand imprime dans l’opinion », s’empresse-t-il d’ajouter à l’AFP.
Face à lui, les deux principaux candidats déclarés chez LR paraissent à la peine.
Valérie Pécresse, actuelle présidente de la région Ile-de-France (Paris et ses alentours), également ex-ministre (Enseignement supérieur puis Budget) et ex-membre du parti, plafonne à 11% des intentions de vote.
L’ancien négociateur de l’UE pour le Brexit Michel Barnier, lui aussi ancien ministre (Affaires étrangères, Agriculture notamment), était crédité de 7% des suffrages la semaine dernière.
Des scores indignes d’un parti fondé par l’ex-président Nicolas Sarkozy, lui-même resté cinq ans au pouvoir après deux mandats de Jacques Chirac, et qui s’inscrit dans l’héritage de la droite de gouvernement construite par Charles De Gaulle, incontournable dans la vie politique française depuis l’après-guerre.
Même si LR a connu une énorme désillusion en 2017 lorsque son candidat François Fillon, grand favori du scrutin, s’était effondré en fin de campagne, alors que les « affaires » s’accumulaient contre lui.
« Si LR n’arrive pas au deuxième tour en avril, le parti explosera », pronostique Etienne Criqui. Car la formation gaullienne est tiraillée entre différentes composantes : les tenants d’une droite dure, ceux d’un gaullisme plus social, les ultralibéraux…
Elle est surtout victime d’une intense concurrence à droite, dans une France où la gauche, « très divisée, n’a jamais été aussi faible », son socle de votants ne dépassant plus les 30%, observe Pascal Perrineau, professeur à Sciences Po Paris.
Mais, outre LR, trois candidats majeurs briguent les 70% restants: le président sortant Emmanuel Macron, la cheffe du parti d’extrême-droite Marine Le Pen, et le polémiste plus droitier encore Eric Zemmour, dont les intentions de vote dépassent les 15%, même s’il ne s’est pas encore officiellement déclaré.
Face à toutes ces personnalités, Xavier Bertrand a une vraie chance de se distinguer car « il est l’anti-Macron », dans un contexte de « rapport compliqué » entre la France et son président, accusé d’être « seul, autoritaire et issu des élites », selon M. Perrineau.
M. Bertrand, à l’inverse, « n’a pas fait l’ENA (l’Ecole nationale d’administration, dont sont issus les technocrates français, NDLR), c’est un élu local, il vient de province », énumère-t-il.
Jean Garrigues, historien et professeur à l’université d’Orléans, se veut moins optimiste. « LR coche tous les éléments d’une défaite annoncée, affirme-t-il. La culture de la droite, c’est de gagner la présidentielle autour d’un leader qui s’accapare le parti », ce qui n’est pas du tout le cas actuellement.
Pour la présidentielle de 2007, « Nicolas Sarkozy donnait le tempo » de la campagne, se souvient-il. Mais en 2021, « le calendrier électoral n’est plus dicté par LR, mais par Le Pen et Zemmour ». Avril s’annonce comme le mois de tous les dangers pour la droite traditionnelle française.