Après que le gouvernement transitoire de Bolivie, emmenée par la sénatrice conservatrice Jeanine Anez, ait convoqué une élection présidentielle pour le 3 Mai 2020, Evo Morales, qui a présidé aux destinées du pays, durant quatorze années jusqu’à sa démission le 10 novembre dernier, sous la pression de l’armée après sa victoire contestée au scrutin du 20 Octobre mais qui a toujours dit qu’il «ne lâcherait pas son pays», a annoncé, depuis son exil argentin lors d’une conférence de presse donnée ce dimanche 19 janvier à Buenos Aires, qu’il désignait Luis Arce Catacora pour représenter le Mouvement pour le socialisme (MAS) à l’élection présidentielle.
Et si cette désignation est intervenue à l’issue de sept heures de débat «avec quelques soixante-dix dirigeants du parti» si l’on en croit le quotidien «Los Tiempos», il convient de préciser que les sondages effectués, dès la fixation de la date du scrutin, avaient crédité le parti d’Evo Morales de 20,7% des intentions de vote et attribué 13,8% à son premier poursuivant, l’ex-président centriste Carlos Mesa.
Ancien ministre de l’Economie et des Finances publiques, de 2006 à 2017 et de Janvier à Novembre 2019, Luis Arce, âgé de 56 ans et originaire de La Paz, restera toujours, aux yeux d’une grande partie de ses compatriotes, comme étant «le père du miracle économique bolivien fondé sur un modèle de développement social, communautaire et productif».
Pour rappel, après la nationalisation des hydrocarbures en 2006 et la flambée du prix du pétrole, l’économie bolivienne avait commencé à croître à un taux annuel de 4,9% ; ce qui, selon les chiffres officiels, avait contribué à faire chuter la pauvreté de 38,2% en 2005 à 17,1% en 2018.
Aussi, Luis Arce constitue-t-il, pour l’ancien président, « une garantie pour l’économie nationale (et) un pont entre la ville et la campagne pour poursuivre le processus de changement (sans) exclure ni rejeter personne». Il sera secondé, à la vice-présidence, par David Choquehuanca, l’ex-ministre des Relations extérieures (Affaires étrangères) de 2006 à 2017 et sera soutenu à la fois par le MAS, le parti de l’ancien président et par des syndicats.
Les deux hommes se sont rendus à Buenos-Aires où une cinquantaine de dirigeants du MAS, de certains syndicats et de diverses organisations étaient venus débattre de la prochaine élection présidentielle mais aucun d’entre eux n’a assisté à la conférence de presse de dimanche.
Or, l’annonce faite par l’ancien président Morales qui a choisi un tandem qui «fait le lien entre les intellectuels amérindiens et les ‘Blancs sains’ des zones urbaines» c’est-à-dire ceux qui, pour l’ancien chef de l’Etat ont «joué le jeu de l’émancipation et de l’intégration des Amérindiens à la société et à l’économie du pays», n’a pas été du goût de tous les militants du MAS puisque les «cocaleros» (cultivateurs des feuilles de coca), qui représentent le «ciment historique du parti», aimeraient bien qu’Andronico Rodriguez, un des leurs, soit désigné comme candidat.
Enfin, si le tandem désigné, ce dimanche, par Evo Morales, pour montrer que même depuis son exil il garde la main sur les affaires du pays, diffère du binôme annoncé vendredi par des représentants du MAS à La Paz et comprenant l’ancien ministre des Relations extérieures David Choquehuanca et Andronico Rodriguez comme colistier, rien ne sera arrêté avant mercredi. Alors attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi