Saoudi El Amalki
Depuis déjà belle lurette, les stades du pays, précisément les gradins, sont transformés en espaces de « défoulements » déchaînés. Le public, en délire enflammé, chantonne à tue-tête des refrains dénonciateurs, en chœur harmonisé, de la politique publique du genre de « Dalamouni ! ». Un mouvement qui envahit la scène sportive et émane de jeunes supporters ne se contentant nullement de scander des slogans motivants en direction de leur club de prédilection, mais arborent des propos véhéments contre la privation, l’exclusion et la misère. C’est un phénomène qui foisonnent nombre de villes du royaume, notamment, Casablanca, Rabat, Fès, Tanger Agadir… Cette formule de protestation qui se propage, au fil du temps, dans les espaces de sport, est en passe de prendre des ampleurs, à mesure que leurs concepteurs se sentent frustrés et désemparés.
A première vue, cette résurrection dont les aspects spontanés pourraient paraître banals et anodin, revêt d’autres proportions aussi bien latentes qu’apparentes. Il va, en effet, sans dire que la teneur du verbe renferme des messages profonds bien au-delà d’une émanation profanée. A y prêter attention, il est question bel et bien, d’une réaction aux connotations politiques et revendicatives qui appellent les décideurs à s’occuper des conditions des catégories démunies de la société marocaine. Ceci étant, il importe de s’y pencher sérieusement, sans différence ni désintérêt. Il est bien vrai que ces jeunes si bien organisés et structurés dans la nature de ces requêtes, de plus en plus, virulentes, traduisent un haut de Hergé de conscience de par la finesse poétique des vocables et des tournures. En fait, on a bien l’impression que cette cohérence spectaculaire et surtout cette recherche créative dans les symboles et les messages, ne sont nullement le fait du hasard ni le fruit de jeu d’enfant. Mais, à coup sûr, une préparation minutieuse de ces prestations, encadrées par des experts en la matière.
Des experts d’accord, mais pas des mômes qui cherchent à se distraire ou encore à se vouer uniquement à leur équipe favorite. Ce sont certainement des avertis qui savent ce qu’ils font et à quoi rime leur ébauche. Ils ont opté pour la masse « sécurisée » et les stades qui abondent de public, mais aussi des populations qui regardent les matchs à la télévision. C’est-à-dire des millions de personnes de tous les coins de la nation. Et même si on ne comprend pas, sans doute, les propos, à cause du brouhaha massif, les gens sont toujours curieux de savoir ce qui se dit et se chante. Il est donc nécessaire voire impératif de répondre positivement à ces sortes d’attitude en pleine désarroi, ni pas par la riposte musclée, mais par les vertus de l’écoute et le dialogue, seuls clés de la résorption de la révolte pacifique.