Comment LG compte «manger le cerveau» des marocains

Il y a quelques mois le management de LG Maroc affirmait vouloir devenir numéro 1 au Maroc tous segments confondus. Son argument phare : l’intelligence artificielle et les objets connectés, sur fond de positionnement premium. Si l’ambition est louable, il n’en reste pas moins que le marché marocain reste plutôt un marché d’entrée de gamme. LG Maroc promet en tous cas un joli développement à l’avenir. Peut-être une diversification qui lui apportera le salut tant espéré…

LG Electronics se porte bien. Même très bien. Enfin, la division électroménager de la marque. Parce qu’en ce qui concerne la téléphonie mobile, c’est une toute autre histoire (cf encadré). Retournons à ce qui nous importe ici : 2019 aura été un bon cru pour l’électroménager, qu’il soit petit ou grand. Les résultats annuels dévoilés par le fabricant s’inscrivent en tout cas dans cette tendance. Le groupe coréen, qui compte cinq divisions, fait part d’une hausse de 11% de son chiffre d’affaires dans l’électroménager pour l’année dernière, à 18,29 milliards de dollars et d’un résultat d’exploitation de 1,7 milliards de dollars. « Un nouveau record historique » selon le communiqué diffusé à l’international.

Pour ce qui est du Maroc, évidemment les chiffres ne sont pas communiqués dans le détail, mais le management semble satisfait de l’évolution des choses. Même si le Maroc n’est pas un marché très important en termes de taille, il demeure stratégique pour LG. Le groupe y réalise des taux de croissance «satisfaisants» ces dernières années ; Le management en veut pour preuve ses parts de marchés. LG se place en première position sur le marché marocain de la climatisation (40% en valeur), 3ème dans le réfrigérateur (après Samsung et Siera) et oscille entre première et seconde place dans la machine à laver en fonction du canal de distribution. Aujourd’hui, la stratégie de LG est de se concentrer sur les produits de qualité avec un focus sur le premium selonHyun Chul Lee, chef de produit chez LG Electronics Maroc. Et la marque coréenne n’envisage rien de moins que de devenir numéro 1 sur tous les segments électroménagers. Arguments de vente ? Innovations propres à la marque, gains en temps, en énergie et facilité d’utilisation.

Des téléviseurs IA

Si depuis plusieurs mois LG Electronics Maroc multiplie les annonces, la dernière en date porte sur sa dernière génération de téléviseurs, autrement dit les premiers téléviseurs IA prenant en charge la commande vocale en arabe. Clairement l’objectif est de faire du pied au pays arabes et y occuper une place confortable.

« Après des années d’efforts en R & D, LG a enfin réussi à lancer la Télévision Arabe AI. LG montre sa détermination au nom de ses clients arabophones avec la première télévision arabe au monde et nous nous engageons à offrir aux consommateurs de nouvelles façons de vivre une vie intelligente et efficace », avait affirmée M. James Lee, président de LG Electronics pour le Moyen-Orient et l’Afrique.Pour bénéficier de ces fonctionnalités, il faudra aux ménages marocains intéressés débourser autour de 18.000 DH pour une Smart TV de 65 pouces, ou encore 56.000 DH pour une offre packagée comprenant réfrigérateur, lave-linge et la Smart TV.«Les ventes de télé avec intelligence artificielle ont réalisé une croissance de 184% entre 2018 et 2019. Le marché n’est pas énorme, mais la croissance y est », explique Soufiane Benabadji, Marketing manager chez LG Electronics Maroc dans une déclaration au quotidien L’Economiste. Avant d’ajouter : « La marque écoule environ 10.000 unités de ce type de téléviseurs par mois, soit environ 120.000 sur l’année ».

En dehors des téléviseurs, et déjà en 2018, lors d’un voyage presse à Seoul, le top management avait présenté 5 produits phares grâce auxquels il compte reconquérir le marché nord-africain, et marocain en particulier. Un climatiseur, un micro-onde, un four à gaz, une machine à laver et un réfrigérateur. Des produits ultra connectés, sortis tout droit du Seocho R&D Center, sorte de Silicon Valley sud-coréenne. À l’instar du réfrigérateur slim french-door (4 portes), avec un design plus petit mais plus de profondeur dans l’espace (835 mm au lieu de 731), utilisant 32% d’énergie en moins par rapport à son prédécesseur, et qui sera commercialisé au Maroc. Ce modèle évite 80% de la déshydratation des aliments et améliore le silence de l’appareil de 25%. Il est doté d’une garantie de 10 ans et le prix de lancement au Maroc est de 8000 dirhams.

Et pour comme qui dirait mettre l’eau à la bouche des marocains, LG Electronics Maroc a signé un partenariat d’un genre nouveau.

Une présence on line renforcée

En effet, LG s’est associé à Yamed Promotion pour équiper les 82 villas de haut standing du projet Terre Océane, en option, avec le nec-plus-ultra des produits LG.

Climatiseurs, réfrigérateurs, purificateurs d’air, lave-linge ou encore téléviseurs se retrouvent interconnectés à travers la plateforme LG ThinQ AI. Cette application mobile de gestion des appareils électroménagers intelligents, qui exploite la technologie de reconnaissance vocale de Google Assistant, permet aux utilisateurs de gérer tous les appareils électroménagers LG à l’aide d’une simple connexion Wi-Fi et de leur smartphone.

Si la marque coréenne envisage d’autres partenariats du genre, côté distribution aucun changement en vue, ou presque. Sa politique de distribution restera basée essentiellement sur le réseau GMS (grandes et moyennes surfaces) à travers des partenariats avec Marjane et les grands magasins Carrefour ainsi que les distributeurs d’électroménager. Il s’agira plutôt de renforcer ces partenariats afin d’assurer une meilleure couverture géographique de la marque sur tout le territoire national. Ceci étant, LG est présente sur tous les canaux (moderne, traditionnel, BtoB).

«En revanche, le groupe compte renforcer ses actions marketing dans le Royaume, en mettant un accent particulier sur le marketing online», confiait pour sa part, Seung Taek Ryu, responsable au département Ventes et marketing région Moyen-Orient et Afrique. 

Cependant, le fer de lance de LG Electronics, et pas seulement au Maroc, reste l’intelligence artificielle. Le constructeur continuera de s’appuyer sur ThinQ, son système d’exploitation pour objets connectés. Mais il prévoit une évolution par étapes des capacités et des possibilités de l’IA.La marque compte allait beaucoup plus loin.La compagnie sud-coréenne a annoncé début janvier, dans sa grande conférence de presse en marge du Consumer Electronic Show (CES), à Las Vegas, un partenariat majeur avec le laboratoire montréalais Element AI. C’est grâce à cette expertise québécoise que LG entend commercialiser des produits «révolutionnaires». Selon Le PDG québécois d’Element AI, Jean-François Gagné, avec de simples commandes vocales, il sera bientôt possible d’interagir avec notre environnement. Grâce à l’intelligence artificielle, les objets connectés pourraient reconnaître nos préférences et anticiper nos désirs.  «La transformation numérique va au-delà des terminaux habituellement connectés, elle va concerner tous les objets du quotidien» a expliqué IP Park, le président et directeur technique de LG.

Mais la surprise LG pourrait venir d’ailleurs et beaucoup plus tôt que les innovations par le biais de l’intelligence artificielle. «Sur les 69 filiales que compte le conglomérat, seulement une vingtaine s’est pour le moment globalisée. Vous allez entendre parler de nous assez souvent prochainement. Beaucoup, notamment au Maroc, ne connaissent que la branche LG Electronics et particulièrement sa division électroménager», avait déclaré en juillet dernier Kenneth Hong, directeur senior de la division business support au département Global Corporate communications. Car LG Corp, c’est aussi l’alimentation, le prêt-à-porter, les dentifrices, les shampoings, la décoration d’intérieur, les boissons, les cosmétiques, les panneaux solaires, la chimie, le sport…

Le 4e chaebol coréen

Créé dans l’immédiat après-guerre, Lucky Goldstar, devenu LG en 1995, est aujourd’hui le quatrième conglomérat (chaebol) de Corée du Sud, après Samsung et Hyundai. Il réalise un chiffre d’affaires global d’environ 49 milliards d’euros et demeure majoritairement aux mains de la famille fondatrice, les Koo. LG est présent dans 17 secteurs, de l’électronique grand public à l’électroménager en passant par la chimie, l’armement et les télécoms (2015).

Parmi les quatre premiers conglomérats du pays, Samsung est l’incontestable numéro un, tandis que Hyundai Motor et le groupe SK sont au coude à coude pour la deuxième place. C’est le résultat d’une étude menée par l’institut de recherche CXO, spécialisée dans les analyses des entreprises. Il a comparé notamment leurs chiffres d’affaires et leurs bénéfices d’exploitation de ces cinq dernières années. Le quatrième chaebol est donc le groupe LG qui maintient ses avoirs depuis 2015 à un niveau légèrement supérieur à 77 milliards d’euros (vs Samsung 308,8 milliards, Hyundai Motor170 milliards d’euros, SK167,6 milliards d’euros).

Toutefois, aujourd’huiles droits de succession constituent une menace pour les chaebols en Corée du Sud. La question est d’autant plus délicate que, au sein de ces conglomérats familiaux, la troisième génération de dirigeant est en train de succéder à la précédente, notamment après le décès de Koo Bon-moo, le dirigeant de LG.

En cause, une taxation de la succession des sociétés à 50 %, contre 26,5 % en moyenne dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ce taux passe à 65 % si le bénéficiaire est le premier actionnaire de l’entreprise familiale. D’après les calculs de l’institut CEO Score, les héritiers des vingt-cinq premières entreprises du pays pourraient devoir s’acquitter de 21 milliards de dollars (19 milliards d’euros).

Cependant, au sein des chaebols les plus puissants, il est difficile d’imaginer la fin de l’hégémonie familiale. Il leur faut donc payer. Les héritiers de Koo Bon-moo, feu le dirigeant du mastodonte de l’électronique LG, doivent verser 921,5 milliards de wons.

Vous souvenez-vous des mobiles LG ?

Il y a quelques années à peine les téléphones mobiles LG faisaient parties des modèles les plus répandus au Maroc. Puis peu à peu, ils ont disparu des radars. Et pour cause, pour la cinquième année consécutive, les mobiles de LG Electronics sont dans le rouge avec une perte de 860 millions de dollars en 2019. En cinq ans, les pertes cumulées de cette activité dépassent les 3,3 milliards de dollars (2,9 milliards d’euros). Mais Pas question pour autant de quitter le marché comme certains investisseurs le suggèrent. LG Electronics voit dans les smartphones un domaine clé de développement de l’intelligence artificielle et un vecteur stratégique de synergie avec d’autres activités de l’entreprise comme l’électronique grand public, l’électroménager, la robotique de services ou les équipements automobiles. Il parie sur l’essor de la 5G pour inverser la tendance.

53 milliards de dollars

C’est le CA du groupe LG en 2019, en progression de 1,6%, mais le bénéfice d’exploitation recule de 10% à 2 milliards de dollars et le bénéfice net fond de 88% à un peu plus de 150 millions de dollars.

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