Une grosse bulle d’air, voilà à quoi peut être assimilée l’Assemblée générale extraordinaire convoquée, mercredi 6 septembre, par certains adhérents du Raja de Casablanca, à leur tête la faction «Boudrika». Au final, «réunion du comité préparatoire pour l’Assemblée générale extraordinaire», apprend-t-on une fois sur les lieux. La surprise est à la taille de la versatilité extrême des acteurs de ce feuilleton d’accusations et contre-accusations qui n’a que trop longtemps duré et dont la réputation de ce grand club en a bien pâti.
Premièrement, le quorum n’a même pas été atteint. L’absence des deux tiers des adhérents du club a réduit cette initiative à un simple show. Un Show, puisque ce qui devait durer 20 minutes en a pris 120, incessamment interrompu par les réclamations de certains adhérents. D’abord, l’attente fut longue pour l’entrée en scène des deux candidats potentiels à la présidence, Jamal Eddine El Khalfaoui et Mohamed Boudrika, qui devaient prendre la parole et déclarer officiellement leur candidature.
À peine la séance entamée, le ciel est tombé sur la tête de Mohamed Saghrour, lequel a voulu prendre la parole le premier. Il est resté, micro en main, stupéfait devant les violentes critiques proférées de la part d’une bonne partie de l’assistance, à leur tête Marzak Seddiq, connu pour avoir filmé l’actuel président en train de «compter de l’argent» dans sa voiture, et pour s’être servi de cette « preuve » pour porter plainte contre Hasbane pour «manque de transparence». «Cette personne ne nous représente pas», a-t-il scandé à la face de Saghrour, l’empêchant littéralement de glisser un mot. Malgré les appels au calme de Hadj Mustapha Dahnane, la virulence des accrochages était telle que Saghrour a été forcé de se retirer.
Entre en scène alors Mohamed Khalfaoui, connu et respecté d’une grande partie des adhérents et du public Rajaoui. Prenant la parole, il a indiqué n’avoir pris ce pas qu’après l’insistance d’une grande partie de supportaires du club. Khalfaoui est clair et concis dans son discours : «Après une longue réflexion, j’ai accepté de présenter ma candidature, à deux conditions. Que l’actuel président soit décidé à céder sa place, chose qu’il est prêt à faire si la relève est sérieuse, selon ce que m’ont garanti plusieurs adhérents, même qu’il aurait cité mon nom dans ce sens. Ma deuxième exigence, c’est la tenue d’une AGE avec la présence du président sortant, et où seront discuté les rapports moral et financier, car il est inconcevable d’assumer la présidence sans avoir une idée exacte de l’état financier du club». La messe est dite.
Boudrika intervient après, et tient un discours réservé. «Je n’ai pas préparé de discours, mais je viens parler de mes sentiments et commenter l’état des lieux», et à lui d’asséner un premier coup. «Comment peut-on concevoir qu’une pétition signée par plus des deux tiers des adhérents, dont des anciens présidents, et qui appelle à cette AGE, a pu aboutir à un quorum non atteint ?», exprime-il ainsi ses suspicions sur la sincérité de certains adhérents à voir leur équipe sortir du bout du tunnel. «Les rumeurs sur la non légalité de ma candidature n’ont aucun fondement. Personne n’a le droit de m’enlever mon droit en tant qu’adhérent de me présenter. La présidence m’importe peu, preuve en est que j’ai cédé volontairement ma place par le passé. C’est pour satisfaire les attentes du public rajaoui que j’ai pris cette décision». Ou, «peut-être pour échapper aux poursuites judiciaires enclenchées contre lui par Hasbane», ironisent certains observateurs bien familiers de cette crise qui n’a que trop longtemps duré.
Seulement, un détail vaut la peine d’être précisé : Said Hasbane n’a nullement l’intention de céder son siège. Il croit dur comme fer à l’irrégularité de cette Assemblée, et compte bien aller jusqu’à la fin de son mandat de quatre ans. Il s’attache à la date précédemment fixéepour l’Assemblée générale ordinaire, celle du 19 septembre, où il ne sera point question de discuter de présidence, mais uniquement de présenter les rapports annuels du club.
Même si des photos d’une réunion nocturne de Hasbane et de Boudrika, tenue après cette tentative de putsch, ont circulé sur la toile, laissant croire à un probable compromis sur la présidence, ce serait mal connaitre le jeu du chat et de la souris auquel excellent ces deux protagonistes.
Iliasse El Mesnaoui