Un débat sur le multilinguisme au Maroc et ses enjeux sociaux, culturels et politique dans la société plurielle qui est la notre.
Invité du stand du CNDH, les éditions «En toutes lettres» ont organisé une rencontre autour d’un livre collectif traitant de la diversité linguistique au Maroc. «Maroc : Guerre des langues ?» est le titre de cet ouvrage qui a réuni des noms comme Abdellatif Laâbi, Yassin Adnan, Driss Ksikes, Mohammed Bennis, Jalal El Hakmaoui, Abdou Filali Ansary, Salim Jay, Nabyl Lahlou, Fouad Laroui, Ahmed Farid Merini, Mustapha Slameur entre autre.
Selon Kenza Séfrioui, l’éditrice, «cet ouvrage d’actualité traite d’un sujet très spécifique à notre société. Nous sommes fiers de la diversité culturelle et linguistique de notre pays. Par cette réflexion collective nous a permis de constater que nous ne pouvons plus nous contenter d’une fierté béate. En fait les langues au Maroc ont été confrontées à des enjeux, sociaux, économiques et politiques de notre société. Selon les langues que l’on maîtrise, on ne vit pas de la même manière».
Le projet consiste à donner aux auteurs la possibilité d’aborder le sujet de manière subjective sur leurs expériences dans ce contexte multilinguistique qui est le notre. Farid Mrini, psychanalyste s’y interroge sur le rapport que «nous pouvons avoir avec les langues dans un contexte de polyglottisme tant au niveau conscient qu’inconscient. A l’image de ce qu’une insulte soit proférée en Darija ou en français n’aurait pas le même effet. Les langues permettent parfois a un patient de ne pas vraiment dire son ressenti en l’expriment dans une autre langue.
C’est l’un des grands enjeux qui apportent des éléments d’analyse additionnel pour une meilleur perception de l’analysé».
Pour sa part Driss Ksikes, écrivain, journaliste, dramaturge entre autre, «il y a deux manières d’aborder la langue, on peut la prendre entant que norme, dans ce cas nous n’avons pas beaucoup de liberté à l’aborder. Par contre lorsque nous considérons cette langue comme une chose que nous pouvons posséder, là c’est notre ressenti qui est véhiculé dans toutes ses subtilités, elle devient notre langue». Jalal Hakmaoui, chercheur, poète, éditeur aborde le sujet dans un sens plus politique, à savoir l’héritage colonial du clivage entre l’arabe et le français. Pour lui, «le débat sur la darija et l’arabe ‘standard’ n’existe pas nous ne sommes pas dans un phénomène de diglossie car le fait de classifier ces deux langues en haute et basse ne correspond pas à la réalité. La darija est l’arabe vivant évolutif. La vrai confrontation se trouve entre l’arabe dans sa globalité et le français langue du colon».
Quant Mustapha Slameur, il y expose son expérience artistique qui est une sorte de voyage dans les langues. Il a fait du Rap en Français, du ragga en darija, du slam en darija et en arabe standard. Son intervention est un exemple vivant du multilinguisme que nous vivons au quotidien avec ses atouts et ses limites dans la capacité à s’exprimer.
Un débat passionné a suivi les interventions mettant en exergue les replis identitaires basés sur des raisons linguistique a bien montré l’importance que revêt un tel débat au Maroc.
MB