Le front local de suivi de la crise de la Samir n’envisage pas de rendre les armes. Il semble plutôt déterminé à aller jusqu’au bout de son combat. Lors de la conférence organisée, samedi 22 décembre à la Maison de Culture de Mohammedia, un seul ordre a dominé les débats : «Mamfakinch».
Les composantes de cette instance locale ont d’ailleurs déploré l’inertie du gouvernement et sa démarche stérile dans la gestion de ce dossier. «L’attitude du gouvernement demeure incompréhensible et irresponsable», a souligné dans son intervention Abdellatif Belhacen, coordinateur du Front, au début de la rencontre, ajoutant qu’en dépit de dizaines de manifestations de protestation, l’Exécutif continue de faire la sourdre oreille sous prétexte que la raffinerie est une société sous capital privé et que l’affaire est entre les mains de la justice. Il s’agit, selon lui, d’une posture absurde et sérieusement grave car une fermeture définitive de l’usine serait synonyme de l’effondrement de tout un système économique, a-t-il alerté.
La solution se trouve à Rabat…
Une analyse largement partagée par Houcine El Yamani, SG du syndicat national des industries du pétrole et du gaz et membre du Front local, qui a considéré pour sa part, que «le dossier de la Samir n’est pas seulement une question syndicale dans le sens étroit. Il s’agit d’un dossier sensible, complexe et lié à de grands enjeux d’intérêts», a-t-il déclaré avec insistance. Ces enjeux d’intérêts, Houcine El Yamani les résume dans la cupidité des opérateurs du secteur de la distribution des hydrocarbures voulant asseoir leur propre hégémonie sur le marché. Et d’affirmer que la cession des actifs de la Samir pour un autre preneur est tributaire de la position stratégique de l’Etat quant au secteur du raffinage, qui est d’ailleurs ambiguë. «L’Etat est dans l’obligation de présenter toutes les garanties pour faciliter le transfert de l’entreprise et également pour rassurer les investisseurs», a-t-il indiqué. En fait, selon le militant syndical, les clés de la résolution de la crise de la Samir se trouvent à Rabat et non pas ailleurs, indiquant dans ce sens que les étapes procédurales ont été épuisées et que l’Etat est appelé aussi à clarifier ses véritables intentions urbaines quant au lot de terrain où se situe la Samir.
Gasoil importé : impropre à la consommation ?
Pour lui, la fermeture définitive de la Samir serait une catastrophe nationale, vu que ce joyau industriel revêt un caractère stratégique pour l’Etat. Arguments à l’appui, le conférencier a fait savoir que la raffinerie assurait 80% des besoins de consommation des produits pétroliers et 55% en matière de gasoil. En plus de cela, la société est dotée d’un parc de stockage de 2 millions de tonnes de m3, soit 90 jours de consommation. Une norme indispensable que les autres opérateurs ne pouvaient assurer, a-t-il laissé entendre, tout en faisant allusion aux rapports de la Cour des comptes qui ont fait état d’un manque crucial en termes de capacités de stockages requises, n’atteignant parfois même pas un mois, ce qui constitue une grave violation de la loi, a-t-il martelé.
Pis encore! Le SG du syndicat national des industries du pétrole s’est même interrogé sur la qualité du gasoil vendu sur le marché local, appelant à une expertise internationale pour vérifier la conformité des produits par rapport aux normes établies. Abondant dans le même ordre d’idées, Houcine El Yamani a expliqué que la crise de la Samir a condamné à la faillite plusieurs entreprises, comme c’est le cas de la société Buzzichelli, spécialisée dans la construction métallique. A cela s’ajoute le port pétrolier dont les activités ont baissé de 40% et la fermeture de 320 entreprises de sous-traitance, soit l’équivalent de 4500 postes d’emplois, a-t-il fait savoir.
Pour sortir de la crise, le militant syndical estime que quatre scénarios sont possibles, soit la mise en place d’un modèle de gestion mixte, c’est-à-dire la conversion des créances en investissement, une gérance libre conformément à l’article 152 du Code des obligations et des contrats ou la cession à des tiers, le transfert de l’entreprise ou encore la récupération de l’usine par les autorités publiques, a-t-il conclu.
Khalid Darfaf