«Essaouira, la boussole qui indique la route que les autres ont perdue»

La ville d’Essaouira  a  accueilli du 28 avril  au  1er mai,  la 16e édition du  festival «le Printemps Musical des Alizés ». Durant  quatre jours, la ville a été marquée par des moments musicaux forts célébrant la musique classique, la musique de chambre… Essaouira a encore une fois véhiculé ses messages de paix, de tolérance et du vivre ensemble. Des centaines de mélomanes sont  venus des quatre coins du  monde célébrer la musique et la vie dans la ville.  Les propos.

Al Bayane : Cette 16e  édition du printemps des Alizés s’est tenue dans un contexte mondial tourmenté. Quelles sont ses lettres de noblesse?

André Azoulay : Des milliers de mélomanes sont venus assister au festival  et se sont réconciliés avec tout ce que nous avons perdu aujourd’hui, notamment l’écoute de l’autre. Nos  jeunes talents marocains, de 10 à 17 ans, qu’ils s’agissent des violonistes, des contrebassistes, des violoncellistes, sont un formidable message d’espoir. Ce sont des enfants issus de milieux précaires où le quotidien n’est pas facile, mais quand on les voit  interpréter les  répertoires de Brahms, Mozart, Schubert sans perdre ni leur identité, ni  leur histoire, encore moins, leur sensibilité et leur personnalité au sens le plus authentique du  terme, on se rend compte qu’ils s’inscrivent dans  l’universalité musicale.  Ils nous ont donné un message fort : la musique n’a pas de frontières  géographiques ou sociales. C’est le langage de l’altérité et de la rencontre, de l’échange et  du respect qui prime. Et c’est ce que la musique sait faire de plus beau.

Cette 16e édition  était  exceptionnelle, notamment avec la sélection de notre grande pianiste Dina Bensaid, qui  a commencé à jouer à  Essaouira à l’âge de 11 ou 12 ans,  au concours musical international de la Reine-Elizabeth, le concours le plus prestigieux au monde et le plus difficile.  Pour nous, cette sélection est un grand moment  de fierté.

Qu’en est-il du centre Haïm Zafrani ?

C’est un projet  à  trois dimensions qui se décline, notamment par la restauration de l’une  des plus anciennes synagogues d’Essaouira. Dans le même espace, il sera érigé un espace de mémoire sur l’histoire du judaïsme à Essaouira qui est d’une grande richesse et qu’on ne connait pas beaucoup. Ce nouvel espace vise à faire connaitre cette histoire. Le centre Haïm Zafrani est un centre de recherche sur la longue histoire entre l’islam et le judaïsme. Haïm Zafrani  est un historien, sociologue, anthropologue qui a beaucoup donné à la connaissance, à  l’écriture et à l’histoire de la civilisation de confession juive au Maroc. Il est aussi  originaire d’Essaouira.  Les travaux de ce centre qui  porte son  nom, ainsi que la synagogue et le musée seront achevés avant  la  fin de l’année.

Dernièrement  Dar Souiri  a abrité un colloque sur «la tolérance vue par les religions monothéistes». Y’a-t-il une possibilité du  vivre ensemble aujourd’hui?

Au  Maroc, ce n’est pas un problème. Le message que le Maroc envoie plutôt c’est celui de la solution et non du problème. Quand on est à  Essaouira, on se trouve en face d’une boussole qui indique la route que les autres ont perdue. Je crois que le monde a besoin de cette boussole.

Mohamed  Nait  Youssef

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