Gouvernance et complicités

Casablanca, c’est connu, est aussi la capitale des bidonvilles du Maroc. Et si près du quart de la population citadine du pays vit dans des baraques ou dans des logements insalubres, le Grand Casablanca se taille la part de lion dans ce triste phénomène.

Malgré les attentats de Casablanca et la mise à l’index de la marginalisation et de la pauvreté,  la ville peine à réduire sérieusement l’ampleur de ses bidonvilles, malgré les efforts financiers mobilisés pour la cause.

Les chiffres avancés sur ce qui reste à faire demeurent en deçà de la réalité, au vu d’une mauvaise gouvernance qui laisse énormément à désirer.

Selon les experts, ce sont entre 65 000 et 86 000 baraques qui restent à détruire (soit une population représentant entre 11 et 15 % de la métropole). Mais les progrès réalisés sont, à chaque fois, remis en cause, au point qu’un bidonville éradiqué est vite remplacé par d’autres regroupements  dans la périphérie.

Les pratiques courantes de nombreux agents d’autorité chargés du recensement des baraques existantes et l’incapacité d’interdire de nouvelles installations dans le périmètre urbain compliquent la tâche dans un espace où le patrimoine foncier fait cruellement défaut. C’est dire que l’extension du périmètre urbain s’accompagne automatiquement  par la naissance d’autres groupements de baraques, initiés parfois par certains bénéficiaires des programmes de relogement.

L’exode rural, un phénomène paru durant la grande période de sécheresse, se semble s’installer confortablement, dans la durée, malgré les efforts financiers de l’Etat destinés à débarrasser la ville de ce qui ternit l’image de la ville et du pays. Le coup d’accélération donné par l’INDH pour réduire la pauvreté rurale et périurbaine paraît comme une épée dans l’eau face au laxisme qui permet la création de nouveaux bidonvilles.

Les trois tranches initiées depuis 2004 donnent des résultats limités et la fameuse condition exigée par le ministre Taoufik Hjira bute aux interventions des autorités territoriales locales, incapables de mettre de l’ordre. Les règles sont pourtant claires pour une gestion normale et transparente de ce grand chantier.

Car s’il s’avère que les habitants font eux même le contrôle des bidonvilles, contre de nouveaux intrus, les autorités concernées ne se réveillent qu’après le squat d’autres espaces par de nouveaux ruraux, souvent assistés par des bénéficiaires de logements sociaux, dans le cadre des programmes de recasement.  Voire par certains agents d’autorité véreux…

Le ministère de l’Habitat, principal département  en charge du dossier, est conscient  que des résultats probants ne seraient atteints que si le ministère de l’Intérieur s’engage efficacement et sans relâche dans la lutte contre l’installation de nouveaux foyers insalubres dans de nouveaux espaces.

Il est vrai que le patrimoine foncier manque cruellement au Grand Casablanca et que la ville cherche à s’étendre sur ses flancs. Cela donne lieu à un véritable jeu de cache-cache, qui risque de devenir interminable, tant que des mesures draconiennes de contrôle continuent à faire défaut. Et au vu du manque de volonté locale à ce niveau, les experts semblent désespérés et croient que le phénomène ne sera pas éradiqué de sitôt. Le temps de parvenir au «contrôle des contrôleurs» et d’engager des enquêtes judiciaires contre les contrevenants aux décisions nationales de première importance.

Mohamed Amine

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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