Attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI
Au moment même où, ce samedi, le président américain, Joe Biden, se trouvait à Varsovie dans le cadre de la tournée européenne qu’il s’était engagé à effectuer au titre de la recherche d’une solution au conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine, des missiles russes ont atteint la ville ukrainienne de Lviv située à quelques kilomètres à peine de la frontière polonaise qui était épargnée par les combats; ce qui indique clairement qu’en dépit de l’intention qu’elle affiche de concentrer ses frappes sur le Donbass, la Russie peut encore attaquer n’importe où.
Il n’en fallait pas plus pour que quelques instants plus tard et dans un discours où la fermeté a cédé le pas à la virulence, le président américain a réaffirmé la détermination de l’OTAN à défendre son territoire et manifesté une très violente colère à l’endroit du président Vladimir Poutine qu’il est allé jusqu’à qualifier de « boucher ».
« Permettez-moi de dire ceci -si vous êtes capable de m’entendre- vous, le peuple russe, n’êtes pas notre ennemi (..) Je refuse de croire que vous accueillez favorablement le meurtre d’enfants et de grands-parents innocents ou que vous acceptez que des hôpitaux, des écoles, des maternités soient pilonnés par des missiles et des bombes russes (…) Cet homme [Vladimir Poutine] ne peut pas rester au pouvoir ».
A entendre parler le président américain, on croirait que les bombes russes sont beaucoup plus meurtrières que celles qu’ont coutume de larguer l’aviation US et ses alliés de l’OTAN et que le fait d’attaquer les hommes, les femmes et les enfants sans aucune distinction est une particularité de l’armement russe ; des propos infondés que le plus naïf des enfants écarterait d’un simple revers de manche.
L’analyse rapide de ces phrases jetées à la face du monde, par le président de la plus grande puissance mondiale, sans aucun habillage de circonstance et qui ne sont rien d’autre que la plus grande intrusion dans les affaires intérieures d’un Etat souverain, indique clairement que soit le président américain a la mémoire trop courte soit qu’il est devenu sénile – ce qui reste compréhensible vu son âge – et qu’à ce titre, il aurait oublié que lors de leur « entrée » en Irak, en Afghanistan, en Syrie et dans bien d’autres endroits de la planète Terre qu’il serait trop fastidieux de citer ici tant leur liste est longue, les troupes américaines n’ont jamais offert des bouquets de fleurs à la population des pays qu’elles envahissent et des territoires qu’elles conquièrent et que la création des Etats-Unis repose, essentiellement, sur le massacre des autochtones.
Aussi, en voulant nuancer les propos contraires à la déontologie politique par lesquels le président américain a déclaré que son homologue russe « ne peut pas rester au pouvoir », un responsable de la présidence américaine s’est empressé d’arrondir les angles en affirmant que Joe Biden « ne parlait pas du pouvoir de Poutine en Russie ou d’un changement de régime » mais qu’il voulait signifier par-là que « Poutine ne peut pas être autorisé à exercer un pouvoir sur ses voisins ou sur la région » ; ce à quoi Dmitry Peskova, le porte-parole du Kremlin, a rétorqué que « ce n’est pas à Biden de décider. Le président de la Russie est élu par les Russes ».
Est-ce à dire qu’après avoir fait croire qu’il allait entamer une tournée en Europe afin d’encourager des négociations de paix, Joe Biden – dont le pays se trouve à des milliers de kilomètres de là – et à qui il appartenait, pour préserver la paix dans la région, d’accepter la non-inclusion de l’Ukraine dans l’OTAN, se serait plutôt attelé à jeter de l’huile sur un brasier fumant et à attiser un feu prompt à ravager la région ?
Au vu de tout cela, il est difficile de croire que la paix pourra avoir le dernier mot mais attendons pour voir…