La politique, c’est -aussi- du sérieux

C’est désormais un secret de polichinelle : un «blocage» réel entrave la formation d’un nouveau gouvernement autour du parti arrivé en tête du scrutin du 7 octobre. Ce constat qui connaît un grand succès médiatique, est véhiculé notamment par certains journaux et sites électroniques à travers les déclarations de certains leaders politiques et les réactions d’apprentis sorciers, journalistes et enseignants universitaires transformés en maîtres es-fatwas ; à travers des constructions pseudo-constitutionnelles pas du tout innocentes tant cela sent leurs connivences avec des lobbies, révélant ainsi, leur nature de services commandés.

Cela révèle surtout que ceux qui ont perdu la bataille du 7 octobre n’ont pas encore rendu leurs armes et s’échinent à marquer des points en changeant de terrain d’intervention et en convoquant d’autres comparses pour de médiocres jeux de rôles.

Cela confirme aussi une leçon historique : l’édifice démocratique n’est pas un schéma linéaire aboutissant à une station terminus ; c’est est une construction permanente, appelant une mobilisation continue pour préserver les acquis, surtout quand ils vont dans le sens contraire des intérêts des forces réactionnaires. Car les enjeux ne concernent pas seulement le parti déclaré vainqueur par les urnes avec un chef de gouvernement désigné par le Souverain dans la stricte application des clauses de la Constitution. C’est cela qui est aujourd’hui piétiné par des forces et des partis qui révèlent finalement leur véritable nature.

Le véritable enjeu dans la situation actuelle serait de défendre le processus démocratique dans sa logique globale pour préserver le pluralisme, dans l’intérêt du pays, sa stabilité et… surtout pour le principe.

Et dans cette bataille de principe sont concernés les démocrates sincères ; les forces politiques légitimes attachées à leur indépendance, au pluralisme, à un Etat fonctionnant sur des institutions…Toutes les voix sincères doivent s’élever haut et fort pour veiller à l’application démocratique de la Constitution de 2011, pour défendre l’avenir de la démocratie au Maroc et pour la pérennité de cette « exception marocaine ».

Car en face, l’image est peu reluisante. C’est triste aujourd’hui de lire l’édito d’un patron de journal qui y appelle à faire fi de la Constitution, dans un piètre exercice théorique qui ramène les pendules au temps révolus. C’est triste de voir une professeure de Droit constitutionnel, de surcroît ancienne membre de la commission d’élaboration du texte préliminaire de la Constitution, appeler à ignorer le parti classé premier à l’issue des élections et la désignation par le Roi de son secrétaire général pour la formation du gouvernement conformément à la Constitution, et proposer dans l’incohérence théorique totale… la désignation du leader du parti classé quatrième !

Nous vivons, en fait, le comble de la misère d’un paysage politique envahi par des petits esprits qui ne voient pas plus loin que leur nez… et qui mènent le pays vers l’inconnu au moment où la situation et le pays ont besoin de sages, de penseurs visionnaires animés du souci de l’intérêt général.

Mais plus personne n’est dupe pour croire en ces balivernes qui reprennent des formules éculées. Les masques sont tombés et ces manœuvres dérisoires ne peuvent plus compter sur ces constructions qui ne sont rien qu’un décor factice qui cache mal les vrais maîtres-marionnettistes.

En un mot comme en mille, le pays mérite mieux que ce mauvais scénario. Il a besoin de sérieux à tous les niveaux du système politique et partisan.

Un scrutin démocratique a eu lieu. Il a permis à un parti d’occuper la première place. Le Roi a choisi un chef de gouvernement dans la stricte application de la Constitution. Ce que l’on qualifie aujourd’hui du vocable galvaudé de « blocage », perturbe cette dynamique, nuit à cette image. Il est porteur surtout de périls et d’incertitudes dont  le pays n’a nullement besoin.

Oui, la politique, c’est aussi du sérieux ; il fait cruellement défaut.

Top