En l’absence de certaines conditions précises, l’intérêt particulier qu’accorde le projet de loi de finances 2019 aux secteurs sociaux risque de se transformer en fausses promesses, si rien n’est fait pour couper net avec la corruption, la rente, la prévarication et la monopolisation, indique la députée Aicha Lablak, présidente du Groupement parlementaire du progrès et du socialisme (GPPP : PPS) à la Chambre des représentants.
Dans une déclaration à Al Bayne en marge de la discussion en commission du PLF19, la députée a fait savoir que son Groupement accueille favorablement l’augmentation des budgets notamment des ministère de l’enseignement, de la santé, de l’emploi et d’autres secteurs à caractère social (Ramed, Tayssir, aides aux veuves et personnes aux besoins spécifiques), tout en exprimant ses craintes de voir de telles promesses rester lettres mortes si rien n’est fait au préalable pour préparer les conditions requises pour l’application de ces nouvelles dispositions.
Mais est ce que le gouvernement a-t-il la capacité et les moyens requis pour y parvenir pour l’exécution de ces nouvelles mesures sociales, sachant que le déficit énorme dont souffre la population, et en particulier les couches pauvres,en matière d’accès aux services de base n’a d’égal que l’incapacité du gouvernement d’agir. C’est d’ailleurs pourquoi, l’on estime nécessaire au GPPS de procéder pour l’instant à une première évaluation du programme gouvernemental, qui accordait lui aussi un intérêt particulier aux secteurs sociaux. Mais où sont passés les engagements pris dans ce programme, sur la base duquel le gouvernement a été investi, s’est-elle interrogée.
Tout indique que peu de choses ont été respectées, comme en témoignent d’ailleurs la montée des tensions sociales et la multiplication des mouvements sociaux impliquant de nombreuses régions et couches sociales pauvres et non pauvres (Al Hoceima, Zagora, Jerada et ailleurs). Même des milieux d’affaires ne sont pas épargnés, a-t-elle indiqué. C’est ce qui explique leur inquiétude et la fuite des capitaux et des cadres et réduit de plus en plus les chances du pays d’attirer des investissements, a-t-elle encore dit.
Ce ras le bol s’exprimait aussi de manière nette à travers la campagne de boycott de certains produits et sociétés et à laquelle presque toutes les couches sociales y ont participé, a-t-elle martelé.
Selon la députée, le débat que suscite l’actuel projet de loi de finances doit être l’occasion de rechercher le moyen de rétablir la confiance des citoyens dans l’action politique, des institutions et des partis politiques. Il doit permettre aussi de dissiper la confusion et le flou qui planent sur les perspectives politiques du pays, qui fait du surplace au niveau de son édifice démocratique, en dépit de la teneur très avancée de la Constitution de 2011.
Mais qu’est ce qui bloque le processus démocratique en cours pour aller vers l’Etat de Droit (politique et économique) et mettre fin à tous les aspects de la prévarication, de la corruption et de la rente, qui rongent l’économie du pays, s’est-elle interrogé.
Vous avez dit… le plafonnement des bénéfices des compagnies pétrolières?
Elle a par ailleurs laissé entendre que le gouvernement n’a pas respecté son engagement de plafonner les bénéfices des compagnies, à l’issue du débat au parlement du rapport de la commission parlementaire sur les tarifs des hydrocarbures. Le gouvernement a confié en définitive le dossier au Conseil de la concurrence qui n’est pas encore opérationnel, a-t-elle déploré, estimant qu’en agissant de la sorte, le gouvernement porte un coup fatal à l’assainissement de la situation.
Au niveau économique, la députée a indiqué que les lois du marché ne sont pas les seuls facteurs qui assurent l’ajustement et les équilibres sociaux, le rôle de l’Etat est déterminant dans ce domaine pour créer de l’emploi, limiter les disparités sociales et les déséquilibres territoriaux, selon elle.
Elle a fait savoir dans ce sens que ce sont les pays qui accordent plus d’intérêt à la justice sociale, qui enregistrent les plus hauts taux de croissance, soulignant la nécessité pour le gouvernement de procéder à une réévaluation des exonérations fiscales et autres avantages concédés au secteur privé.
Elle a rappelé dans ce cadre que le GPPS enregistre favorablement le fait que le gouvernement compte consacrer 195 milliards de Dirhams à l’investissement public, faisant remarquer toutefois que rien ne garantit que ces crédits auront un impact positif sur la situation économique et sociale du pays.
Elle a par ailleurs exprimé le vœu de voir l’année 2019 marquer le début de la réhabilitation de l’action politique, des institutions et du retour en force des partis politiques pour pouvoir jouer pleinement leur rôle dans l’encadrement des habitants et leur réconciliation avec l’action politique pour le bien du pays et sa démocratie, comme le réclame le PPS dans son appel visant à donner un souffle démocratique nouveau au processus d’édification démocratique et des réformes attendues dans le pays.
M’Barek Tafsi