‘’Laisse dormir ton ancre tout au fond de mon sable,

Mohamed Sektaoui : un poète tout simplement !

Mohamed Nait Youssef

Sous l’ouragan de sel où ta tête domine,

Poète confondant, et sois heureux,

Car je m’attache encore à tes préparatifs de traversée!’’, René Char, à la Désespérade.

Inutile de le présenter en deux mots. Certes, Mohamed Sektaoui est un militant de la première heure,  figure  emblématique de la scène des droits de l’Homme au Maroc, mais il est aussi et surtout poète. La parole est révélatrice et profonde. La parole est une plaie ouverte… sur le monde. Telle une trace, la parole demeure à jamais. René Char disait : «Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver.» En effet, dans son dernier recueil de poèmes ‘’Khalaate’’ édité récemment par Dar Attaouhidi, Mohamed Sektaoui nous amène à des territoires inconnus, à des espaces désertiques, vastes et vides,… à des endroits isolés où les silences blancs, longs retrouvent un écho dans l’ontologie de celui qui interroge, qui médite, qui questionne l’essence de l’existence humaine. La vie n’est pas un long fleuve tranquille !  Mais, nous traversons quand même vers d’autres confins, lointains… à la recherche d’un sens, voire des sens à cette vacuité qui nous habite. Mohamed Sektaoui interroge le non-sens, interpelle les non-dits dans un monde miné et désorienté. Par ailleurs, le recueil est une invitation au voyage dans ce grand désert  où les temps s’arrêtent, où la présence et l’absence déchirent les tripes de celui, de ceux qui attendent. Eternel vagabond ! 

Dans ce vide sidéral, le poète mène une réflexion profonde sur la vie, sur le sort de l’humain et l’avenir de l’homme des temps actuels. Ce long périple poétique est aussi méditatif et spirituel. Car, dans cette espèce de noirceur, d’errance jaillit une lumière ; celle de la ville. A vrai dire, dans ce recueil, Mohamed Sektaoui vénère l’idée de la vie, de l’humain tout court. 

Dans sa poésie, dont l’image est puissante, créative, significative, le poète évoque les éléments de la nature : la mer, le ciel, l’eau, la terre… pour révéler ce qui demeure caché dans sa rêverie créatrice.

« Le poète est celui qui connaît, c’est à dire qui transcende, et qui nomme ce qu’il connaît. », écrivait Gaston Bachelard dans «La poétique de l’espace».

En outre, cette transcendance de la langue poétique,  laisse le poète cheminer son rêve dans une réalité instable et marquée par les doutes et des turbulences. Dans ce vide, le revenant panse ses plaies et ouvert ses yeux sur l’horion après avoir enterré ses tripes dans les terres profondes et arides. L’écriture lui a sauvé la vie.

Top