L’Association Awal Houriates dénonce le flou communicationnel du gouvernement

Nouveautés du Code de la famille

Khalid Darfaf

La reforme du Code la famille, un chantier encore en gestation, requiert plus d’audace et de transparence communicationnelle de la part du gouvernement, ont souligné les participants à la table-ronde, portant sur les nouveautés du Code de la famille,  organisée samedi 11 janvier 2025 au siège national du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) à Casablanca,

Initiée par la Coordination provinciale du Forum Parité et Egalité d’Anfa en ollaboration avec la section locale du Parti d’Ibn Msik, cette rencontre fut marquée par la participation de l’Association Awal Houriates,  qui était représentée par sa présidente, Nouzha Skalli et sa secrétaire générale, Rachida Tahiri.  La modération a été assurée par Hind Moumayz, membre du Bureau exécutif du Forum Parité et Egalité et spécialiste en approche genre.

Prenant la parole, Nouzha Skalli n’a pas manqué l’occasion pour louer les efforts consentis par le PPS en vue de promouvoir le  statut de la femme marocaine. Elle a mis  l’accent sur le fait que le Parti a toujours occupé le devant de la scène en s’engageant à défendre acharnement  les principes de l’égalité et la parité. D’ailleurs, a-t-elle insisté, le Parti du Livre a fait de la défense de la femme son cheval de bataille et a contribué à la formation de plusieurs dirigeantes nationales, qui ont consacré leur combat à la à cette cause. Argument à l’appui, Nouzha Skalli a cité l’exemple de l’Association démocratique des femmes du Maroc (ADFM), née en 1985 au sein du PPS.

L’ancienne ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité a souligné dans ce sens que la bataille pour l’amélioration des droits de la femme et l’enfant et la promotion de l’égalité entre les deux sexes  a nécessité des décennies de mobilisation dans un contexte difficile, régit par des schèmes patriarcaux.

Cependant, la militante pour les droits des femmes a déploré le manque criant des données fiables  sur la réalité de la famille marocaine, tout en indiquant que la dernière étude en la matière effectuée par le HCP, remonte au 1995, avant de mettre l’accent sur le fait que les données du recensement général ne reflètent pas de manière assez claire la réalité de la famille marocaine, notamment le rôle économique rempli par la femme dans les ménages.

Autrement dit, « une véritable réforme du Code de la famille doit abroger l’héritage par agnation « Taasib, qui n’a pas d’existence dans le texte religieux. Il s’agit d’une grande injustice à l’égard de la femme », a-t-elle martelé.  Et de poursuivre : « Nous voulons une réforme profonde du statut et non pas un changement de forme ».

Autre point non moins important, a-t-elle indiqué, celui de l’âge du mariage. Cela étant,  la nouvelle loi ne devrait point contenir des exceptions, en autorisant le mariage l’âge du mariage à 17 ans. « A cet âge, l’école demeure le lieu idoine pour la fille. L’objectif escompté est celui d’assurer son autonomisation financière », a-t-elle déclaré avec insistance.

Abondant dans le même ordre d’idées, la conférencière a appelé à une nouvelle approche herméneutique voire une lecture éclairée du texte coranique, notamment en matière de la polygamie, tout en faisant au verset coranique qui dit : «Vous ne pourrez jamais être équitable entre vos femmes. »

Il faut dire, selon elle, que  les propositions étalées par le gouvernement sont confuses. Sur 139 propositions de réforme, seulement 17 ont été dévoilées à l’opinion publique, tout en déplorant le fait que ces propositions ne contiennent pas des mesures tangibles.

Nouzha Skalli s’est également  interrogée sur  les raisons qui ont poussé les Oulémas a refusé l’adoption de la mesure du recours au test ADN lors de la procédure de la reconnaissance de la parenté, tout en faisant aussi  référence au droit de successions qui ne permet point sur même pied d’égalité les deux sexes, notamment entre les musulmans et les non- musulmans.

Afin de mener à bout l’ensemble des revendications du mouvement des femmes, elle a appelé les partis politiques progressistes et démocratiques et la société civile à faire face à la campagne idéologique et rétrograde visant à maintenir le statue quo.

Des recommandations en dessous des attentes

De son côté, Rachida Tahiri, Secrétaire générale de l’association « Awal-Houriates », a appelé à en finir avec la domination masculine en vue d’instaurer une parité entre les deux genres. L’experte dans l’approche genre, s’est ainsi interrogée sur la campagne injustifiée  que mènent certains milieux pour stopper la réforme du Code De famille.

Pour elle aussi, les recommandations annoncées par le gouvernement ne sont pas claires. « Le gouvernement s’est contenté d’annoncer des «  axes », au lieu des mesures contenant l’essence de la réforme », a-t-elle fait remarquer.

« Il s’agit des recommandations qui se situent en dessous des attentes du mouvement de la femme », a-t-elle regretté.

En termes plus clairs , « le législateur est appelé à se conformer à la raison, en tenant compte des normes et référentiels encadrant l’acte législatif, à savoir la Constitution, et les engagements internationaux du Royaume, particulièrement le protocole facultatif à la CEDAW qui constitue une partie intégrante de la loi marocaine », a-t-elle précisé.

La conférence a ainsi déploré l’utilisation de l’expression « enfant adultérin »,  tout en soulignant que la Constitution marocaine dispose dans son article 32 que l’Etat « assure une égale protection juridique et une égale considération sociale et morale à tous les enfants, abstraction faite de leur situation familiale. » Rachida Tahiri a indiqué dans ce sens qu’une « réforme en bonne et due forme doit interagir avec la réalité loin de toute une position schizophrénique. »  Autrement dit, « la réforme du Code de la famille  doit se mettre au diapason de la réalité de la famille marocaine,  qui a connu des mutations profondes ».  « Cela exige une reconstruction des piliers de la loi et ce sur la base du droit objectif et non pas des règles qui datent de plus de 14 siècle, étant donné que la finalité de la religion est celle de préserver l’être humain et éliminer, par conséquent,  l’injustice», a-t-elle recommandé. Ainsi, l’intervenante a mis en garde contre certains discours qui prétendent que la réforme du Code de la famille vise à priver l’Homme de ces droits. «Loin s’en faut ! Il s’agit d’un discours fallacieux,  destiné à induire en erreur l’opinion publique», a-t-elle expliqué,  tout en invitant les fuqahas à sortir de «la logique du flou».

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