Le PLF 2014 est loin d’être un projet de crise, encore moins un projet de relance

Il s’agit plutôt d’un budget de rigueur, inapte à assurer la relance de l’économie nationale, ont relevé, chacun à sa tour, dans leurs exposés les experts financiers du PPS ayant animé une journée d’études, organisée la semaine dernière par le Groupe du progrès démocratique à la Chambre des représentants sur le PLF 2014.
Selon ce projet, le déficit budgétaire doit être ramené à 4,9 % du PIB en 2014 sur la base d’un taux de croissance du PIB de 4,2 %, d’un taux de change moyen de 8,5 dirhams contre le dollar américain et d’un cours moyen de pétrole de 105 dollars américain le baril.
Et pourtant l’étape que vit le pays dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles est cruciale. Le Maroc se doit en effet de donner corps dès cette année à des réformes structurantes décisives pour la poursuite de la mise en place du modèle économique et sociétal, que le Royaume s’est choisi.

Pr Mohamed Rahj : La croissance de l’économie mondiale est encore timide


Selon le Pr  Mohamed Rahj, certains pays (USA, Japon) ont certes renoué dès le début de ce deuxième semestre de 2013 avec la croissance économique, mais les taux enregistrés jusqu’à présent sont loin d’être encourageants. Ce qui fait dire à d’aucuns que le taux de croissance de l’économie mondiale devra tourner autour de 1 % en 2014. Ce qui devra évidemment impacter positivement les autres économies dans le monde dont le Maroc, où la crise se fait sentir de manière plus forte qu’avant.

Au niveau national, a-t-il dit, le PLF 2014 intervient dans un contexte prometteur marqué par les résultats encourageants réalisés durant le premier semestre de l’année 2013, notamment le rendement important du secteur agricole avoisinant les 97 millions de quintaux, l’amélioration continue de la performance des secteurs relevant des métiers mondiaux du Maroc, la contribution positive des échanges commerciaux à la croissance et l’amélioration des revenus du tourisme et des transferts des Marocains résidents à l’étranger, a-t-il dit.
Le Maroc a également tiré profit de la conjoncture perturbée qui prévaut dans le reste du monde arabe pour capter une grande partie des investissements étrangers, lesquels ont connu une augmentation de 23 %, a-t-il dit. Bien qu’il se veut un budget de relance, le projet de loi de finances 2014, tel qu’il est présenté, manque toutefois de moyens pour y parvenir, a-t-il dit, notant que nombre de mesures  fiscales contenues dans le projet sont susceptibles d’aggraver la tendance inflationniste liée aussi aux charges de la Caisse de compensation, qui ne représente en fait qu’une partie du problème du déficit budgétaire.

Pr Ahmed Azirar : Le PLF 2014 ne répond qu’à 10%

des promesses du programme gouvernemental

Quant au Pr Ahmed Azirar, il a estimé que le PLF 2014 est loin de répondre aux promesses prises dans le programme gouvernemental. On y trouve moins de 10 % des engagements annoncés dans ce programme, a-t-il affirmé, ajoutant que le pays vit en effet une période de transition pour passer d’une économie à un autre modèle économique et social.
C’est ce qui explique, ne serait qu’en partie, pourquoi a-t-on élaboré un projet de budget de rigueur et non de crise, a-t-il noté, appelant toutefois le gouvernement à exploiter tous les atouts dont il dispose pour donner un coup de pouce à la croissance économique du pays, dont la ligne de crédit de 6,2 milliards de dollars mise à sa disposition par le FMI pour la réalisation de projets productifs. Il a également évoqué un certain nombre de contraintes afférentes aux problèmes de manque de liquidités du fait de l’augmentation de la masse salariale (103,7 milliards de dirhams) et des charges compensatoires. Il s’agit aussi d’un projet qui innove surtout en consacrant la préférence des PME en matière d’obtention des marchés et commandes et en lançant l’entrée en vigueur progressive de l’impôt agricole.        Au niveau social, le projet affiche la volonté des pouvoirs publics de poursuivre la lutte contre la précarité et la pauvreté, a-t-il relevé.  

Dr Salah Grine : les mesures fiscales risquent d’avoir un effet inflationniste

si elles ne sont pas bien pilotées

Et c’est en expert fiscal que le Dr Salah Grine a abordé de manière académique le PLF 2014, exposant une à une les différentes mesures fiscales et douanières du projet de loi de finances 2014 – qui sont au nombre de huit- dont en premier lieu l’imposition progressive des exploitations agricoles, la suppression de quelques exonérations en matière d’IR et de TVA et le relèvement du taux de la TVA sur certains produits et services.
A compter du 1er janvier 2014, les grandes sociétés agricoles qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 5 millions de dirhams seront imposées. L’exonération fiscale accordée au secteur de l’agriculture sera maintenue  uniquement au profit de la petite et moyenne agriculture. Le Projet de loi de finances 2014, a-t-il dit,  prévoit la mise en œuvre de mesures spécifiques à la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), tournées vers l’élargissement optimal de l’assiette, sur les deux années à venir.
Dans le cadre de la réforme de la TVA visant l’élargissement de l’assiette par la suppression des exonérations qui ne se justifient plus, il est proposé, à compter du 1er janvier 2014, d’appliquer un taux de 10 %  à certains produits ou services, notamment les prestations de restauration fournies directement par l’entreprise à son personnel salarié et certains matériels agricoles.
Dans le même objectif, il est proposé d’appliquer un taux de 20 % à certaines opérations et produits, notamment les raisins secs et figues sèches, les bougies et paraffines et les engins et filets de pêche.
Afin d’harmoniser et uniformiser les taux applicables en amont et en aval, par l’institution de deux taux de 10 % et 20 % et dans le but d’atténuer les situations de butoir et de renforcer la neutralité de la TVA, il est proposé, à compter du 1er janvier 2014, la taxation au taux de 10 % de certains produits soumis au taux de 7 %, à savoir les conserves de sardines et les aliments destinés à l’alimentation du bétail.
Il est également proposé de taxer au taux de 20 % certains produits soumis au taux de 10 %, à savoir le sel et le riz usiné et de taxer au taux de 20 % certains produits soumis au taux de 14 %, à savoir les graisses alimentaires et margarines et les véhicules utilitaires.
Afin d’assurer une meilleure neutralité de la TVA, le PLF propose de supprimer, à partir du 1er janvier 2014, la règle du décalage d’un mois.
En vue de simplifier et d’alléger les obligations fiscales incombant aux opérateurs économiques en l’occurrence ceux n’ayant pas d’établissement stable au Maroc, il est proposé de considérer l’acquéreur comme étant le redevable légal de la TVA lorsqu’il s’agit des opérations réalisées avec des entreprises non résidentes, à travers l’institution du régime de l’auto-liquidation.  
Après cette présentation exhaustive, le Dr Grine a souligné que ces mesures risquent d’avoir un effet inflationniste si elles ne sont pas accompagnées par d’autres faisant partie des recommandations adoptées lors des assises nationales sur la fiscalité de 2013, les deuxièmes du genre.
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